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Nos valeureux patriotes reviennent
Contribution
Publié dans Liberté le 04 - 07 - 2020


Par : Professeur

Chems Eddine Chitour
Ecole Polytechnique Alger

Il se peut que les générations futures disent que nous n'avons jamais atteint les objectifs que nous nous étions fixés. Puissent-ils ne jamais dire à juste titre que nous avons échoué par manque de foi ou par la volonté de préserver nos intérêts particuliers."
Dag Hammarskjöld, ancien secrétaire général des Nations unies
C'est un événement exceptionnel et quel beau cadeau à l'Algérie qui retrouve enfin ses enfants après plus de 175 ans d'absence ses valeureux patriotes ! En effet, l'information vient d'être donnée, les restes mortuaires, exposés au Musée de l'homme de Paris seront acheminés par un Hercule C-130 de l'armée de l'air algérienne qui sera escorté à son retour par une formation de trois chasseurs Sukhoï 30. Ce retour donnera lieu à une cérémonie aérienne avec un passage en formation au-dessus de la baie d'Alger pour partager avec la population ce moment historique. Cheikh Bouziane et cheikh Boubaghla, qui menèrent la vie dure à l'armée coloniale, peuvent enfin dormir du sommeil du juste. Pour la première fois en effet, depuis l'indépendance algérienne, la mémoire fragmentée des Algériens est en train de se reconstituer. Les crânes de patriotes algériens vont rejoindre la terre de leurs ancêtres. Ce qu'aucun gouvernement n'a pu réaliser, le gouvernement actuel a pu le réaliser.
L'invasion et ses conséquences : l'utilisation post mortem des morts
L'histoire de l'invasion coloniale est un long récit douloureux qui commença par un parjure, celui du duc de Bourmont. En effet, malgré les promesses du général de Bourmont en juillet 1830, qui a pris sur l'honneur l'engagement suivant : "La liberté de toutes les classes d'habitants, leurs religions, leurs propriétés, leurs commerces et leurs industries ne recevront aucune atteinte." Le premier soin des Français lorsqu'ils eurent pris possession d'Alger fut, nous dit A. Devoulx, "de tailler un peu de place aux vivants, au détriment des morts, et de dégager les abords de la ville de cette multitude de tombes qui les envahissent. Cet accaparement se fit sans discernement. Les terrains des sépultures nous étaient indispensables pour la création des routes, jardins et établissements qu'un peuple civilisé et actif s'empresse de fonder là où il s'implante. Je dois cependant dire que le travail de transformation ne fut pas accompli avec tout le respect auquel les morts avaient droit, et ressemble un peu trop à une profanation". "Pendant plusieurs années, poursuit Albert Devoulx, on put voir dispersés çà et là des amas d'ossements tirés brusquement de leurs tombes et jetés au vent avec une certaine brutalité. Quelques précautions auraient suffi pour éviter cette violation de tombeaux qui a provoqué une profonde sensation parmi les indigènes et a fait naître chez eux l'idée que les cendres des morts ne nous sont pas sacrées... Au point de vue historique, une partie des annales d'Alger était là gravée sur le marbre ou sur l'ardoise, et ces pages ont été livrées à la destruction et à la dilapidation. Il y avait en effet une abondante moisson de documents épigraphiques à faire au profit de la chronologie des pachas et des principaux fonctionnaires de la Régence. (...) Une quantité considérable de monuments précieux des époques romaine, arabe et turque, qu'il eut facile de sauver ont disparu à tout jamais, mutilés ou détruits par la main des hommes, après avoir résisté aux injures du temps".
L'histoire doit regretter l'anéantissement complet d'un cimetière réservé aux pachas et que cite l'historien Diego de Haedo qui écrivit son ouvrage sur la ville d'Alger vers la fin du XVIe siècle. (1) Les morts sont-ils pour autant laissés tranquilles ? Il semble que non ! "À la même époque, écrit Amar Belkhodja, en 1833 où l'histoire enregistrait les forfaits perpétrés contre l'espèce humaine, les morts n'ont pas droit, eux aussi, au salut. Avant leur affectation aux fins industrielles, les cimetières musulmans serviront d'abord à d'autres fonctions. (...) Ces sépulcres béants étaient comme autant de bouches accusatrices d'où les plaintes des morts semblaient sortir pour venir se joindre à celles des vivants, dont nous démolissions en même temps les demeures, ce qui fait dire à un Algérien avec autant d'éloquence que d'énergie que les Français ne laissaient à ses compatriotes ni un lieu pour vivre ni un lieu pour mourir." (Annales algériennes - T1 - pp. 227-228). Les ossements humains, exhumés par la charrue coloniale ou par le matériel des ponts et chaussées, vont également servir pour un commerce sordide. Ils sont expédiés à Marseille où ils sont utilisés dans la fabrication du sucre. L'historien Moulay Belhamissi fait état des navires chargés d'ossements provenant des cimetières musulmans en partance pour Marseille : "Pour du noir animal (1) nécessaire à la fabrication du sucre, les ossements récupérés des cimetières musulmans sont expédiés à Marseille. À l'époque, on réfuta les faits malgré les témoignages. Mais l'arrivée dans le port phocéen, en mars 1833, d'un navire français La Bonne Joséphine" dissipa les derniers doutes.
Des os et des crânes humains y furent déchargés. Le docteur Ségaud précisait, dans le journal Le Sémaphore, que "parmi les ossements certains venaient d'être déterrés récemment et n'étaient pas entièrement privés de parties charnues. L'utilisation industrielle des ossements d'Algériens est effective". Moulay Belhamissi — Etude intitulée Une tragédie aux portes d'Alger - Le massacre des Aoufias) : "Le pays conquis se trouvait ouvert à tous les trafics, y compris celui de la profanation et le pillage des cimetières en y prélevant les vestiges humains aux fins de recyclage dans l'industrie du sucre en activité à Marseille. (...) Ces pratiques, dévastation des cimetières pour les aménagements urbains et leur annexion pour grossir les domaines agricoles, puis suivies de cargaisons d'ossements à destination d'une industrie marseillaise dans la fabrication du sucre, sont une identification d'une société en quête exclusive du profit, libérées entièrement des contraintes et des prescriptions tant morales que religieuses"(2).
Voilà ce qu'a fait un peuple dit civilisé quelque quarante ans après la déclaration des droits de l'homme. Cependant, pour la première fois, les Algériens découvrent un candidat qui ne fait pas dans la langue de bois. La plaie algérienne est toujours aussi béante, et les présidents qui se sont succédé, par manque de vision du futur, n'ont jamais franchi le pas. Le 14 février 2017, le candidat Macron, dans une interview accordée à la chaîne Echourouk News à Alger, déclarait : "La colonisation fait partie de l'histoire française et c'est un crime contre l'humanité. J'ai toujours condamné la colonisation comme un acte de barbarie. La barbarie fait partie d'un passé que nous devons regarder en face en présentant nos excuses à l'égard de celles et ceux envers lesquels nous avons commis ces gestes."(3)
L'histoire de la tragédie de cheikh Bouziane des Zâatchas
Un bref rappel à titre d'exemple nous permet d'apprécier à sa juste bestialité la façon française de faire la guerre à des patriotes courageux mais sans les moyens de défense appropriés. Nous rapportons le massacre des Zâatchas et la mort de Bouziane décrits aussi dans l'ouvrage de Mohamed Balhi paru aux éditions Anep. : "L'état-major prend la mesure de la résistance et envoie une colonne de renfort de plus de 5 000 hommes, commandée par le général Emile Herbillon, commandant de la province de Constantine, suivie d'une autre, des zouaves dirigés par le colonel François Canrobert." Il nous a paru important de le relayer en rappelant la raison de la présence dans un musée parisien de ces restes mortuaires, à partir de l'histoire de l'un d'entre eux : le crâne du cheikh Bouziane, chef de la révolte des Zâatchas en 1849, écrasée par une terrible répression, emblématique de la violence coloniale. "En 1847, après la reddition d'Abd-el-Kader, les militaires français croient que c'en est fini des combats en Algérie après plus de dix ans d'une guerre de conquête d'une sauvagerie inouïe. Mais, alors que le danger était surtout à l'Ouest, il réapparaît à l'Est début 1849, dans le Sud-Constantinois, près de Biskra, où le cheikh Bouziane reprend le flambeau de la résistance.
Après des affrontements, il se retranche dans l'"oasis" de Zaâtcha, une véritable cité fortifiée où, outre des combattants retranchés, vivent des centaines d'habitants, toutes générations confondues."(8) Le 17 juillet 1849, les troupes françaises envoyées en hâte entament un siège qui durera quatre mois. Le 26 novembre, les assiégeants, exaspérés par la longueur du siège, voyant beaucoup de leurs camarades mourir (des combats et du choléra), informés du sort que les quelques Français prisonniers avaient subi (tortures, décapitations, émasculations...), s'élancent à l'assaut de la ville. Deux ans plus tard, Charles Bourseul, un "ancien officier de l'armée d'Afrique" ayant participé à l'assaut, publiera son témoignage : "Les maisons, les terrasses sont partout envahies. Des feux de peloton couchent sur le sol tous les groupes d'Arabes que l'on rencontre. Pas un seul des défenseurs de Zâatcha ne cherche son salut dans la fuite, pas un seul n'implore la pitié du vainqueur, tous succombent les armes à la main, en vendant chèrement leur vie, et leurs bras ne cessent de combattre que lorsque la mort les a rendus immobiles." Il s'agissait là des combattants.
La destruction de la ville fut totale, méthodique. Les maisons encore debout furent minées, toute la végétation arrachée. Les "indigènes" qui n'étaient pas ensevelis furent passés au fil de la baïonnette. Dans son livre La Guerre et le gouvernement de l'Algérie, le journaliste Louis de Baudicour racontera en 1853 avoir vu les zouaves "se précipiter avec fureur sur les malheureuses créatures qui n'avaient pu fuir", puis s'acharner : "Ici un soldat amputait, en plaisantant, le sein d'une pauvre femme qui demandait comme une grâce d'être achevée, et expirait quelques instants après dans les souffrances ; là, un autre soldat prenait par les jambes un petit enfant et lui brisait la cervelle contre une muraille. D'après les estimations les plus basses, il y eut ce jour-là huit cents Algériens massacrés. Tous les habitants tués ? Il y eut trois autres «épargnés»... provisoirement. Les Français voulurent capturer vivant – dans le but de faire un exemple – le chef de la résistance, le cheikh Bouziane. Au terme des combats, il fut fait prisonnier. Son fils, âgé de quinze ans, l'accompagna, ainsi que Si Moussa, présenté comme un marabout. Que faire d'eux ? Ces «sauvages» n'eurent pas droit aux honneurs dus aux combattants." (8) "Le général Herbillon ordonna qu'ils soient fusillés sur place, puis décapités. Leurs têtes, au bout de piques, furent emmenées jusqu'à Biskra et exposées sur la place du marché. Que devinrent les têtes détachées des corps des combattants algériens ? Qui a eu l'idée de les conserver, pratique alors courante ? Où le furent-elles et dans quelles conditions ? Quand a eu lieu leur sordide transfert en métropole ? Cela reste à établir, même si certaines sources indiquent la date de 1874, d'autres la décennie 1880. Il semble que certaines d'elles aient été d'abord exposées à la Société d'anthropologie de Paris, puis transférées au Musée de l'Homme. Elles y sont encore aujourd'hui" (4).
Conclusion
S'il est inscrit dans le génome des nostalgériques que la colonisation avait fait œuvre positive, nous voulons pour notre part et a contrario parler de l'œuvre positive de l'Algérie pour la France. Le compagnonnage douloureux avec la France a fait que les Algériens, à leur corps défendant, ont été de toutes les guerres depuis celle du Levant, à celle du Mexique, de Sedan, du chemin des Dames, des Ardennes, de la Provence, des francs-tireurs partisans. Dans le même ordre, il nous faut aussi évoquer rapidement les "tirailleurs bétons" qui à l'instar des RTA (régiments de tirailleurs algériens) qui ont participé à la libération de la France, ces derniers ont participé à la reconstruction de la France. De plus, sans être dans la francophonie qui, pour les Algériens a des relents de paternalisme, nous faisons plus pour le rayonnement de la langue française que plusieurs pays réunis, sans rien demander en échange. Nous enseignons dans une langue à 11 millions d'Algériens chaque année. Nous n'avons pas de remerciements à faire. La douleur est passée dans nos gènes. Elle est encore vivace, et tant que la mémoire de l'Algérie est quelque part dans les musées de France et de Navarre, nous ne pourrons pas parler d'apaisement. Nous n'avons qu'une chose à faire, c'est de se tourner résolument vers l'avenir en misant plus que jamais sur la connaissance, seule défense immunitaire qui fera que plus jamais l'Algérie ne subira ce qu'elle a subi. Bonne fête de l'indépendance, de la jeunesse et bienvenue à nos valeureux patriotes.


1.Albert Devoulx. Revue Africaine.Vol. 19, p. 309.1875
2.Amar Belkhodja http://www.dknews-dz.com/article/2991-quand-les-ossements-humains-provenant-des-cimetieres-musulmans-servaient-a-lindustrie-1833.html 02-02-2014
3.https://parstoday.com/fr/news/africa-i51587 macron_%C3%A0_alger_une_restitution_ de_la_m% C3%A9moire_%C3%A0_dose_hom%C3%A9opathique
4.https://www.lemonde.fr/idees/article/2016/07/09/les-cranes-de-resistants-algeriens-n-ont-rien-a-faire-au-musee-de-l-homme_4966904_3232.html


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