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La dinde de tous les dangers
Elle est commercialisée dans des conditions d'hygiène déplorables
Publié dans Liberté le 24 - 10 - 2005

Malgré la menace, en cette période de grippe aviaire, des clients viennent de partout, attirés par des prix accessibles. Cette activité semble échapper au contrôle des services concernés.
Situé à quelques kilomètres de la ville de Douaouda, commune dont elle relève, Magtâa Kheira, lieu-dit à une quarantaine de kilomètres à l'ouest d'Alger, sort comme par enchantement du néant sur la route menant à Blida. Les odeurs nauséabondes que vous sentirez à l'approche du lieu annoncent immanquablement que nous approchons ici de la “bourse de la dinde”.
Des étals de fortune gérés par de jeunes commerçants, qui ne disposent d'aucun titre, proposent aux clients de la chair de dinde à des prix défiant toute concurrence. Les acheteurs alléchés par les prix attractifs affluent de toutes les wilayas limitrophes. “C'est la première fois que je viens. Des amis m'ont parlé de cet endroit. Je constate que les prix sont à la portée de tout le monde”, affirme un client rencontré sur les lieux. Les commerçants proposent, en effet, l'escalope non désossée à 220 DA le kilogramme et 340 DA le kilogramme de la même pièce, mais désossée cette fois. La cuisse coûte 180 DA le kilo.
Enfin, une dinde complète est cédée, selon son poids, à 150 DA le kilogramme. Les étals ne sont pas bien achalandés, et cela est dû aux rares descentes de gendarmes qui viennent traquer les animateurs de ce commerce illicite et surtout dangereux en cette période de risque de grippe aviaire. Si les prix sont si attractifs, c'est que l'abattage des dindes se fait sur place et sans aucun contrôle. Assis sur un tapis de plumes qui couvrent un monticule surplombant les étals, des jeunes hommes, sales et ruisselants de sueur, s'acharnent à déplumer des dindes fraîchement égorgées.
Métier : déplumeur
Ces jeunes forçats se plaignent de leurs conditions de travail, mais ils affirment par ailleurs : “Que voulez-vous que l'on fasse ? Nous sommes au chômage et c'est le seul travail que nous avons trouvé.” Sans relever la tête, ils continuent sans relâche à déplumer les dindes. Ils se plaignent de la saleté et des odeurs : “L'APC ne fait rien pour transporter ces déchets vers la décharge publique.” Les “déplumeurs manuels”, dont certains ont des blessures apparentes, craignent pourtant la fin du Ramadhan : “Quelqu'un a promis de ramener une machine spéciale. Nous perdrons ainsi notre gagne-pain.” Ces derniers qui défendent leur métier ne gagnent pourtant que 150 DA par jour lorsque le patron a réalisé de gros bénéfices, sinon ils n'ont droit qu'à 100 DA la majorité du temps. Malgré ces salaires de misère, de jeunes adolescents acceptent cette corvée. Du matin au soir, ils sont assis sur un monticule de plumes. “Nous commençons le travail à 7 heures du matin et nous ne rentrons chez nous que vers 17 heures. Pendant le reste de l'année, les horaires de travail sont plus longs. Nous débutons la journée à 6h30 et nous ne rentrons chez nous que vers 20 heures. D'ailleurs, tous sont là par nécessité absolue, car tous issus des milieux les plus défavorisés de la région. Pensez-vous que si mon père pouvait travailler, je serais là sur ce tas de saleté ? Certes, je n'ai pas pu terminer mes études, mais au lieu de cette occupation indigne, j'aurais aimé suivre une formation professionnelle et acquérir un métier”, affirme un jeune homme toujours affairé à déplumer la dinde qu'il a entre les mains.
Grippe aviaire ?!
De toutes les manières, s'ils avaient poussé leurs études plus loin, ils auraient compris les risques qu'ils encourent en cette période précise. Justement, interrogés sur les dangers de la grippe aviaire, ils paraissent même étonnés, car selon ces “forçats” cette maladie ne toucherait que les hommes, mais pas les volailles. À côté de ce lieu recouvert de plumes, se trouve l'abattoir à ciel ouvert. En se coagulant, le sang prend une couleur tirant sur le noir, car mêlé aux abats invendables (viscères). De ce mélange se dégage une odeur tellement forte qu'elle attire les mouches de toute la région. Pourtant, dans ces conditions déplorables d'hygiène, le commerce de la dinde est des plus florissants. Les vendeurs guettent l'arrivée des clients et chacun va de son astuce ou de sa technique pour les attirer vers son étal. Tous les arguments appris par cœur sont alors récités pour convaincre les acheteurs potentiels. Les affaires vont bon train et semblent bénéfiques pour les vendeurs.
À chaque fois qu'ils ont besoin de marchandise, les étaliers envoient des dindes vivantes à leur abattoir. Cette situation fait l'affaire des éleveurs des alentours qui peuvent écouler leur produit sans avoir à se déplacer. Tous les jours, ils livrent les étaliers au flux tendu “selon les besoins”.
Complicité des autorités
Les commerçants estiment qu'ils attirent la clientèle car ils vendent à bas prix une viande de qualité et fraîche. La réalité est tout autre car aucun contrôle n'est pratiqué en ces lieux. “Croyez moi, je suis sidéré de découvrir de telles conditions. Pis, je me demande comment mon collègue a pu consommer la viande achetée ici ! Ce collègue médecin m'a même conseillé de faire un tour à Magtâa Kheira. Croyez-moi c'est un saut dans l'inconnu. Où sont les autorités ?” s'insurge un médecin d'Alger.
Ce dernier s'étonne, par ailleurs, d'une autre aberration qui prouve, selon lui, que les autorités sont complaisantes avec ces commerçants illégaux : “En garant ma voiture, j'ai constaté que de jeunes gardiens munis du badge de l'APC exigent 20 DA de droit de stationnement.” Evidemment, de jeunes gardiens, le badge accroché à la poitrine, sont là sur le parking, lui aussi improvisé. “Nous gardons les voitures ici, on nous a recrutés dans le cadre de l'emploi des jeunes”, estime un jeune gardien de voitures. Les gardiens tiennent à préciser que les 20 DA ne représentent que le droit de stationnement et qu'ils ne sont pas responsables des éventuels vols.
Les étaliers ne cessent de regarder la bâtisse en construction de l'autre côté de la route. En effet, sur ordre du wali en visite à Douaouda, la décision de réaliser un marché de dinde digne de ce nom a été prise. Les travaux entamés au début du mois d'avril 2005 sont toujours en cours. Au début du Ramadhan, les autorités ont invité les commerçants illégaux à rejoindre le nouveau marché aménagé. Les étaliers affirment avoir essayé d'occuper les nouveaux lieux, mais qu'ils ont dû fuir car le sol était recouvert de boue. “Les clients rebroussaient chemin dès qu'ils voyaient l'état du sol. Quelques heures après notre installation, nous sommes revenus à l'ancien marché”, affirme un étalier. Cette situation n'est pas faite pour satisfaire les membres de l'APC de Douaouda qui estiment que le nouveau marché réglera définitivement le problème. “Nous réaliserons le marché avec toutes les commodités indispensables à un tel commerce. Les abattages seront contrôlés par un vétérinaire. Dès que la construction de la chambre froide sera terminée, nous régulariserons les commerçants qui seront eux aussi contrôlés”, affirme M. Touati, premier vice-président de l'APC de Douaouda.
Concurrence déloyale
Cette assertion des membres de l'APC ne convainc pas les commerçants déclarés de Koléa et de Douaouda qui ne comprennent pas comment la dinde peut coûter aussi moins cher à M'gtâa Kheira.
Les marchands de volaille du centre-ville proposent la dinde à 480 DA le kilogramme d'escalope désossée. “À ce prix, ma marge bénéficiaire est minime. Quand il n'y a pas de contrôle, on peut égorger des bêtes malades. Les éleveurs ne vendent que les bêtes malades au profit des marchants illégaux”, affirme un commerçant de Koléa. Un autre s'insurge contre les autorités qui se montrent impuissantes devant les acteurs du commerce illicite, mais qui accablent les vrais commerçants d'impôts. “En cas de problèmes de santé, on sait où sont les commerçants légaux, tel n'est pas le cas des vendeurs de Magtâa Kheira”, déclare un autre marchand de volaille.
Un vétérinaire affirme, pour sa part, que vu le risque de grippe aviaire, les autorités doivent exiger la traçabilité de toutes les marchandises : “Le commerce de volaille doit se faire en toute transparence et toutes les transactions garanties par des factures. Les marchands de volaille au détail devront, eux aussi, délivrer des tickets de caisse comportant tous les renseignements sur l'origine de la volaille.”
Malgré tous les dangers que représente le commerce illicite de la chair de volaille en cette période où tous les pays du monde font tout pour se prémunir de l'apparition de grippe aviaire, chez eux, à Douaouda on autorise encore un commerce dangereux.
S. I.


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