Industrie pharmaceutique : Kouidri examine avec l'ambassadeur du Zimbabwe les perspectives de renforcement de la coopération bilatérale    Energie et mines : Arkab reçoit des députés de l'APN représentant la wilaya de Boumerdès    Attaf reçoit son homologue sud-africain    Jeux scolaires Africains (JSA-2025)/5e journée : cinq médailles d'or pour la boxe féminine algérienne    L'Etat accorde une "grande attention" au développement du tourisme, notamment le tourisme intérieur    Biskra commémore le 59 anniversaire des "massacres du dimanche noir"    Initiative Art 2 : 16 porteurs de projets innovants dans le domaine des industries culturelles et créatives retenus    Djamaâ El-Djazair: ouverture de la passerelle Est du côté nord sur le front de mer à partir de vendredi    L'Algérie décroche un siège dans le premier bureau exécutif de l'Organisation des jeunes du MNA    Le président de la République reçoit l'ambassadeur de la République libanaise en Algérie    Le Secrétaire général du ministère de la Défense nationale reçoit l'ambassadrice du Canada    Attaf reçoit le ministre nigérian des Affaires étrangères    Oran: ensemencement de 20.000 alevins de Tilapia rouge    Startups: Ouadah salue le lancement du premier fonds d'investissements privé dédié au financement des projets    Jeux africains scolaires: L'Algérie conserve sa seconde place au tableau des médailles après la 4e journée    Jeux scolaires africains/Natation: une nouvelle belle moisson de médailles pour l'Algérie lors de la 3e journée    Persistance de la vague de chaleur et des orages sur des wilayas du Sud    Agressions sionistes contre Ghaza : plus de 232 journalistes tombés en martyrs depuis octobre 2023    Les six raisons du faible impact de la revalorisation de l'allocation devises en Algérie de 750 euros sur le cours du dinar sur le marché parallèle    L'Algérie plaide pour une action urgente en faveur de Ghaza    Les citoyens sensibilisés à la gestion énergétique    Victoire de l'Algérie devant le Koweït 86-74    Pierre-Emerick Aubameyang, le retour à l'OM    1,1 million inscrits ont consulté les résultats de leurs dossiers    Le sarcophage maudit    Du haut du ciel, cette brillance des étoiles nous éclaire    Insuffler une nouvelle dynamique à la coopération bilatérale    Ne pas transformer la Syrie en un théâtre d'affrontements !    Le héros national, le Brigadier de Police Mellouk Faouzi s'en est allé    Ghrieb et Mouloudji à Tlemcen pour mettre en valeur les synergies entre secteurs    CHAN-2025 Parole des Algériens : faire mieux que 2023    Le président de la République honore les champions du BAC et du BEM 2025    De nouveaux tracas    L'artisan de la scène culturelle    Hidaoui souligne l'importance d'encourager les jeunes dans le domaine des médias numériques    Mohamed Meziane installe le nouveau secrétaire général du ministère    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«Pelourinho» de Tierno Monénembo
Littérature classique africaine
Publié dans La Nouvelle République le 03 - 06 - 2020

Prix Renaudot 2008, Tierno Monénembo est romancier, avec à son actif treize romans. Né en Guinée en 1947 et exilé de son pays depuis l'âge de 23 ans, il a publié une œuvre majeure qui fait une large place à la nostalgie et à l'exil.
Partagés entre la maison introuvable et le monde, ses romans font voyager à travers les pays où il a séjourné plus ou moins longuement (Côte d'Ivoire, Sénégal, France, Brésil, Cuba, Algérie). De livre en livre, il a construit une fiction-monde à nulle autre pareille dans le champ littéraire africain, invitant ses lecteurs à le suivre dans l'intimité des sociétés et de leurs vécus. Dans Pelourinho, son cinquième roman, Tierno Monénembo retrace la quête éperdue d'un écrivain africain au Brésil.
Des sonorités brésiliennes
Pelourinho de Tierno Monénembo est sans doute le plus brésilien des romans africains. Son intrigue se déroule dans la ville de Salvador de Bahia. «Le Pelourinho» est le nom d'une place dans la vieille-ville, où se trouvait le plus ancien marché à esclaves du Brésil. Le roman raconte l'histoire d'un écrivain africain venu dans cette ville pour écrire un livre sur ses racines brésiliennes. Ses amis des favelas l'appellent «Escritore» ou «Africano». Ils voient en lui, le Prince du Dahomey dont la venue était prophétisée par les chants vaudous. Pour le protagoniste, l'Escritore donc, ce voyage est aussi une quête identitaire, afin de retrouver les traces de ses ancêtres, arrachés à leurs villages afin d'aller peupler les plantations du Nouveau monde.
La légende du baobab
C'est en effet une vision renversée de la quête des origines africaines que propose ce roman. Les origines cèdent ici la place à la problématique de la filiation. Le personnage de l'écrivain dans le roman de Monénembo sait que des gens de sa famille, «même case, même legs», se trouvent quelque part dans les rues de Bahia. Ils ont en commun des pratiques, des cosmogonies, des légendes, dont celle de leur ancêtre commun, le roi Ndindi-Grand-Orage. Une légende aussi dérisoire que grave. Enivré de sa puissance, ce roi avait voulu se mesurer à un baobab. Il avait fait abattre l'arbre, mais ensuite il fut bien sûr incapable de le remettre sur la souche, comme il s'était targué de faire auprès des tribus avoisinantes. Humilié par son échec, il exigea d'être vendu comme esclave et marqué au fer rouge sur les deux épaules. Cette marque identitaire, perpétuée de génération en génération, permet au héros de Pelourinho de reconnaître les siens au Brésil, descendants d'anciens esclaves. L'expérience relève à la fois de l'enquête anthropologique et de la quête généalogique, révélant des destins entrelacés par-delà les mers.
Un roman sur l'esclavage ?
Plutôt sur les conséquences humaines de l'esclavage, sur fond du multiculturalisme brésilien, qui est peut-être le véritable thème de ce roman. Ce Brésil multiculturel est mis en scène ici à travers le vécu de la population métissée des favelas de Bahia. Tierno Monénembo aime rappeler que ce qui lui a plu au Brésil, c'est son syncrétisme culturel et religieux, avec les religions noires qui se sont imposées aux Blancs, aux Indiens et aux Métis. Le syncrétisme est à l'œuvre dans son récit, dont les personnages, irrespectivement de la couleur de leur peau, sont pénétrés des mythes et légendes yoroubas véhiculées par le vaudou.
C'est le cas par exemple de la narratrice aveugle du récit, au nom puisé dans la mythologie grecque, Léda-paupières-de-chouette. Elle a la peau blanche et les cheveux blonds. En alternance avec un petit malfrat noir, issu de la même favela, Leda assure la narration du récit, donnant à voir les heurs et malheurs du petit peuple de Salvador de Bahia. Les deux récitants à l'imagination exubérante, qui n'est pas sans rappeler l'univers baroque de la littérature latino-américaine, ont en commun d'avoir connu de près l'Escritore, devenu leur ami, mais qui meurt poignardé dans une rixe, dès les premières pages du livre. L'emmêlement de leurs triples quêtes entraîne le récit vers sa fin implacable, annoncée dès le début du roman.
Trois raisons pour lire Pelourinho
Il faudrait lire ce roman d'abord pour l'intelligence de sa narration, qui exige bien sûr en contrepartie une concentration sans faille de la part du lecteur. Il s'agit d'une narration à trois voix, une composition polyphonique, qui convoque des souvenirs, des rêves, des légendes, une prolifération d'épisodes secondaires, pour faire émerger progressivement, à travers une cacophonie de destins, une quête commune des origines. C'est du grand art, qui est d'autant plus astucieux que l'auteur a fait le choix d'»aller d'abord vers l'aval», comme il l'a expliqué, pour «remonter le fleuve trop long de l'histoire africaine».
Il faut lire Pelourinho aussi pour l'écriture très orale et haute en couleur de Monénembo qui privilégie la langue parlée, le registre populaire, la verdeur et les sonorités locales. On est plus proche de Céline que du classicisme des académiciens et grammairiens de la première génération d'écrivains d'Afrique. Enfin, ce roman qui paraît en 1995 est un tournant en littérature africaine, car en abandonnant l'Afrique géographique et politique qui a été pendant longtemps la thématique obsédante des romanciers, pour aller puiser son miel dans le Brésil des bars et des favelas, le Guinéen fait littéralement «décoller» le roman francophone et s'impose comme le père du roman-monde africain.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.