Alors même que les activités de production et d'investissement sont censées tenir lieu de seule perspective de sortie de crise, celles-ci se voient plombés par la chute libre que subit la valeur du dinar, compromettant sérieusement la relance de la production nationale. En effet, dans une économie où les taux d'intégration restent encore faibles, les producteurs recourent souvent à l'importation pour fournir leurs industries en équipements et en matières premières indispensables. En termes plus clairs, les entreprises doivent faire face à une augmentation des couvertures en dinars de leurs opérations d'importation en cours de réalisation. Elles doivent pour une importation en dollars, puiser plus dans leur trésorerie pour en couvrir le montant total en dinars ou augmenter leur dette d'exploitation au minimum d'un montant égal, alors qu'il n'est pas évident qu'elles fassent le même montant de bénéfice supplémentaire. Selon de nombreux opérateurs, toutes les entreprises algériennes, sans exception, sont touchées par la dévaluation du dinar. La dévaluation du dinar est fortement ressentie par les chefs d'entreprise car elles sont vulnérables et ne peuvent pas faire face aux dépenses et à l'augmentation des charges. Ce sont elles qui subissent de plein fouet les contrecoups de la dépréciation de la monnaie nationale, et cela influe négativement sur leur développement et leur croissance. L'entreprise subit l'impact direct de la dépréciation du dinar en ce sens que la majorité des entreprises font dans la transformation à partir d'intrants importés. Du coup, l'impact est ressenti sur le coût de production et le prix de revient. Cette augmentation des coûts est le plus souvent répercutée sur le prix final du produit. Cependant, augmenter les prix de vente dans un contexte de forte d'inflation où le moral des ménages est déjà en berne, ne constitue pas forcement la solution. À défaut, les opérateurs seront obligés de réduire les effectifs et les investissements, ce qui revient à compromettre la relance de la production nationale. Face à ces difficiles choix, les opérateurs semblent désormais réduits à attendre un geste de la Banque d'Algérie pour espérer s'en sortir. Reste que le choix de la répercussion sur le prix final n'est pas possible dans certains secteurs, à l'instar du secteur pharmaceutique qui selon le directeur général de l'entreprise Merinal, Nabil Mellah, subit cette énorme dévaluation du dinar sans pouvoir la compenser par une augmentation des prix, étant donné que ces derniers sont fixés pour cinq ans au moins et que le secteur n'arrive pas à obtenir d'augmentations de prix auprès des services concernés, et ce, même pour des produits dont le prix est figé depuis vingt ans à 27 dinars sortie usine. Selon Nabil Mellah ce n'est pas tant la dévaluation qui pose problème. Il est normal, ajoute-t-il, d'aller vers le prix réel de notre monnaie. Mais c'est le manque de réactivité des pouvoirs publics concernant les problèmes induits par cette dévaluation sur l'entreprise qui pose problèmes. D'ailleurs, le directeur général de Merinal indique que les pouvoirs publics ont été saisis sur ce problème sans qu'ils aient donné suite à cette saisine. Cette situation a eu pour conséquence de réduire la visibilité des opérateurs économiques dans leurs opérations ponctuelles, mais aussi dans leurs projets d'investissement. "Cela gêne le fonctionnement normal de l'entreprise et décourage le chef d'entreprise dans ses projets", ajoute-t-il. Cette dévaluation impact également les grandes entreprises publiques, à l'instar d'Algérie Telecom qui par la voie de son PDG indiquait en novembre dernier que son entreprise allait rencontrer des difficultés dans la mise en œuvre de ses projets de développement. Azouaou Mehmel précisait que "le budget d'investissement est de l'ordre de 40 milliards de dinars. Avec des fluctuations de 30% du taux de change, ça va impacter le plan de réalisation et c'est 30% de réalisations qui ne seront pas faites". La dévaluation du dinar représente donc pour lui un coup dur pour l'atteinte de ses objectifs dans le secteur. Saïd Smati