Tentations US dans le Sahel

Les Américains veulent y traquer les relais d’Al-Qaïda

Les conditions de l’arrestation du numéro 2 du GSPC rappellent étrangement celles de Saddam Hussein, les images en moins.
Depuis le 15 mars dernier, Amar Saïfi, dit El-Para, est détenu par la guérilla du Mouvement pour la justice et la démocratie au Tchad (MTJD) qui cherche son transférement vers l’un des pays où il est officiellement recherché. Cet homme est présenté par les services de sécurité depuis plusieurs années comme un dangereux terroriste, coupable de tueries et de rébellion contre l’État. Il est “activement recherché� pour son implication présumée dans de nombreux attentats terroristes contre des cibles civiles et militaires.
Et depuis l’année dernière, il fait l’objet d’un mandat d’arrêt international émis par la justice allemande. Cette dernière l’accuse d’avoir été le cerveau de l’enlèvement de 32 touristes européens dans l’extrême-Sud algérien en 2003, pourtant libérés après le paiement d’une importante caution par le gouvernement allemand. Numéro deux du GSPC, El-Para est par ailleurs considéré — paroles d’Américains ! — comme un serviteur d’Oussama Ben Laden dans la vaste région du Sahel où Al-Qaïda tenterait de s’installer. Selon Washington, El-Para dirigerait un important groupe, composé “d’éléments très dangereux�, capables de mener des attaques spectaculaires y compris contre les intérêts américains en Afrique, pourtant très bien protégés.
Des informations jamais démenties par les pays concernés par la stabilisation du Sahel. Propagande ? Il y a encore quelques semaines, une telle interrogation aurait pu paraître comme l’expression d’un excès de mauvaise foi. Mais, aujourd’hui que les faits sont là , la question mérite d’être posée. Car l’arrestation d’El-Para rappelle étrangement celle de Saddam Hussein, les images en moins.
Le «dangereux» terroriste algérien a été, en effet, capturé le 16 mars sans difficulté par une patrouille de rebelles tchadiens. Il errait dans le désert après avoir été accroché lui et son petit groupe d’une quinzaine de personnes par l’armée régulière tchadienne, qui est loin d’être un modèle en matière d’efficacité dans la lutte contre la guérilla. Sans véhicule, ni nourriture, ni armes, les “dangereux terroristes� ignoraient même qu’ils se trouvaient au Tchad.
On se souvient pourtant qu’après l’accrochage entre le groupe d’El-Para et les militaires tchadiens, le Pentagone s’était officiellement félicité de la progression de la lutte contre le terrorisme dans cette région d’Afrique. Les généraux américains ont même affirmé sans rire avoir aidé l’armée tchadienne dans cet exploit.
Les Américains pouvaient-ils ignorer la réalité de la situation sur le terrain ? Pourtant, c’est en partie pour lutter contre le groupe d’El-Para que l’initiative “pan-Sahel� a été lancée à grands renforts de réunions de chefs d’état-major de plusieurs pays africains.
Et c’est pour combattre El-Para que les Américains envisageraient d’installer des bases militaires dans cette zone, qu’ils décrivent comme le futur Afghanistan.
L. G.