L'auteur veut, à travers cet ouvrage, "rendre hommage aux célébrités médicales de l'Est algérien", et sa capitale, qui "a connu de grands noms dans différents domaines des sciences. Le professeur en médecine et auteur Mostefa Khiati vient de publier aux éditions Enag, le livre Médecins de Constantine, de l'antiquité à nos jours, qui retrace l'évolution de la médecine en Algérie de l'antiquité jusqu'à la période post-indépendantiste, et ainsi "rendre hommage aux célébrités médicales de l'Est algérien", et sa capitale, qui "a connu de grands noms dans différents domaines des sciences", indique l'auteur dans son introduction. Sur les 303 pages de cet essai, nous retrouvons cinq chapitres examinant chacun un pan de l'histoire et des pratiques de la médecine constantinoise, mais aussi les combats que ces praticiens ont dû mener, notamment sous l'ère coloniale, où le nombre était "insignifiant". Grâce aux données archéologiques citées par le professeur, l'apparition des premiers Constantinois peut-être estimée à "un million d'années", grâce à la découverte d'outils caractéristiques du pré-acheuléen à Aïn Hanech en 1931, et des sphéroïdiques à facette sur le plateau de Mansourah en 1945. Durant la période antique, il est indiqué que les Berbères "avaient une forte natalité et une longévité exceptionnelles", tandis que la plupart des morts en Afrique étaient causées "par la vieillesse ou par l'aventure", écrit Khiati en reprenant les termes du philosophe romain Sénèque. En Numidie et Maurétanie césarienne, des traces de médecins sont retrouvées sur des monuments épigraphiques, à l'image d'un homme au chevet de princeps Misinedin. Plus loin, l'auteur présente une liste de médecins constantinois de la période romaine, à l'instar d'Apulée de Madaure, Maximus, Avianus Vindicianus, Théodorus Priscianus Caelus Aurelianus, ou encore Cassius Félix. Au cours des IVe et Ve siècles, des formations médicales étaient assurées à Hippone selon Khiati. Ces médecins publics "bénéficiaient avec leur famille d'exonérations des charges publiques", contre lesquelles ils prodiguaient "des soins gratuits aux pauvres". Dans le chapitre, "période coloniale", le lecteur apprend que les premiers médecins algériens formés par l'école française n'ont commencé à exercer qu'une quarantaine d'années après la colonisation, soit en 1857, dont une dizaine seulement portera le titre de "docteur", à la fin du 19e siècle. Sur les 329 docteurs en médecine orientaux, formés à l'école de médecine de Paris, le premier Algérien, d'origine française, y décrochera son diplôme en 1859, reprend l'auteur d'après une étude de Panzac. Pour démontrer la marginalisation des praticiens musulmans, Khiati soulignera que l'Oranie comptait 23 médecins seulement, tandis que le département de Constantine en comptait 32, dont huit seulement étaient dépêchés dans la ville de Constantine. Ces praticiens étaient Rabah Allouache, Abdel Benchouf, Lefgoum Bencheikh, Amor Bendali, Mohamed Bendib, Mohamed Bendjelloul, Youcef Bedjaoui et Hamou Benidir. Si les médecins se faisaient rares, les pharmaciens et les chirurgiens-dentistes l'étaient encore plus, si l'on se rapporte aux informations fournies par l'auteur. Pour les premiers, ils n'étaient que 19 dans tout le département de Constantine à la date du 1er janvier 1951, parmi lesquels figurait le nom d'un certain Ferhat Abbas, tandis que les seconds étaient au nombre de 7 dans le Constantinois. Dans le dernier chapitre, le professeur revient sur la naissance de l'école de santé de Constantine, après le départ du personnel médical européen, qui laissa "144 hôpitaux sans personnel administratif et technique". Cette situation est le résultat, selon Khiati, de l'exclusion volontaire des "médecins fonctionnaires et des hospitalo-universitaires" musulmans des structures sanitaires durant la période coloniale. En 1962, le ministre de la Santé Essghir Nekkache se chargera de reconstituer le secteur médical algérien, avec la priorisation des hôpitaux des trois grandes villes du pays. Par ailleurs, les médecins du maquis ou exilés ont été rappelés afin de pallier ce manque et remettre sur les rails ces structures. Pour la faculté de médecine d'Alger, seul un agrégé en médecine était disponible, en la personne de l'ophtalmologue Aouchiche. En octobre 1962, ce sera le professeur Caricabiru qui en deviendra le recteur, aidé par les professeurs Illoul et Benhamla. Yasmine Azzouz