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Leur reportage et nos anémies citoyennes
Document de la Chaîne M6 consacré à l'Algérie
Publié dans Liberté le 30 - 09 - 2020


Par : MYASSA MESSAOUDI
ECRIVAINE

La chaîne de télévision privée française M6 a diffusé le soir du 13 septembre un reportage intitulé L'Algérie, pays de toutes les révoltes. Ledit documentaire, comme tous ceux produits par l'émission "Enquêtes exclusives", s'inscrit dans la pure tradition sensationnaliste d'un journalisme réputé friand d'audience et de recette publicitaire.
Des entreprises spécialisées, à l'instar de Médiamétrie, servent à mesurer les taux d'audience afin de définir les budgets des spots. Aussi, les thèmes abordés le sont sous le prisme de la rentabilité. Un défaut d'audience pouvant entraîner la suppression d'une émission, tous les moyens et surtout les plus attachés à la dramatisation et au sensationnalisme le plus gras sont privilégiés.
Telle est la loi qui régit la jungle de l'audiovisuel mondialiste soumis aux diktats de l'offre et de la demande. Les stéréotypes et la peur, réputés d'excellents vendeurs, n'ont pas fini de biaiser le regard du téléspectateur piégé par des approximations aux allures savantes. En somme, quand on souhaite prendre le pouls du monde ou s'informer sur son immensité, M. De La Villardière est la dernière personne capable de vous en restituer les complètes nuances et vérités.
Cette précision concernant l'audiovisuel marchand dénué de toute visée pédagogique étant posée, il importe de s'attarder sur les réactions desdits concernés par ce regard, à savoir nous autres Algériens. L'annonce du passage de l'émission attendu avec un mélange aigre-doux d'impatience et d'appréhension, et ce, des deux côtés de la rive, a en soi de quoi nous interroger sur cette morbide passion franco-algérienne pour les remakes historiques colons-colonisés.
Bref, l'ardente attente fut soldée par un tonnerre d'indignation et, étonnamment, au sein même d'une certaine élite dite intellectuelle. La réaction a même pris des allures officielles s'apparentant à l'incident diplomatique. Il n'y a certes pas eu de rappel d'ambassadeurs comme la fois précédente, mais la chaîne a écopé d'une interdiction totale d'exercer en Algérie.
Ainsi, le gouvernement algérien a pu se draper dans le rôle du père réparateur des injustices et de redresseur des dignités, encore une fois bafouées par l'ancien colonisateur. Au diable les libertés d'investigation et d'expression si elles dérogent à nos attentes et règlements. Cette communion populiste n'augure rien de prometteur pour la liberté d'expression et la libération des détenus d'opinion.
Enfin, lorsqu'on pense au nombre vertigineux de ce type de reportage sur les chaînes des pays les plus développés sans que cela induise la moindre réaction ou incidence diplomatique, on saisit immédiatement la dimension de notre inconsistance démocratique. Nos réactions épidermiques au moindre regard extérieur surgissent pour attester de nos immaturités libertaires. Toute une culture de faux semblants qu'on aimerait voir le monde adopter, manu militari, à notre égard. Revenons au reportage de M6.
Ce dernier s'est déployé sur trois volets ; le bâtiment, le chômage endémique et la condition des femmes. Concernant le bâtiment, la promotion immobilière a été mise sur la sellette. Quel Algérien n'a pas souffert de ces troncs de béton plantés comme des termitières au milieu de nulle part ? Des logements truffés de malfaçons et de défauts qui empoisonnent la vie des nouveaux acquéreurs.
Ces constructions résultant d'acquisition de marchés frauduleuse et de corruption sont un hymne debout à la corruption et au détournement institutionnel de l'argent public. Ce qui devrait nous révolter, c'est l'impunité dont jouissent les promoteurs et les constructeurs. Notre inaction et notre résignation sont à blâmer plus que le fait d'être exposé au grand jour par des médias étrangers.
C'est directement dans les réserves du citoyen qu'on fait ripaille. Quelles lois et quelle protection juridique ont votées nos valeureux élus pour pallier à cette gabegie prédatrice ? Au cours des procès visant les hommes d'affaires ayant profité outrageusement des deniers publics sous Bouteflika, des sommes à peine imaginables ont été évoquées concernant des projets bâclés ou qui ne sont jamais sortis de terre.
C'est cela qui mérite notre indignation et notre colère ! Le cas du chômeur diplômé quémandant un rendez-vous de travail bien qu'il ait réussi son test d'embauche, n'est que l'expression banale du clientélisme qui gangrène le pays. Pourquoi aucun responsable n'a ordonné depuis une enquête pour tirer au clair les tracas de ce citoyen ? Non, on a préféré ricaner ou remettre en question son diplôme.
Pourtant, nous avons tous un frère, un cousin ou un ami qui souffre de cette injustice à l'embauche. C'est une commission d'Etat qu'on devrait réclamer dans chaque entreprise nationale afin de veiller à ce que la personne la plus qualifiée bénéficie des postes à pourvoir et non des médiocres pistonnés. Finissons par le volet consacré aux femmes.
C'est le plus parlant de notre parfaite ignorance de nos droits et des lois qui nous visent. Le terme mineure à fait bondir les effarouchés de tout genre. Ainsi, le code de la famille qui assigne juridiquement les femmes à l'état de seconde citoyenneté serait une banale vue de l'esprit, une accusation fallacieuse.
Il faut avoir baigné dans un parfait monde parallèle d'illusions et de fantasmes pour ne pas se rendre compte que les femmes algériennes sont visées par une batterie de lois inspirées de la chariâa, ou plus précisément du fiqh. Ces lois la sanctionnent dans sa citoyenneté, dans son humanité et aussi dans sa maternité. Les femmes algériennes n'atteignent jamais la majorité qui leur confère le droit de contracter un mariage sans un tuteur.
Même à plus de cinquante ans ! En cas de divorce, elles ne peuvent refaire leur vie sans perdre la garde de leurs enfants. Elles sont privées systématiquement de leur domicile en cas de divorce, avec ou sans enfants. Qu'elles y aient contribué financièrement ne génère aucun partage des biens acquis dans la communauté du mariage. Leurs droits successoraux sont grignotés voire supprimés par le droit coutumier dans certaines régions.
Même si des lois ont été votées pour les protéger des violences conjugales, familiales ou de rue, elles sont assorties d'une clause du pardon qui rend obsolète toute réparation par la justice. Les effets psychologiques de ces atteintes aux droits des femmes et à leur dignité se traduisent par cette intériorisation des femmes elles-mêmes de leur supposée infériorité. Le déni, dont peuvent faire preuve certaines, trahit un refus de réalité voire une honte engendrée par ce déclassement humain et social.
Il n'est pas rare que dans un élan d'infirmation et de révolte mal placée, certain-e-s se refugient dans la dénégation. En outre, le reportage d'"Enquêtes exclusives" a présenté une vision binaire des femmes algériennes, à savoir la vertueuse hidjabisée, coqueluche des réseaux sociaux et femme d'affaires, mais soumise à l'ordre social et au patriarcat.
La seconde, une femme cherchant sa liberté uniquement dans les virées nocturnes et les boîtes de nuit.
Cette vision manichéenne qui fait abstraction des femmes qui travaillent, militent, étudient et luttent pour davantage de droits et de visibilité a été complètement ignorée. Nonobstant le caractère estropié de cette vision, il n'en reste pas moins qu'elle est impossible à dénier complètement. Elle est même la plus prégnante. Les femmes algériennes n'ont pas encore trouvé leur place dans la société de manière juste et équilibrée. Les chiffres sont même éloquents à cet égard, elles ne représentent que 18% de la population qui travaille.
Loin derrière la Tunisie et le Maroc. Somme toute, on peut considérer le voile comme le nouveau visage d'un patriarcat revisité. Il est le nouveau contrat de genre qui permet une certaine liberté aux femmes, mais une liberté sous conditions. Une liberté provisoire, soumise à des règles et des entendements sociaux et religieux. La tolérance vis-à-vis de sa visibilité relève surtout de la promotion de ce modèle validé par la gent masculine dominante.
En conclusion, ces regards posés sur nous qu'ils viennent de l'Est ou de l'Ouest ne devraient pas nous inquiéter, ni nous fâcher. Ils sont une bataille sans intérêt contre des moulins à vent. Néanmoins, ils peuvent nous aider à davantage de remise en question et d'interrogations sur notre avenir en commun. Il ne faut ni les prendre au pied de la lettre, ni les ignorer complètement. C'est un bruit parmi d'autres du monde, et ma foi, on a besoin de nous entraîner à l'altérité !


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