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Du sort des minorités religieuses (II)
Publié dans La Nouvelle République le 23 - 11 - 2012

L'appartenance à une communauté religieuse est tout à la fois la traduction de convictions personnelles et la résultante d'une éducation imposée par le milieu, la famille en premier mais aussi le corps social, le clergé, l'Etat et, au-delà, la tradition qui peut être séculaire. Nous appartenons à une humanité qui a souvent revisité ses croyances, les a réformées ou rejetées pour d'autres, censées nous faire mieux approcher l'insoluble question de notre essence et le mystère de notre présence dans un monde dont nous découvrons chaque jour de nouveaux espaces. Il n'est pas de peuple qui ait échappé à ces conversions massives, à ces sauts dans l'inconnu que proposent les zélotes, prophètes, missionnaires, plus ou moins convaincants, pacifiques, et désintéressés qui parcourent le monde à la recherche de nouveaux territoires et de nouvelles ouailles. Car la puissance des églises se mesure davantage au nombre de leurs adeptes qu'à la vigueur et à la profondeur de leur message.
Qui sont-ils, ces «chrétiens d'Orient», que le monde musulman d'aujourd'hui considère comme les survivants d'une religion autrefois hégémonique, aujourd'hui rabaissée au rang de croyance minoritaire et que les chrétiens d'Occident tiennent comme des «frères lointains, incapables de peser sur les affaires de leurs patriotes respectives ? Souvenons-nous de nos humanités : si le christianisme, hérésie scandaleuse et persécutée d'entrée par des empereurs romains attachés au culte de dieux capricieux et vindicatifs, se développe principalement dans les milieux juifs de la Palestine et de la diaspora, il aborde aussi le monde païen. Or, si les premiers documents chrétiens, à commencer par le nouveau Testament, sont écrits en grec et se focalisent logiquement sur le monde occidental,il serait réducteur d'occulter son développement dans le monde oriental, dont la langue de culture est l'araméen : la Transjordanie, l'Arabie, la Coelosyrie (vallée de la Bekaa), l'Adiabène (Kurdistan irakien), l'Ostrène (nord de la Mésopotamie), et le royaume des Parthes (Iran) évangélisé par Thomas. C'est l'ensemble de l'Asie mineure qui est pacifiquement converti au christianisme au lieu qu'à l'Ouest, les méthodes de conversion apparaissent plus brutales. La Galilée, par exemple, est évangélisée très tôt et ce sont des petits gens, pêcheurs et paysans, qui appellent à la révolte contre les oppresseurs romains, toujours païens. C'est ce christianisme dit primitif qui gagne la côte et investit Césarée, Joppé (Jaffa) et Ghaza. En Syrie, Antioche, siège de la province d'Orient, où, pour la première fois, il est fait mention du nom de «chrétiens», et Damas sont les centres d'une active évangélisation. Le premier acte fondateur du christianisme, en termes d'organisation, est bien le concile de Jérusalem qui ouvre la nouvelle religion aux païens en supprimant l'obligation préalable de la circoncision. Il se tient vers 48 avant même la conversion de l'empereur Constantin en 337 qui marque la fondation officielle de l'Eglise de Rome. Ce sont donc trois siècles qui se seront écoulés avant que l'Occident rejoigne dans la foi chrétienne l'Orient méditerranéen. Le christianisme est donc consubstanciel à l'Orient et il n'est pas, comme l'opinion le pense, un des piliers de la civilisation occidentale qui démarquerait l'Occident de l'Orient. Il n'est pas davantage un corps étranger dans cette partie du monde que l'on reconnaît comme islamisée et ne saurait être opposé à la religion de Mohammed, du moins jusqu'à ce que les croisades placent les deux religions en situation antagoniste. Une bonne partie des nouveaux musulmans sont des chrétiens qui ne voient pas de rupture entre les deux religions. D'une manière générale, l'islam s'accommode assez bien de l'existence d'autres croyances et la coexistence du judaïsme et du monde musulman; il se fera, par exemple, dans de bonnes conditions jusqu'à ce qu'intervienne cette sorte de croisade moderne que constitue la création de l'Etat d'Israël sur la terre de Palestine. ` Quels que soient les dominateurs, arabes ou ottomans, ils ont toujours su ménager des droits qui, certes, n'étaient pas formalisés comme nous aimons tant à le faire, mais qui ouvraient à de nombreux juifs une forme d'assimilation sociétale, se traduisant par l'identité des coutumes, des costumes, des noms et par la fréquentation des synagogues. Au Liban, où les chrétiens maronites tiennent les affaires, et alors que, au plus fort de son antagonisme avec Charles Quint, François 1er les couve d'un œil jaloux, le sultan de Constantinople a la prudence et le bon goût de choisir son représentant parmi ces disciples de Maron, permettant ainsi à la religion chrétienne de pleinement jouir de sa prééminence. Un tout autre sort est réservé en Europe, aux «hérétiques», où la chasse leur est donnée, ainsi aux Cathares et aux Albigeois, La sainte inquisition n'a pas d'autre justification. Les méandres de la haute politique font le reste : Soliman le Magnifique, que les Ottomans appellent le «législateur», fait alliance avec le roi de France pour contenir les ambitions de Charles Quint, que, par ailleurs, l'Emir Barberousse punit à Alger, l'obligeant à une humiliante retraite. C'est cette alliance que l'on peut au choix qualifier de contrenature ou de réaliste qui, sans doute met un terme aux appétits de l'empereur du Saint Empire romain germanique et dont les chrétiens du Levant ont tout lieu de se féliciter, en ce qu'elle pérennise leur mainmise sur le pays du Cèdre. Dans les siècles qui suivent, le christianisme se détourne des affaires mondiales et de celles du bassin méditerranéen, secoué par la Réforme et les guerres de religion, puis par les schismes, déclarés comme le jansénisme ou comme la persécution des Jésuites dont la papauté souhaite se défaire. Le siècle des lumières, la Grande Révolution française, qui ose briser le mythe de l'alliance indéfectible du pouvoir et de la religion ouvrent enfin une période nouvelle, celle de la souveraineté populaire qui s'impose au droit divin et rend à l'homme sa pleine dignité. C'est la première fois dans le monde qu'une nation affirme des droits supérieurs à ceux, mythiques, d'un Dieu ou d'une Eglise, sans que pour autant il soit interdit au simple citoyen d'exprimer une croyance, une foi, voire une allégeance spirituelle. Je souligne ce fait pour bien marquer ce qui distingue la Révolution américaine de la Révolution française : la première se place dans la ligne d'une foi déclarée et «officielle» (God bless America), la seconde marque sans ambiguïté la place du peuple «souverain» qui ne sollicite aucune protection divine. Napoléon, Louis XVIII, Charles X et Louis-Philippe ne pourront rétablir l'Eglise dans ses privautés d'avant la Révolution et la IIIe République se désintéresse du sort des chrétiens d'Orient. Pourtant, l'aventure algérienne engagée pour d'obscures raisons de trafic ne va pas échapper à la tentation du prosélytisme, chrétien celui-ci. L'Eglise se glisse dans les fourgons de l'Armée victorieuse des Ottomans et, sous le prétexte de l'accompagnement d'une population de colons, tenus évidemment pour chrétiens, parfois à leur corps défendant, elle promeut sinon l'évangélisation d'une terre et d'un peuple qui ont fait d'autres choix, du moins l'ancrage du catholicisme en terre d'islam. Un homme incarne à lui seul cette politique, c'est le cardinal Lavigerie, fondateur des missionnaires d'Afrique, les «pères blancs», auxquels il assigne ces consignes destinées à les faire mieux accepter des «indigènes», parler leur langue, se vêtir comme eux et manger la même nourriture. Son élévation à la pourpre cardinalice marque l'intérêt que Rome porte au travail des prêtres catholiques qui savent se faire admettre en limitant leur activité au service des chrétiens d'origine européenne, sans rechercher à étendre leur influence au détriment de l'islam. Bien entendu, l'érection de Notre-Dame d'Afrique sur un promontoire qui domine le quartier de Bab El-Oued, à plus de cent mètres de hauteur, pourrait apparaître comme un défi lancé à une communauté musulmane toute entière et on ne peut exclure que telle fut l'intention de ses bâtisseurs, soucieux, dit-on, d'en faire le pendant de Notre-Dame de la Garde, de l'autre côté de la Méditerranéen, à Marseille. Mais rien dans l'attitude prudente et réservée de l'Eglise catholique en Algérie ne viendrait confirmer une telle remarque. Elle a plutôt le souci de ne pas s'impliquer dans une politique qu'à partir d'Alger, certains milieux européens voudraient conduire en rejetant les revendications naissantes des élites d'origine musulmane et en étouffant les révoltes sporadiques d'une population en quête d'identité. Cette attitude de prudence ne va être ni comprise ni moins encore acceptée par une population qui verse trop aisément et rapidement dans la surenchère, persuadée que la force, qui est celle de la République, ramènera à la raison des «Arabes» égarés par quelques agitateurs. L'Algérie vit au rythme de ces soubresauts sans réelle inquiétude, sauf de la part de quelques gouverneurs clairvoyants comme, en son temps, Maurice Violette que j'ai eu la chance de connaître, et que Léon Blum avait «délégué» à Alger. Quand, après le traumatisme de la Seconde Guerre mondiale et celui, subséquent de Sétif, la montée du nationalisme algérien se fait irrésistible, l'Eglise refuse de se marquer davantage et elle s'attache plutôt à sauver ce qui peut encore l'être dans le contexte d'un affrontement qui devient racial et pourrait devenir confessionnel. C'est alors que se produit le grand divorce d'une population européenne et d'un clergé qui, et ce n'est pas le fruit du hasard, retrouve les valeurs premières de sa foi. Mohamed Ben Duval pour les jusqu'auboutistes de l'Algérie française, pour l'état-civil Léon-Etienne Duval, cardinal-archevêque d'Alger, va porter sur ses épaules tout le fardeau d'une impopularité, d'une détestation qui ne font que le grandir et donnent de la communauté chrétienne l'image qu'elle n'aurait jamais dû perdre. Nommé évêque d'Alger quelques mois avant le déclenchement de la rébellion, cet homme de courage et de conviction n'hésite pas à se prononcer pour l'autodétermination de l'Algérie deux ans après, au moment où le gouvernement de Guy Mollet tergiverse, pris entre ses idéaux de gauche et le poids de groupes de pression «pieds noirs». Il franchit même le rubicon en demandant la grâce de résistants condamnés sous l'inculpation de terrorisme, comme le fera Germaine Tilion, et s'installe dès lors dans le camp vilipendé des défenseurs d'une autre Algérie, libre et indépendante. Le plus remarquable est qu'il ne joue pas un rôle, qu'il ne prend pas une posture, il est sincèrement convaincu de la justesse de la cause de l'Algérie algérienne pour anticiper sur une formule qui ne viendra que plusieurs années plus tard de la bouche du général De Gaulle. De Notre-Dame d'Afrique, il ne lance ni anathème ni condamnation, il préfère énoncer calmement les principes
auxquels il se tient et demande aux prêtres, placés sous son autorité de se tenir. (A suivre) directeur du Centre de recherche international du terrorisme


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