La vulnérabilité des populations de la bande sahélo-saharienne, sur le plan socioéconomique, a permis le renforcement des capacités de recrutement de groupes terroristes. L'approche sécuritaire, dans la lutte contre l'extrémisme violent, ne fait plus recette, même si elle reste nécessaire, se sont accordés à dire hier à Alger les intervenants à la cérémonie d'ouverture, au siège du ministère des Affaires étrangères, des "Troisièmes conversations régionales pour la prévention de l'extrémisme violent dans la région sahélo-saharienne". "S'il est indispensable, l'effort sécuritaire doit nécessairement s'intégrer dans des approches politiques, économiques, sociales, culturelles et cultuelles à long terme qui ciblent les possibles facteurs d'exclusion, de marginalisation ou même d'injustice sociale qui peuvent exister dans la société et que la propagande terroriste exploite extensivement à son avantage", a déclaré d'emblée le ministre des Affaires étrangères Abdelkader Messahel, soulignant que ce combat est l'affaire de tous, individuellement ou collectivement. Cet avis est partagé par Larry Gbevlo-Lartey, le représentant spécial de l'Union africaine pour la coopération antiterroriste et non pas moins directeur du Centre africain d'études et de recherche sur le terrorisme (CAERT). Selon lui, investir sur la paix doit aussi l'être par d'autres canaux, en plus de la lutte armée. Et d'expliquer que les groupes terroristes opérant dans le Sahel et les pays de l'Afrique de l'Ouest ont changé leurs méthodes de travail et de recrutement. "Les groupes armés se sont réorganisés et ont créé de nouvelles alliances", a-t-il dit, en référence aux groupes islamistes qui ont fusionné pour créer le Groupe de soutien à l'islam et des musulmans (GSIM), sous la direction du terroriste malien le plus recherché, Iyad Ag Ghali. "Dans cette économie criminelle, les groupes terroristes ont adopté une nouvelle stratégie. Ils profitent des frustrations locales, de la misère sociale et économique, de la pauvreté des gens et des conflits internes dans les pays du Sahel pour les besoins de leur recrutement", a-t-il expliqué, soulignant que les conflits ethniques et communautaires ont permis à ces groupes de prospérer et d'étendre leur sphère d'influence. "Les espaces communautaires sont devenus leurs fiefs de recrutement", a expliqué Larry Gbevlo-Lartey. Le meilleur exemple demeure encore Iyad Ag Ghali qui a constitué le gros de ses troupes, lorsqu'il avait lancé Ansar Eddine début 2012, des membres de sa communauté touarègue. C'est le cas aussi chez son allié Amadou Kouffa qui recruté d'abord chez sa communauté peule ses premiers éléments pour former le Front de libération du Macina. Si le discours religieux mobilise toujours, il l'est moins que le discours bâti sur les inégalités sociales et les défaillances des politiques gouvernementales. "Il faut mettre en place des stratégies de lutte efficaces et surtout adaptées aux besoins des populations locales notamment celles confrontées à toutes sortes de pauvreté et de précarité", a expliqué d'ailleurs, lors de son intervention, le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies pour l'Afrique de l'Ouest et le Sahel, Mohamed Ibn Chambas. Lyès Menacer