Le procureur de Brooklyn, Kelly Curry ne veut pas laisser retarder les choses. Sous ces yeux, un volumineux dossier où il est inscrit FIFA. Sous la couverture de cette chemise, des rapports et les premières conclusions des enquêtes, qui laissent de marbre plus d'un. Il compte 7 chefs d'inculpation, 14 mises en examen pour blanchiment d'argent, racket, corruption contre des responsables de la Fifa et des cabinets de marketing sportif. Pour ce procureur, «ces entités, ces gens, étaient censés travailler ensemble à des objectifs légitimes : réguler et promouvoir le football international. Mais ces inculpés n'ont fait que dévoyer cette entreprise. Ce qu'ils ont en commun en fait, c'est la cupidité, qui les a conduits à utiliser leurs mandats pour obtenir de l'argent.» Le match ne fait que commencer. Il aura, en effet, fallu une semaine à peine après sa réélection pour faire chuter de son piédestal, le tout puissant patron du football mondial, Joseph Blatter, à la tête de l'institution depuis 1998. Depuis, pas une lumière ne vient chasser ce climat qui étouffe cette institution et avec lui le football. Le drapeau FIFA est pour nombreux d'observateurs en berne. La justice américaine vient de rappeler qu'elle n'a pas de temps à perdre et refuse de jouer aux prolongations. Le 1er juillet, elle a demandé officiellement à la Suisse, l'extradition des sept responsables de la FIFA arrêtés le 27 mai 2015 à Zurich sur la base d'un mandat des autorités américaines. Les demandes sont parvenues ce mercredi soir à l'Office fédéral de la justice (OFJ). Les hauts responsables de la Fédération internationale (FIFA) ont été donc arrêtés à l'aube ce mercredi à Zurich, à leur hôtel. Il faut rappeler que «les mandats d'arrêt ont été émis le 20 mai par le parquet du district «Est» de New York, qui soupçonne ces personnes d'avoir accepté des pots-de-vin pour plus de 100 millions de dollars, versés, selon les présomptions des procureurs new-yorkais, par des représentants des médias sportifs et d'entreprises commerciales sportives pour obtenir des droits de diffusion, de commercialisation et de sponsoring lors de tournois de football aux Etats-Unis et en Amérique latine. Ces actes de corruption, convenus et préparés sur le sol américain, ont aussi fait l'objet de transactions financières par le biais de banques américaines». La brochette d'accusation est sur le grille de la justice américaine. Ils seraient également impliqués dans différentes affaires de corruption et de blanchiment d'argent remontant aux vingt dernières années. Chuck Blazer, ancien secrétaire général de la Confédération de football d'Amérique du Nord, d'Amérique centrale et des Caraïbes (Concacaf) de 1990 à 2011, a reconnu devant les enquêteurs américains avoir touché, avec d'autres personnes de la FIFA, des pots-de-vin dans le cadre de la sélection du pays organisateur des Coupes du monde 1998 et 2010, attribuées respectivement à la France et à l'Afrique du Sud. «Tout d'abord, vers 1993 et jusqu'au début des années 2000, j'ai accepté, avec d'autres, de recevoir des pots-de-vin en rapport avec la diffusion et d'autre droits des Gold Cups (compétition organisée par la Concacaf) 1996, 1998, 2000, 2002 et 2003 (mais également) en rapport avec la sélection de l'Afrique du Sud comme pays organisateur de la Coupe du monde 2010.» Plus loin, il ajoute : «Pendant mon association avec la FIFA et la Concacaf, entre autres choses, je me suis mis d'accord avec d'autres personnes pour que l'un de nous se prête à au moins deux actes de racket. Entre autres choses, j'ai accepté avec d'autres personnes aux alentours de 1992 de faciliter la remise de pot-de-vin en lien avec le choix du pays organisateur de la Coupe du monde 1998. Pour le Mondial de 1998, le Maroc aurait-il réellement demandé à un collègue de Blazer de voter pour sa candidature en échange d'un pot-de-vin ? La question fait le tour de table. Chuck Blazer alors secrétaire général de la Concacaf (Confédération d'Amérique du Nord, Amérique centrale et Caraïbes) avait affirmé à la justice américaine avoir été «témoin d'un accord passé entre le comité de candidature marocain et une personne, «complice n°1», décrite comme détenant des postes élevés au sein de la FIFA et de la Concacaf». Cette déclaration ainsi évoquée figure dans l'acte d'accusation rendu public le 27 mai par la justice américaine. Les deux hommes avaient été invités au Maroc «quelques mois avant la désignation» du pays-hôte de la Coupe du monde 1998. «Blazer était présent lorsqu'un représentant du comité de candidature marocain a offert un pot-de-vin au complice n°1 en échange de sa voix pour le Maroc dans le scrutin pour le pays-hôte de la Coupe du monde 1998 et le conspirateur n°1 a accepté le pot-de-vin», précise le document qui inculpe Blazer de racket et corruption. «Après leur voyage, le complice n°1 a demandé à Blazer de contacter les représentants de la candidature marocaine pour déterminer quand le versement serait effectué. Blazer s'est entretenu au téléphone avec eux à plusieurs reprises, y compris depuis les bureaux de la Concacaf à New York», poursuit le document. «Bien que le paiement ait été effectué, le comité exécutif de la FIFA a préféré le 2 juillet 1992, la candidature de la France à celle du Maroc», conclut le texte. Le montant de la somme versée n'est pas précisé. Selon le journal sportif L'Equipe, la police cantonale de Zurich entendra les sept dirigeants d'organisations footballistiques sur les demandes d'extradition. L'OFJ (Conseil fédéral de justice helvétique (FOJ) leur accordera ensuite – à eux et à leurs avocats – un délai de 14 jours pour prendre position, délai qui peut être prolongé, pour des motifs sérieux, de 14 autres jours.» Ces décisions d'extradition de l'OFJ peuvent faire l'objet d'un recours devant le Tribunal pénal fédéral, dont la décision peut encore être attaquée en dernière instance devant le Tribunal fédéral. Comme rien ne se joue sous les tables Le Wall Street Journal annonce que les inculpations devraient être rendues publiques ce mercredi par un tribunal fédéral de Brooklyn, à New York. Les médias internationaux continuent de gratter sur ce volumineux dossier dans la perspective de découvrir d'autres faits qui accableraient les accusés. A la Concacaf, confédération d'Amérique du Nord, Amérique centrale et Caraïbes, des traces pas catholiques se sont apparues et vite signalées dans les rapports des enquêteurs. La réaction de la justice ne s'est pas faite attendre, elle envisagerait d'inculper plus de dix autres hauts responsables. Parmi eux, figureraient Jeffrey Webb, vice-président du comité exécutif, et Eugenio Figueredo, membre du comité exécutif et Jack Warner, ancien membre du comité accusé de multiple violation à l'éthique. La liste des inculpés ne porte pas seulement la griffe FIFA mais aussi des représentants des médias sportifs et de sociétés de marketing sportif, impliqués dans des versements à de hauts fonctionnaires d'organisations footballistiques, des délégués de la FIFA et d'autres personnes appartenant à des organisations affiliées à la FIFA, en échange de droits médiatiques et des droits de marketing de compétitions organisées aux Etats-Unis et en Amérique du Sud. Ils sont, selon les autorités judiciaires suisses, suspectés d'avoir accepté des dessous de table d'un montant de plusieurs millions d'euros des années 1990 à nos jours, précisent les autorités judiciaires suisses. Le pacte de corruption se serait noué sur le sol américain. «Selon la demande d'arrestation américaine, l'entente relative à ces actes aurait été conclue aux Etats-Unis, où ont également eu lieu les préparatifs. Des paiements auraient transité par des banques américaines.» Le grand déballage a donc bien commencé mais servira- t-il de leçons aux... autres.