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Entre mythe et réalité
L'INDUSTRIE MINIÈRE EN ALGERIE
Publié dans Liberté le 01 - 07 - 2020


Par : ISSAAD MOULOUD
ENSEIGNANT CHERCHEUR
DEPARTEMENT DE GEOLOGIE - USTHB
AXE DE RECHERCHE : GEOLOGIE MINIÈRE
ET ENVIRONNEMENT
Dans une dépêche datée du 31 mai 2020, l'APS annonce que "le président Tebboune a instruit le ministre de l'Industrie d'élaborer un projet de loi-cadre pour l'orientation industrielle, insistant sur le recensement des richesses minières nationales en collaboration avec des compétences nationales et étrangères"(1). Vu l'intérêt que peuvent susciter les richesses minières du pays auprès du grand public, il serait utile d'expliquer aux lecteurs certains aspects méconnus de l'industrie minière algérienne. Il s'agit aussi de rappeler le contexte historique qui a vu l'émergence de cette industrie pour comprendre la situation actuelle et élaborer la stratégie minière de demain.
La nécessité d'un recadrage du débat
S'il y a un secteur industriel en Algérie qui fait l'objet des plus grandes attentions auprès du public, c'est bien celui de l'industrie minière et des ressources minérales de l'Algérie. Faire l'inventaire détaillé des ressources minières du plus grand pays d'Afrique peut s'avérer assez ennuyeux pour le lecteur. Il serait plus utile de catégoriser les informations que reçoivent les Algériens à propos de cette question pour distinguer le discours médiatique de la vérité scientifique. En effet, nombreuses sont les interventions d'économistes et d'experts dans lesquelles ils déroulent une longue liste de substances minérales valorisables dont regorgerait le sous-sol algérien.
À titre d'exemple, dans l'édition du 22 juillet 2018 du journal Liberté, un expert déclare : "On peut, avec une probabilité élevée, annoncer que le sol algérien contient la plupart des minéraux, dont ceux des industries du futur." Plus loin, il affirme que "l'Algérie dispose d'un potentiel équivalent au potentiel mondial actuel". Il s'agit là d'un exemple typique d'une demi-vérité, produit d'un raisonnement simpliste se voulant être rassurant face au déclin des réserves en hydrocarbures.
Prétendre qu'une substance minérale constitue un gisement exploitable et rentable nécessite des études de faisabilité extrêmement poussées et constamment actualisées. Il faut ajouter à cela les contraintes et la volatilité des cours du marché mondial des métaux. Concrètement, très peu de gisements algériens furent étudiés avec un tel degré de précision. Malgré cela, les exemples de surenchère stérile pullulent dans les médias et les réseaux sociaux, ignorant les bases de la géologie minière.
Ainsi, alors que les métaux de base (cuivre, plomb, zinc...) constituent des gisements très prometteurs en Algérie, ils ne reviennent que très rarement dans le champ médiatique. Ajoutons à cela le phosphate, pilier de l'agriculture moderne, dont le pic de production mondiale se profile, faisant craindre une crise alimentaire mondiale dans une centaine d'années. En revanche, l'or, le diamant et les terres rares ont fait la une des journaux et des plateaux télé durant des semaines. Côté contenu scientifique, la situation est pire. Les notions d'indice minéralisé, de gisement ou de réserves se confondent sans qu'une information utile parvienne au lecteur.
La présente contribution n'ayant pas pour objet de recenser les dizaines de contrevérités scientifiques sur les ressources minérales, espère contribuer au débat en imposant la seule méthodologie digne de confiance, celle du scientifique. Ainsi, les potentialités du pays en ressources minérales sont incontestables ; la littérature scientifique présente dans les universités, à la bibliothèque du service géologique de l'Algérie, ainsi que les travaux de l'entreprise publique ORGM le démontrent aisément.
Exemple : le gisement de plomb-zinc de Tala Hamza, non loin de la ville d'Oued Amizour (Béjaïa). Les travaux réalisés par l'ex-Sonarem et l'ORGM, puis par la compagnie minière australienne West Mediterranean Zinc (WMZ), ont permis de mieux cerner les contours du gisement et de proposer des schémas d'exploitation pouvant assurer une rentabilité économique(2,3).
Pour résumer, les richesses minières de l'Algérie constituent un large spectre de substances, dont la rentabilité est conditionnée par un certain nombre de paramètres technico-économiques très complexes. À titre d'exemple, la réussite du projet de la mine de Gara Djebilet demeure conditionnée par un mode de traitement à même d'éliminer le phosphore présent dans le minerai(4,5).
Le gisement d'Oued Amizour, bien qu'étudié sous tous les angles et prêt à être exploité, est un cas typique d'un projet minier situé dans une région densément habitée, la Soummam, avec toutes les problématiques environnementales que cela implique(6). Bon nombre de professionnels du secteur minier et d'universitaires travaillent sur ces problématiques, et des solutions sont en cours d'élaboration. Cependant, pour le bien du pays et celui de l'économie nationale, il est indispensable de tempérer les ardeurs de certains experts pour laisser le champ libre aux gens du métier, géologues et exploitants miniers, afin de transmettre la réalité du terrain au peuple et aux dirigeants du pays en charge de l'industrie algérienne.

La longue marche...
Depuis l'époque de l'antique Numidie, les richesses minières de l'Algérie étaient convoitées et réputées à travers l'ensemble du bassin méditerranéen. Bel exemple d'exploitation minière antique, la carrière de marbre de Filfila (Skikda). Cependant, malgré l'activité intense qu'a connue la région avec l'exploitation des pierres décoratives, la conquête minérale dans la région ne date réellement que des VIIIe-IXe siècles (7). Ainsi, à l'époque musulmane, divers auteurs signalèrent des exploitations minières dans la région d'El-Ouenza, non loin de l'actuelle Annaba et dans le massif de l'Edough ainsi que dans l'ouest du pays.
L'activité minière pendant la période coloniale est assez bien décrite dans la littérature de l'époque. Ainsi, Dussert et Bétier (1931)(8) font un inventaire assez complet de l'industrie extractive en Algérie, pour la période allant de 1830 à 1930. Dans l'ex-département de Constantine, les minerais de fer et de phosphate étaient abondants. Mais malgré les dizaines de sites d'extraction minière en activité, il n'est pas possible de parler pendant cette période d'industrie minière, ni même de politique industrielle.
En effet, "à l'aube de l'indépendance, note H. Benissad (9), la composition de la production est encore dominée par l'agriculture et les services qui représentent 73% de la production globale". Cette faiblesse de l'ensemble du tissu industriel en Algérie est le résultat de la perception de l'ordre colonial qui ne concevait sa politique économique envers l'Algérie que du point de vue des intérêts immédiats de la métropole et des colons.
À l'indépendance de l'Algérie, la décision de réouverture des exploitations minières fermées au cours de la guerre d'indépendance du pays fut prise très rapidement pour des raisons sociales et malgré de faibles moyens d'action. En septembre 1964 fut créé le Barem (Bureau algérien de recherche et d'exploitation minière) pour prendre en charge l'activité minière dans l'Algérie indépendante.
Après deux années d'activité, le gouvernement de l'époque a décrété la nationalisation de l'ensemble des mines du pays le 6 mai 1966. Par la suite, la stratégie adoptée pour la gestion du secteur minier, s'insérait dans une vision globale de déploiement de l'industrie algérienne. La priorité des autorités était de rompre définitivement avec la spécialisation de type colonial basée sur l'exportation de matières premières brutes.
À plus ou moins long terme, on vise à mettre fin à toute exportation de matière brute grâce à l'installation d'industries de transformation capables d'absorber la totalité de la production minière(10). Afin de sortir l'Algérie du sous-développement économique et social, les autorités de l'époque ont adopté le modèle d'industries industrialisantes à la fin des années 1960 (11). Le pays a opté alors pour les industries de base en s'appuyant notamment sur la sidérurgie.
En 1967, fut créée la Sonarem (Société nationale de recherche et d'exploitation minière) qui regroupe l'ensemble des activités minières du pays. Ainsi, le complexe sidérurgique d'El-Hadjar (alimenté notamment par les mines de fer de l'est du pays) est devenu le symbole de l'épopée industrielle algérienne. Parmi les grandes réalisations de cette époque, citons l'extension de la production au niveau des mines de fer d'Ouenza et de Boukhadra, le lancement du complexe mercuriel de Azzaba en 1971 et l'entrée en production de la mine de Kherzet-Youcef en 1978.
En parallèle des activités d'exploitation minière, l'un des principaux objectifs fixés à la Sonarem était l'inventaire des réserves minières disponibles à travers un vaste programme de coopération avec des compagnies bulgares et russes (12). De l'avis de nombreux ingénieurs de l'époque (13-14), cette période fut la plus faste de l'industrie minière algérienne. Les ingénieurs en charge des programmes d'exploration sillonnaient les vastes contrées du Sahara algérien accumulant ainsi des données précieuses pour l'évaluation des richesses du pays.
Pour des raisons liées au contexte politique de l'époque, la restructuration de la Sonarem fut décidée en 1982 pour aboutir à la création de six grandes entreprises minières : Ferphos, Enof, Edemine, Erem (actuelle ORGM), Enof, Enamarbre et l'Enasel. Les entreprises créées à la faveur de cette restructuration ont connu des fortunes diverses. Ainsi, l'Edemine n'existe plus et la plupart des autres entreprises demeurent dans une situation financière inconfortable.
Seule Ferphos a pu tirer son épingle du jeu. Actuellement, l'industrie minière algérienne est dominée par le groupe public Manal SPA (Manadjim Al-Djazaïr) qui regroupe l'ensemble des entreprises publiques du secteur. Toutes ces réformes et restructurations étaient accompagnées d'un changement de législation, la dernière en date a été promulguée en 2014 afin de relancer le secteur minier algérien.
Tirer le bilan de plusieurs décennies d'activité industrielle allant de l'exploration au traitement du minerai est très complexe et requiert beaucoup de temps et énormément de données. Cependant, certains points méritent d'être mentionnés. Les connaissances acquises grâce à la recherche minière réalisée depuis l'époque de la Sonarem sont inestimables et peuvent servir de rampe de lancement à tout projet minier en Algérie.
Néanmoins, elles nécessitent une mise à jour à l'aide des technologies récentes et des avancées techniques qu'a connues l'industrie minière mondiale. La contribution des mineurs algériens à l'effort économique national est incontestable. Malheureusement, au jour d'aujourd'hui l'industrie minière est en récession malgré le potentiel des réserves mises en évidence et les mesures incitatives que les différentes lois minières ont prévues.
Du rôle de l'industrie minière dans l'Algérie de demain
La situation actuelle de l'industrie minière algérienne est le fruit de son histoire et des choix politiques et sociaux économiques du pays. Ainsi, dans l'imaginaire collectif algérien, les richesses naturelles renvoient à deux images récurrentes, ayant une certaine vérité historique. La première renvoie à la prédation du système colonial qui a longtemps profité des ressources du pays sans que les Algériens en voient la couleur.
Ce douloureux passif exacerbe les peurs, certes légitimes, face à des investissements et des partenariats étrangers. Cela est problématique dans un monde où l'industrie minière a fortement muté en s'adaptant à la mondialisation. Actuellement, lors des mouvements sociaux, des revendications reviennent à chaque fois à propos de la répartition des richesses du pays jugée parfois injuste, d'où une certaine frilosité des pouvoirs publics concernant la libéralisation du secteur minier.
La seconde image est le fruit des politiques sociales en Algérie, censées être assurées par une rente inépuisable issue de l'exportation des matières premières. Il est vrai que ces ressources ont fortement aidé le pays à sortir du sous-développement lors des premières années de l'indépendance. Hélas, l'Algérie fut, elle aussi, touchée par la fameuse maladie hollandaise (ou encore malédiction des matières premières), où l'exploitation des ressources naturelles entraîne le déclin de l'industrie manufacturière locale.
Il est grand temps d'abandonner la vision rentière de l'économie et de faire tomber le tabou de la rente, car il n'est pas évident que les ressources minières prennent le relais des hydrocarbures au cours des prochaines décennies(15). La vision minière devant primer à l'avenir doit prendre en compte ces deux questions de manière primordiale.
À savoir, l'ouverture de l'industrie minière aux compagnies étrangères et l'abandon de la logique de rente dans la gestion des ressources minérales du pays. À l'avenir, le secteur minier doit être perçu comme un secteur d'activité à part entière, producteur de matières premières, mais surtout premier chaînon d'une véritable filière de transformation.
Les ressources minérales du pays ne doivent plus être pensées comme des richesses prêtes à être vendues au plus offrant, mais plutôt un atout dans le développement d'une industrie de transformation. Les perspectives et l'avenir de l'industrie minière algérienne pour la prochaine décennie peuvent être résumés en trois volets avec des projets de relance et de développement à court, moyen et long termes.
Nous éviterons les questions liées à la gestion des entreprises minières étatiques. Aussi, l'Etat devra trouver l'équilibre entre son rôle de régulateur et celui d'acteur majeur de l'industrie minière. Si le pays désire s'ouvrir aux compagnies minières étrangères, des politiques attractives doivent être rapidement mises en place.
En effet, en vertu de l'article 59 de la loi de finances complémentaire pour 2020 publiée dans le Journal officiel n°3316, l'exploitation du domaine minier national est considérée comme secteur stratégique et donc soumise à la règle du 51/49(17). Cette exigence peut nuire de manière significative à l'attractivité du pays.
Il serait judicieux de la limiter aux gros gisements de fer et de phosphate ainsi qu'aux substances stratégiques telles que l'or et l'uranium. Le débat reste ouvert mais un compromis doit être trouvé afin de capter des investissements étrangers. À court terme, les meilleurs atouts du pays actuellement sont les minerais de phosphate et de fer. Le phosphate, principale source de phosphore dans la nature, présente la singularité d'être un minerai vital pour l'agriculture.
.En effet, le phosphore est essentiel à la vie des plantes et ne peut être en aucun cas substitué par un autre élément. Dans l'agriculture moderne, il est impensable de faire sans les engrais phosphatés, pire les sols appauvris par la surexploitation et l'agriculture intensive nécessitent de plus en plus l'utilisation de produits fertilisants pour contrebalancer leurs carences.
Cependant, le phosphate est une ressource non renouvelable et non recyclable qui, selon la chercheuse australienne Dana Cordell, atteindra le pic de production entre 2030 et 2040, marquant les prémices d'une crise du phosphate dans une centaine d'années(18). Les réserves de l'Algérie en phosphates sont très intéressantes mais sans la concrétisation du mégaprojet du complexe de transformation du phosphate (19), le bénéfice pour le pays est loin d'être optimisé.
En effet, le phosphate algérien est exporté sous sa forme brute, après un simple dépoussiérage, alors qu'il est évident que les produits dérivés tels que les engrais phosphatés (TSP, DAP, etc.) et l'acide phosphorique génèrent des profits bien plus importants pour le pays. Pour le fer, les ressources du pays sont très intéressantes à l'image du gisement de fer oolithique de Gara Djebilet. Gisement de classe mondiale, il revêt pour le pays un intérêt stratégique, surtout si un mode de traitement adapté aux caractéristiques du minerai est trouvé.
En effet, le minerai du gisement de Gara Djebilet renferme une quantité de phosphore jugée pénalisante. Grâce au travail réalisé par la société nationale chargée de développer le projet, Feraal, et de laboratoires étrangers spécialisés, cette contrainte est en passe d'être levée et le projet est sur la bonne voie (20). Dans le gisement d'Ouenza, des travaux ont proposé la substitution du minerai oxydé par un minerai carbonaté, ce qui permettra un renouvellement des réserves (21).
En résumé, pour le minerai de fer, les perspectives sont multiples mais en l'absence d'une industrie de transformation du minerai de fer, il serait irresponsable de parler de valeur ajoutée et d'exportation. À moyen terme, les métaux de base avec à leur tête le plomb et le zinc pourraient aboutir à des projets miniers concrets créateurs de richesses. Les métaux de base ont l'intérêt d'avoir des applications très variées telles que la construction ou l'industrie du transport.
À titre d'exemple, l'industrie automobile consomme 51% de la production mondiale de plomb et 10% de celle du cuivre et du zinc (22). Les gisements de plomb-zinc en Algérie sont très nombreux, parmi les plus prometteurs citons les gisements d'Oued Amizour (Béjaïa), d'El-Aouana (Jijel), Chaabet El-Hamra et Kherzet-Youcef (Sétif) et le gisement d'El-Abed (Tlemcen).
Aux métaux de base, pourraient être associés des éléments dits "sous-produits" ayant une grande valeur économique en raison de leurs applications dans les nouvelles technologies. Ainsi, de l'argent est souvent associé au plomb alors que le zinc peut renfermer des quantités non négligeables de titane, de cadmium, d'indium et de germanium. Dans ce cas, une industrie de transformation des minerais à plomb-zinc devient un objectif stratégique.
En effet, les métaux technologiques cités précédemment ne sont récupérés que par des procédés complexes comme la fusion ou l'électrolyse, et donc exporter un minerai brut équivaut à offrir à titre gracieux des sous-produits très recherchés. La vision minière à long terme aura pour principal objectif le développement des ressources minières dites stratégiques tels l'or, l'uranium ou le diamant, ainsi que toutes les ressources qui se trouvent dans le Sud algérien.
Ces ressources sont l'avenir de l'industrie minière algérienne, qui petit à petit devra migrer vers le sud du pays. Vu leurs potentialités, les gisements du Sud algérien méritent un ambitieux programme de recherche minière, basée sur les précieuses données acquises par l'ex-Sonarem et les travaux des universitaires. L'actuel ORGM pourra alors se muer progressivement en une entité plus grande, chargée d'élaborer et de mettre en œuvre les programmes de recherche minière.
La coopération internationale avec les compagnies juniors d'exploration doit être encouragée et facilitée afin d'actualiser les données déjà acquises. Les trois volets développés ci-dessus ne sont que quelques pistes de réflexion, qui devront être discutées dans un cadre plus large, celui des assises nationales de l'industrie minière. Aspect très important de l'industrie minière à prendre en compte à l'avenir, l'environnement.
Cette industrie est l'une des plus polluantes de par les perturbations qu'elle engendre, les dommages qu'elle occasionne ainsi que les déchets qu'elle génère. Les deux ministères en charge respectivement de l'Environnement et des Mines, ainsi que la police des mines, sont rodés à la surveillance des risques liés aux industries extractives. Cependant, une nouvelle approche est indispensable.
Dans le contexte actuel, les acteurs en charge de la surveillance et de la régulation sont vus comme des obstacles à l'aboutissement des projets, alors que tout investisseur est perçu comme potentiel pollueur. Un travail doit être fait pour améliorer cette relation entre l'administration et les investisseurs pour garantir l'aboutissement des projets et la protection de l'environnement.
À travers cette modeste contribution, nous espérons avoir enrichi le débat sur l'industrie minière algérienne en le recentrant sur les réels atouts du pays. Pour l'intérêt de l'économie nationale nous avons préféré mettre en relief la réalité du terrain, en évitant le sensationnel et le buzz. Le potentiel minéral du pays est très intéressant, mais l'histoire nous a enseigné que c'est l'homme qui crée la richesse et non la nature qui l'offre sur un plateau d'argent.
Nous avons voulu aussi mettre en avant le travail réalisé par les hommes du métier, géologues, géophysiciens, mineurs et techniciens qui ont sillonné les contrées les plus inhospitalières du pays dans l'anonymat complet. Aussi, nous souhaitons par ces quelques lignes rendre hommage aux 19 mineurs disparus dans l'accident minier de Kherzet-Youcef (Sétif) le 2 juin 1990 (23) ainsi qu'à ceux qui, au péril de leurs vies, ont défié Dame Nature dans l'intérêt du pays.


1-http://www.aps.dz/algerie/105627-communique-du-conseil-des-ministres
2-https://www.terramin.com.au/project/tala-hamza-project/?lang=fr
3-https://www.liberte-algerie.com/actualite/le-projet-minier-de-tala-hamza-relance-304479
4-https://www.liberte-algerie.com/actualite/la-mine-de-gara-djebilet-sera-enfin-exploitee-192871
5-https://www.worldcat.org/title/etude-du-phosphore-dans-le-minerai-de-fer-de-gara-djebilet-ouest-algerie-son-comportement-a lenrichissement/oclc/490257868
6-https://www.liberte-algerie.com/actualite/le-gisement-zincifere-na-aucun-risque-sur-lenvironnement-75087/pprint/
17 http://books.openedition.org/editionsehess/278
8-Dussert et Bétier Les mines et les carrières en Algérie, Larose, 1931.
9-H. Benissad, Economie du développement de l'Algérie, Op.cit. p16.
10-Talahite, F. (2016). Désindustrialisation et industrialisation en Algérie. Le rocher de Sisyphe. Outre-Terre, 47(2), 130-151. doi:10.3917/oute1.047.0130.
11-Bernis Gérard. Les industries industrialisantes et les options algériennes. In : Tiers-Monde, tome 12, n°47, 1971. Le tiers monde en l'an 2000. pp. 545-563;
12-Tomas, F., 1970. Les mines et la région de Annaba. Revue de géographie de Lyon 45, 31–59. https://doi.org/10.3406/geoca.1970.2660.
13-https://www.lesoirdalgerie.com/articles/2017/07/10/print-41-216166.php
15-https://www.liberte-algerie.com/contribution/eviter-le-mythe-des-matieres-premieres-comme-facteur-de-developpement-en-algerie-les-exportations-de-fer-et-de-phosphates-et-de-fer-seront-elles-des-substituts-aux-entrees-de-devises-des-hydrocarbures-289054
16-https://www.joradp.dz/FTP/jo-francais/2020/F2020033.pdf
17-http://www.aps.dz/economie/105127-investissement-etranger-definition-des-secteurs-strategiques-et-annulation-du-droit-de-preemption
18-https://dernierelignedroite.fr/
19- http://www.aps.dz/economie/83921-megaprojet-de-phosphate-80-du-financement-assures-par-des-banques-chinoises
20 https://www.radioalgerie.dz/news /fr/article/20191126/185431.html
21-http://www.geolalg.com/bibgeolalg/bouzenoune1998.pdf
22-Michel Jébrak, Quels métaux pour demain? Les enjeux des ressources minérales. Collection : UniverSciences, Dunod Parution : septembre 2015.
23-https://fr.wikipedia.org/wiki/ Accident_minier_de_Kherzet_Youcef


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