La procureure de la Cour pénale internationale a prévenu qu'elle "n'hésitera pas" à élargir ses enquêtes à de nouveaux cas de crimes après la récente découverte de charniers en Libye. L'ONU a fini par mettre sur pied une mission d'enquête pour la Libye chargée de mener des investigations sur des exactions extrajudiciaires, des cas de torture et des crimes de guerre, commis dans ce pays en proie à une guerre civile ravageuse. Fruit d'une résolution adoptée sans vote, lundi, cette mission a reçu un mandat d'un an renouvelable, pour mener des enquêtes sur le terrain libyen. Elle sera chargée, précise un communiqué de l'ONU, de "documenter les allégations de violations du droit international des droits de l'Homme et du droit international humanitaire et les atteintes à ces droits, commises par toutes les parties en Libye depuis le début de 2016". La décision de l'ONU, saluée hier par plusieurs ONG de défense des droits de l'Homme, intervient après plusieurs demandes du Gouvernement d'union nationale (GNA), reconnu par la communauté internationale, d'enquêter sur des charniers découverts, début juin, dans la ville de Tarhounah, après sa reprise des mains du général Khalifa Haftar par les forces loyales au gouvernement de Tripoli. Dans une lettre adressée, le 15 juin, au chef de l'ONU, le ministre des Affaires étrangères, Mohamed Seyyale, a réclamé une enquête onusienne pour traduire devant la CPI les responsables de ces "crimes abominables, commis par les milices de Khalifa Haftar". "Le Conseil de sécurité de l'ONU doit faire preuve cette fois de détermination concernant les violations perpétrées par les milices de Haftar à Tarhouna, qui constituent des crimes contre l'humanité", avait écrit alors le ministre libyen, précisant qu'au moins "11 charniers ont été découverts" dans cette ville située à 80 km de la capitale, Tripoli. Ces charniers où des femmes et des enfants ont été parfois enterrés vivants, selon le GNA, ont suscité l'indignation des ONG de défense des droits de l'Homme et de la mission de l'ONU en Libye (Manul). Cette dernière a relevé "avec horreur les informations sur au moins huit charniers découverts ces derniers jours, dont la plupart à Tarhouna", rappelant que "le droit international exige que les autorités mènent des enquêtes rapides, efficaces et transparentes sur tous les cas présumés de décès illégaux". Lundi, l'ambassadeur libyen auprès de l'ONU, Tamim Baiou, a espéré, à l'issue de la résolution de l'ONU, que ce serait "un tournant" positif pour l'avenir de son pays. Heba Morayef, de l'ONG Amnesty International, a souligné dans un communiqué que cette mission d'enquête "constitue une étape importante et attendue depuis longtemps pour mettre fin à l'impunité généralisée" en Libye. "Ce qui est important maintenant, c'est que les pays membres du Conseil des droits de l'Homme veillent à ce que ce nouvel organe reçoive le soutien nécessaire et que son mandat soit renouvelé" dans un an, a estimé, pour sa part, Eric Goldstein de l'ONG Human Rights Watch. La résolution demande aux experts de présenter un compte rendu oral de leurs travaux à la 45e session du Conseil, qui devrait se tenir en septembre, suivi d'un rapport écrit complet à la 46e session, en mars prochain. Elle demande aussi aux autorités libyennes de permettre à la mission d'enquête et à ses membres "d'accéder librement et sans délai à l'ensemble du territoire libyen". De son côté, la procureure de la Cour pénale internationale (CPI) a prévenu lundi qu'elle "n'hésitera pas" à élargir ses enquêtes à de nouveaux cas de crimes après la récente découverte de ces charniers.