Résumé : Ferroudja accompagne sa mère pour rendre visite à son grand oncle. Ce dernier est mécontent de la savoir seule dans la grande ville, et ne le cache pas à sa sœur. La jeune fille est outrée par tant de méchanceté. Elle tente de quitter les lieux, mais elle est vite rappelée à l'ordre... C'était la femme de son oncle qui la tirait par le bras pour l'obliger à se rasseoir. Son oncle se rallonge sur sa natte et reprend sa conversation houleuse avec sa sœur : -Pourquoi ne la mariez-vous pas ? Vous aurez ainsi un gendre qui s'occupera de vos terres... -Ferroudja est encore très jeune pour le mariage, mon cher frère... -Jeune ? À quel âge t'es-tu mariée toi ? Tu n'avais pas tes 14 ans, si je me le rappelle bien... -Mais les temps ont changé mon frère... -Non. Les temps n'ont pas changé... Le village a gardé les mêmes traditions et mœurs... Tu veux me faire croire que vous êtes plus avertis que les autres dans ta famille ? Mariez Ferroudja, te dis-je. Mariez-la avant que la honte ne s'abatte davantage sur la famille... -Nous y penserons mon frère dès qu'un bon parti se présentera. -Qu'appelles-tu donc un bon parti ? Un homme riche ? -Non, pas forcément... Nous aimerions la caser dans une bonne famille et auprès d'un homme sérieux et travailleur qui la rendra heureuse... L'oncle se gratte la tête un moment avant de conclure : -Demain matin, je viendrai voir Ali, et nous en rediscuterons sur le sujet... Femme ramène à dîner à ma sœur et à ma nièce, elles sont nos invitées, et nous leur devons certains égards... -Nous avons déjà dîné mon oncle, lance Ferroudja, qui était pressée de quitter les lieux... Son oncle la toise d'un air hautain : -Je ne t'ai pas accordé le droit à la parole, que je sache Ferroudja. Ici, c'est moi l'homme de la famille, et c'est moi qui commande... Vous allez passer à table ta mère et toi, ensuite nous allons passer le reste de la soirée à discuter autour du feu, j'ai ramené des glands du souk, nous allons les griller pour passer le temps... Ferroudja revint déprimée de chez son oncle. Ses vacances, qu'elle voulait passer auprès de sa famille, s'avérèrent une calamité. Son père, rendu impuissant par sa maladie, ne résistait pas longtemps devant les colères brusques et brutales de son beau-frère. Ali avait beau protester, il ne pouvait rien faire. Ses jambes refusaient de le porter, et ses nerfs malades ne supportaient plus rien... Ferroudja se voit contrainte de subir le calvaire de cet oncle méchant et autoritaire, qui vient s'ingérer dans le quotidien de sa famille. Pourtant, tout le monde au village louait Ferroudja pour son courage et sa beauté. Son "émigration" en ville avait, certes au début, soulevé quelques réflexions malveillantes, mais par la suite, sa conduite irréprochable avait fini par clouer le bec aux mauvaises langues. Les gens respectaient Ferroudja. Ils venaient souvent la solliciter pour l'achat d'un médicament, ou la remise d'un courrier urgent. Ferroudja ne refusait jamais de rendre service aux gens de son village... Elle passe quelques jours entre le marteau et l'enclume, puis opte pour la solution la plus adéquate à sa situation : le retour en ville. Elle prépare son paquetage, embrasse ses deux jeunes sœurs encore endormies, et va réveiller sa mère. Etonnée, celle-ci essaye de la retenir encore quelque temps, mais Ferroudja avait décidé de quitter le village avant le lever du jour... Les larmes aux yeux, Laldja l'accompagne jusqu'à l'orée du village pour la voir monter dans le premier bus de la journée, avant de revenir à la maison. Sur son chemin de retour, elle rencontre son frère et détourne la tête. -Elle est partie, hein ?, lui lance-t-il d'un air dédaigneux. Laldja se retourne et lui fait face : -Oui, elle est partie... Tu nous a tant harcelés qu'elle a fini par nous quitter... Que fera-t-elle ? Quand pourra-t-elle revenir ? Je n'en sais rien si c'est ce que tu veux savoir... Elle est libre ma Ferroudja... Tu m'entends ? Elle est libre et elle fera ce qu'elle a envie de faire... Quand nous mourrions de faim, ni toi ni personne d'autre n'avait daigné nous rendre visite ou nous faire l'aumône d'un morceau de pain... Et maintenant, tu viens sermonner ma fille... Non, mon frère, lâche-moi et va t'occuper de tes affaires... Sur ce, elle tourne les talons et se dirige chez elle, le laissant planté là, ne sachant quoi faire... Il finira par brandir le poing en sa direction et lance un juron, puis continue son chemin en direction du champ... (À suivre) Y. H.