Le Président de la République félicite l'équipe nationale pour son titre au Championnat arabe de basketball    Clôture des travaux de la 6e Conférence des présidents de parlement tenue à Genève    « Faire des micro-entreprises des exemples inspirants pour les Start-ups et les étudiants »    Renforcement de la protection sociale de la famille    Conférence mondiale des présidents de parlement à Genève : la délégation parlementaire algérienne tient une rencontre de travail avec la délégation autrichienne    Quels impacts pour l'Algérie où l'Europe s'engage à acheter 250 milliards de dollars/an de produits énergétiques aux USA    La BM classe l'Algérie dans la tranche supérieure des pays à revenu intermédiaire pour la deuxième année consécutive    Après la France, le Royaume-Uni reconnaîtra l'Etat de Palestine    Jeux Africains scolaires : la boxe masculine algérienne décroche huit médailles d'or    CHAN-2025 L'ambiance de plus en plus palpable    Foot/ CHAN 2024/reportée à 2025: la CAF dévoile le nouveau trophée de la compétition    Le colonel Abdelkrim Djaarit, nouveau commandant de la Gendarmerie nationale    Baisse significative du taux de prévalence des infections nosocomiales en Algérie    La barre des 500 kg de cocaïne saisis franchie    Seize porteurs de projets innovants dans les industries culturelles et créatives retenus    Quand Rome demeure Rome, Bruxelles n'a jamais été rien d'autre que rien    Oran : le 2e Salon international du Dentaire MDEX du 18 au 20 septembre    Protection civile : renforcement des efforts de la formation en matière de premiers secours    Jeux Africains scolaires (JAS-2025) / Badminton : 6 médailles dont une en or pour l'Algérie    Solidarité nationale : parachèvement de l'opération de versement de l'allocation spéciale de scolarité dans les délais impartis    Pluies orageuses accompagnées de grêle sur 3 wilayas du Sud à partir de vendredi après-midi    Agression sioniste contre Ghaza : le bilan s'alourdit à 60.332 martyrs et 147.643 blessés    L'Algérie prend la présidence du CPS de l'UA pour le mois d'août    Oran: "La Nuit des musées", une soirée à l'ambiance singulière    Attaf reçoit son homologue sud-africain    Biskra commémore le 59 anniversaire des "massacres du dimanche noir"    Initiative Art 2 : 16 porteurs de projets innovants dans le domaine des industries culturelles et créatives retenus    Agressions sionistes contre Ghaza : plus de 232 journalistes tombés en martyrs depuis octobre 2023    Pierre-Emerick Aubameyang, le retour à l'OM    Renforcement des perspectives de coopération dans le domaine de la jeunesse entre l'Algérie et la Chine    L'Algérie plaide pour une action urgente en faveur de Ghaza    Victoire de l'Algérie devant le Koweït 86-74    Le sarcophage maudit    Le héros national, le Brigadier de Police Mellouk Faouzi s'en est allé    Insuffler une nouvelle dynamique à la coopération bilatérale    Hidaoui souligne l'importance d'encourager les jeunes dans le domaine des médias numériques    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Grande dame d'esprit et d'écrit
ASSIA DJEBAR (1936-2015)
Publié dans Liberté le 10 - 02 - 2015

L'image que je garde d'elle, précieuse et fraternelle, c'est celle de sa posture altière, tête droite, qu'elle inclinait pour mieux écouter en plissant légèrement les yeux, le sourire toujours prêt à éclore. Elle était fière d'être, fière de tout ce qui a fait sa vie, sa culture, sa citoyenneté, son art et son intelligence, jamais pervertie de vanité.
Elle s'est absentée du monde, Assia, la grande dame d'esprit et d'écrit, la grande dame élégante et grave, et déjà elle nous manque. On est toujours suffoqué quand la mauvaise nouvelle tombe. Le chagrin brouille le regard, la main tremble, la mémoire se désordonne. Assia portait en elle la part belle de l'Algérie, elle la portait comme un talisman ou une boussole qui indiquerait, aux Algériens, la route de la joie et des libertés après tant de mensonges et de malheurs. L'image que je garde d'elle, précieuse et fraternelle, c'est celle de sa posture altière, tête droite, qu'elle inclinait pour mieux écouter en plissant légèrement les yeux, le sourire toujours prêt à éclore. Elle était fière d'être, fière de tout ce qui a fait sa vie, sa culture, sa citoyenneté, son art et son intelligence, jamais pervertie de vanité. Je lui disais qu'elle était, par la rareté de ses qualités, de son talent, la sœur astrologique de Taos Amrouche ou sa fille d'esprit. Elle répondait par la voix de Jean Amrouche : "Qui donc me donnera de pouvoir fiancer l'esprit de mes aïeux à ma langue adoptive ?". Assia avait la passion de l'Histoire, non pour y trouver des réponses, mais des paroles et des signes qui font lien et sens avec le présent. La décennie sombre a été une horrible humiliation pour notre société. Assia supportait mal, l'assassinat d'amis et de tant d'innocents. Nous avons subi les épreuves subies par sidna Ayyoub, disait-elle. Mais ce sont des Algériens, pas Dieu, qui nous les ont fait subir, aux explosifs et au couteau. Archaïsme de la pensée, archaïsme des supplices. On ne peut pas sortir indemnes de cette tragédie.
Dans son dernier roman, Les Désorientés, titre tellement évocateur et en résonance avec notre présent, Amin Malouf écrit : "De la disparition du passé, on se console facilement ; c'est de la disparition de l'avenir qu'on ne se remet pas. Le pays dont l'absence m'attriste et m'obsède, ce n'est pas celui que j'ai connu dans ma jeunesse, c'est celui dont j'ai rêvé, et qui n'a jamais pu voir le jour."
Vrai, quand on parlait du pays, on citait, pour rire, notre ami Kateb Yacine qui disait : "Quel beau pays l'Algérie, vraiment beau, terrible comme il est beau ! Dommage qu'il soit le nôtre !" Tu le taquinais, faisais semblant d'être fâchée, mais tu savais que l'humour et la dérision était chez le poète sa manière d'exorciser les démons de l'échec, d'être un farceur face à la grande farce nationale. Assia Djebar a, comme Amin Malouf, les yeux éblouis par la blancheur solaire, elle vit le même basculement dangereux que le Libanais : la peur d'être happée par la mutité et engloutie dans l'obscure béance de l'oubli, ou au contraire, marcher, aller ailleurs, écrire et ainsi surseoir à la douleur de l'absence de trois amis chers : "Ainsi moi, à votre propos, chers amis, vous la triade (Boukhoubza, Boucebci et Alloula) la plus proche à mon cœur, de la terre là-bas, de la patrie commune, tandis qu'entre nous seul l'écheveau des mêmes langues trésaille et vous rend à nouveau si présents !"
Assia ne veut pas oublier, elle ne veut pas se perdre dans une ville dont elle ne sait pas le nom ; elle ne veut pas être Eid, le héros amnésique des Terrasses d'Orsol, de Mohamed Dib.
"Simplement, je ne vois plus l'Algérie. Simplement, je tourne le dos à la terre natale, à la naissance, à l'origine. Simplement, je découvre la terre entière." "Le Blanc de l'Algérie", pour Assia n'est pas la couleur d'une mémoire qui s'estompe, jusqu'à devenir transparente, ni celle du linceul jeté sur des corps appelés à l'absence absolue, "c'est le blanc inaltérable de vos présences, dit-elle, oui toi Kader, Mahfoud, M'hamed, Mouloud, Anna, Yacine, Larbi, Josie, Bachir, Mohamed, Mouloud encore, Jean, Taos, encore Jean... qui déplie le feuilleté de l'histoire algérienne et ressent la pointe de la blessure qui palpite et jamais ne se cicatrise".
Ta présence parmi nous a été fertile, Assia, merci.
B. M.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.