La vague d'arrestations arbitraires s'est poursuivie, cette semaine encore, avec l'interpellation, à Alger, de plusieurs militants, avant-hier, à l'occasion du 33e vendredi de la révolution du Sourire, puis hier, lors de la journée commémorative du 5 Octobre. Parmi les personnes arrêtées, au moins cinq sont maintenues en garde à vue et devraient être présentées, aujourd'hui, devant le procureur de la République près le tribunal de Sidi M'hamed, dans la capitale. Il s'agit de militants de l'association Rassemblement Actions Jeunesse (RAJ) : le membre fondateur Hakim Addad, Aïssous Massinissa, Djalal Mokrani et Kamel Ouldouali. Les mis en cause sont gardés à vue, depuis vendredi, à la brigade de la Gendarmerie nationale de Bab J'did, avons-nous appris auprès de Me Abdelghani Badi, l'un des avocats du collectif de défense bénévolement constitué. Particulièrement ciblée, visiblement pour son engagement dans le hirak, l'association RAJ avait enregistré, la semaine dernière, l'arrestation puis la mise sous mandat de dépôt de trois autres de ses militants, à savoir Tigrine Wafi, Karim Boutata et Ahcène Kadi. Pour justifier leur incarcération, la justice avait invoqué des chefs d'accusation très graves contenus dans les articles 76 et 79 du code pénal : "Atteinte à l'intégrité du territoire national" et "enrôlement de volontaires ou mercenaires pour le compte d'une puissance étrangère en territoire algérien". Les juges ont incriminé des commentaires postés par les prévenus sur les réseaux sociaux. Un sort malheureux que Me Badi déplore, tout en craignant qu'il soit réservé aussi, sauf jugement honnête, aux nouveaux prévenus dès aujourd'hui. Ces dépassements sont toutefois loin de décourager les militants du RAJ encore en liberté et toujours résolus à poursuivre leur combat auprès du peuple jusqu'à l'aboutissement de la révolution pacifique. "Les campagnes d'intimidation, de harcèlement et d'arrestations ne pourront affaiblir ou déstabiliser notre détermination et notre engagement pour une Algérie libre et démocratique, pour un Etat des droits et des libertés", écrit, à ce titre, l'association dans un communiqué signé par son président, Abdelouahab Fersaoui, rendu public hier. Et d'ajouter : "Rien ne pourra arrêter la marche du peuple pour sa liberté et sa dignité, pour la reconquête de son indépendance et la construction de sa république démocratique et sociale." Le RAJ, qui "condamne et dénonce avec force ces arrestations arbitraires attentatoires aux libertés individuelles et collectives", appelle, par conséquent, "à la solidarité pour exiger leur libération immédiate et inconditionnelle ainsi que celle de tou(te)s les détenu(e)s d'opinion". "Ces faits et cette chasse aux militants du RAJ confirment l'existence d'un acharnement du pouvoir réel contre l'association pour la faire taire dans ces moments historiques que vit l'Algérie", dénonce encore le RAJ pour qui "cette campagne d'arrestations ciblées des militants montre l'absurdité du régime avec sa logique suicidaire, poussant vers l'explosion". Pour ses responsables, le RAJ serait "visé pour son dynamisme, son travail et son engagement pour le mouvement populaire et pour la démocratie et la justice en Algérie". Et, à travers le RAJ, ajoutent-ils, "ce sont toutes les forces et dynamiques engagées, les militants et activistes pour le changement pacifique du régime qui sont visés pour faire taire leurs voix et imposer la feuille de route pour la régénération d'un système mourant". Le nombre des détenus d'opinion s'élève à une centaine, dont 86 incarcérés à la prison d'El-Harrach. Selon des avocats, une dizaine de détenus sont en grève de la faim depuis jeudi dernier. Une action de dernier recours à laquelle comptent se joindre "incessamment" les autres détenus, précise Me Boubaker Hamaïli, qui a rendu visite, hier, à ses mandants à la prison d'El-Harrach. Farid Abdeladim