S'il y a bien un secteur qui suscite la colère des citoyens à l'échelle de la wilaya de Bouira, c'est sans conteste celui de l'habitat. Les protestations relatives aux retards de distribution de logements et autres "irrégularités" dans les listes des bénéficiaires sont devenues monnaie courante et à chaque opération d'affichage des listes, les services de sécurité sont sur le qui-vive de peur que la situation ne dégénère. Et en matière de retard et autres atermoiements liés aux chantiers de l'habitat, la wilaya de Bouira fait pâle figure. Sous d'autres cieux, en 20 ans, un pays tout entier peut émerger quasiment du néant. En Algérie et particulièrement à Bouira, on peine encore à édifier de nouveaux quartiers. Le programme AADL à la traîne Et pour cause, 20% des logements attribués à la wilaya de Bouira depuis 1999 à nos jours, n'ont pas été achevés, selon les chiffres communiqués lors de la célébration de la Journée mondiale et arabe de l'habitat, célébrée le 2 octobre dernier. Ainsi, sur un total de 98 833 unités accordées à la wilaya toutes formules confondues, 20 361 logements n'ont pas été encore réceptionnés, dont 7024 n'ont toujours pas été lancés. Dans le détail, 5773 logements entrant dans le cadre de la formule LPL sont en stade de chantier, le LPA connaît également un retard des plus significatifs. Preuve en est, sur un total de 8631 unités programmées depuis 1999, 5827 logements ont été achevés, 2464 sont en cours de réalisation et 340 non lancés. La formule AADL est également à la peine avec 11 054 logements qui ont été octroyés à Bouira et seulement un seul chantier celui du chef-lieu de la wilaya a été réceptionné partiellement, où 505 souscripteurs ont reçu leurs clés le 2 octobre dernier. Pire encore les 2900 unités déjà attribuées à la wilaya dans le cadre de l'AADL 1 et 2 n'ont pas encore démarré. Les autorités locales sont encore au stade du choix du terrain, notamment dans les communes de Lakhdaria et Sour El-Ghozlane. Dans les communes de M'chedallah, Aïn Bessam, Kadiria, Haïzer et El-Hachimia, les taux d'avancement oscillant entre 15 et 70%. Pour ce qui est des projets nouvellement inscrits, à savoir les 1890 à Ouled Bellil et 2000 de Sour El-Ghozlane, les études techniques n'ont pas encore été achevées. En revanche, les programmes LSP et habitat rural, à quelques rares exceptions, n'ont pas connu de retard flagrant, puisque sur 20 325 logements sociaux, 14 552 ont été achevés et 5773 sont en cours de réalisation, avec un taux d'achèvement avoisinant les 90%. Pour ce qui est de l'habitat rural, cette dernière arrive en tête en matière de quotas octroyés et taux d'achèvement. Ainsi, la wilaya a bénéficié de 53 949 aides à l'habitat rural entre 1999 et 2019, et pratiquement tous ont été délivrés. Des insuffisances à tous les niveaux Mais pourquoi autant de retard ? Eh bien plusieurs facteurs peuvent expliquer cela. Tout d'abord, des entreprises que même les autorités locales qualifient de défaillantes, notamment dans les programmes AADL, LPA et ex-LSP. Les mises en demeure et autres pénalités de retard sont distribuées comme des petits pains. Ensuite, il y a le sempiternel problème des paiements des entreprises. En effet, la plus grosse coupe budgétaire est supportée par les investissements publics. Dans le budget 2017, les dépenses d'équipement avaient dégringolé de près de 30%, passant à 2 291,4 milliards de DA en 2017 contre 3 176,8 milliards de DA en 2016. Conséquence directe de cette austérité "déguisée" en rationalisation des dépenses, les entreprises tournaient dans le vide. Ce n'est qu'en mai 2017 que la situation financière de pas moins 158 entrepreneurs a été débloquée, pour un montant de plus de 840 millions de DA. Enfin, la wilaya de Bouira a connu durant les années 2015 et 2016 une importante pénurie de ciment, qui avait impacté le secteur du BTPH. De plus, on peut citer les "défaillances" des différentes institutions publiques chargée de suivre les travaux, c'est du moins ce qu'ont indiqué les différents rapports des commissions de l'Assemblée populaire de wilaya ( APW) chargées du secteur de l'habitat. En effet, les membres desdites commissions ont clairement pointé du doigt "l'incompétence" des entreprises chargées de la réalisation des projets de logements. Il faut dire que les élus n'y sont pas allés de main morte, en qualifiant le secteur de "honte" pour la wilaya. De plus, les rapporteurs ont souligné également "le manque de coordination entre les différentes directions, à l'instar de la SDC, l'ADE, la DEM et la DRE, chargées d'accompagner les travaux". Ils ont également ont relevé un certain "amateurisme" dans la gestion des dossiers des logements sociaux à Bouira, lesquelles sont livrés sans gaz, ni l'électricité, ni eau courante.