Alors que le ministère préfère se concentrer sur la question du statut particulier de l'enseignant, les syndicats, eux, veulent porter le débat prioritairement sur le dossier du pouvoir d'achat. Alors que le ministre de l'Education tente d'apaiser la colère qui couve dans son secteur en tentant de cristalliser le débat autour du statut particulier dont la commission de révision a été installée lundi dernier, et aussi en ouvrant un cycle de discussions bilatérales avec les syndicats, ces derniers, eux, n'écartent toujours pas la menace de recourir à la grève pour amener les pouvoirs publics à apporter de vraies solutions à la question centrale qui est posée, à savoir l'amélioration du pouvoir d'achat des travailleurs. En effet, que ce soit pour les syndicats qui ont eu déjà à rencontrer le ministre dans le cadre des rencontres bilatérales ou pour ceux qui sont conviés pour les tout prochains jours, l'éventualité d'annuler la grève reste peu probable. C'est ce que nous a affirmé, entre autres, hier, le secrétaire général du syndicat Cnapeste, Messaoud Boudiba, qui a été l'un des premiers représentants syndicaux à être reçu par le ministre, dimanche dernier, à la suite du préavis de grève cyclique de deux jours qui sera entamée par son syndicat les 2 et 3 novembre prochain. "La grève est maintenue, car il n'y a aucun changement dans la situation pour le moment. Officiellement, nous n'avons pas encore les réponses du ministère. Jusqu'à présent, nous n'avons pas reçu le procès-verbal de la rencontre bilatérale de dimanche, et sans ce dernier, nous ne pouvons rien faire", a expliqué Messaoud Boudiba, rappelant qu'effectivement, il y a eu une rencontre entre le ministère et le Cnapeste concernant le préavis de grève, et qu'après 10 heures de travail, il a été convenu de soumettre les réponses au conseil national pour donner son appréciation, mais malheureusement, le syndicat n'a pas reçu le PV. "Pour que le conseil national puisse délibérer sur une question, il faut un PV concilié et jusque-là, nous ne l'avons pas reçu", dit-il, affirmant ainsi que "la grève cyclique de deux jours est maintenue". "Nous avons une réunion de la CSA demain jeudi (aujourd'hui, ndlr), et si la confédération décide d'une grève, nous allons y participer", a-t-il encore appuyé. La position du Satef ne diffère pas tant de son secrétaire général, Boualem Amoura, dont le syndicat sera reçu, lui également, par le ministre au courant de cette semaine, et qui considère que la teneur de la rencontre de lundi dernier avec 26 syndicats est loin de donner satisfaction et, que par conséquent, "le recours à la grève devient inévitable". "On nous a appelés pour l'installation de la commission technique pour la révision du statut particulier, mais malheureusement, en arrivant, on apprend que la commission est composée exclusivement des fonctionnaires du ministère, au nombre de dix, et que les partenaires sociaux n'y sont pas représentés. Comment vais-je adopter un travail auquel je n'ai pas participé ?", déplore, d'emblée, M. Amoura, qui dit que le ministre a, toutefois, signifié aux syndicats qu'ils peuvent remettre leurs propositions qui seront étudiées, pour que certaines d'entre elles soient éventuellement prises en considération. Le secrétaire général du Satef explique qu'il y a eu une nouveauté, à savoir qu'un délai de quatre mois est, cette fois, fixé pour finaliser le statut, mais que son approbation risque de prendre du temps. "Il a déclaré que cette commission terminera son travail dans quatre mois, soit vers le 25 février 2022. Et qu'il va nous soumettre le statut pour le débattre article par article, et cela signifie que cela prendra du temps. En second lieu, si on accepte le dossier déjà, il sera ensuite soumis à la commission ad hoc du gouvernement, alors qu'il y a urgence concernant le pouvoir d'achat", a-t-il analysé, estimant que les travailleurs peuvent tenir encore jusqu'à janvier, le temps que la loi de finances entre en vigueur, mais pas plus. "Il est impossible d'attendre ce statut qui, de surcroît, ne va pas régler les problèmes du pouvoir d'achat lorsque l'on sait que l'équivalent financier d'une catégorie n'est que de 2 000 DA", dit-il, considérant qu'à ce rythme, "la grève devient inévitable". "Déjà, depuis la rentrée sociale, on ne fait que retenir les travailleurs. On a donné aux pouvoirs publics un certain temps, mais qui ne semble pas être exploité à bon escient. Déjà, le dossier du statut particulier, on ne l'a sorti que parce que le mouvement de grève est dans l'air", a-t-il soutenu. Même son de cloche chez le secrétaire général du Snapest, Meziane Meriane, qui semble apprécier le fait que le ministre ait fixé, cette fois, un timing de quatre mois, ce qui n'existait pas auparavant, rappelle-t-il, mais il craint que sa mise en application vienne à s'éterniser. "Il est vrai que quatre mois, c'est largement nécessaire pour la commission afin qu'elle finalise le dossier, mais ce qui nous intéresse beaucoup plus, c'est l'après-finalisation. Va-t-on s'éterniser pour l'approuver ou bien sera-t-il approuvé juste après sa finalisation ? Car ceux qui interviendront après, ce ne sera plus le ministère de l'Education, mais la Fonction publique, les finances et le gouvernement, et éventuellement, l'APN. On s'interroge donc sur la durée du temps que prendra la finalisation. On peut le finaliser dans un mois et s'éterniser dans son application, et cela, justement, nous le refusons", a analysé Meziane Meriane dont le syndicat sera reçu aujourd'hui, jeudi, par le ministre, dans le cadre des rencontres bilatérales. Une rencontre dont dépendra la position du Snapest, a-t-il signifié. "Le pouvoir d'achat est la question qui constitue l'objet de la grève. Maintenant, on parle de la diminution de l'IRG, la hausse de la valeur du point indiciaire, mais jusque-là, c'est resté vague : quel sera le taux de diminution de l'IRG, quelle sera la nouvelle valeur du point indiciaire, cela répond-il aux attentes des fonctionnaires, cela va-t-il améliorer un tant soit peu le pouvoir d'achat... ? C'est à toutes ces questions que nous attendons des réponses lors de cette rencontre. On appelle les pouvoirs publics à donner plus de clarifications. L'inflation a laminé le pouvoir d'achat et, à court terme, il y a lieu de venir en aide aux travailleurs", plaide M. Meriane pour qui, sans prise en charge sérieuse et urgente de cette question, la grève reste à ne pas écarter.