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«Les autorités françaises ont forgé un mensonge d'Etat destiné à couvrir l'ampleur du crime»
Interview exclusive du politologue Olivier Le Cour Grandmaison à LNR
Publié dans La Nouvelle République le 19 - 10 - 2021

Enseignant en science politique à l'université Paris-Sclay Evry-Val d'Essonne, historien, politologue, président de l'association 17 Octobre1961 contre l'oubli, directeur de l'ouvrage collectif «17 Octobre 1961, un crime d'état à Paris...»Olivier Le Cour Grandmaison revient sur les déclarations d'Emanuel Macron et bien d'autres choses. Suivons-le :
Il y a 60 ans on noyait les manifestants pacifiques algériens dans la Seine à Paris... Que peut-on retenir de ce génocide collectif invisibilisé ?
Olivier Le Cour Grandmaison : «D'une part en ce qui me concerne, je ne considère pas du tout que ce soit un génocide, c'est un crime contre humanité assurément conformément à l'article 212-1 du code pénal français qui définit le crime contre l'humanité comme étant des incursions perpétrés à l'encontre de civils pour des motifs à la fois politique, religieux ethnique et en vertu d'un plan concerté, ces pratiques sont celles de la torture, des exécutions sommaires et de la disparition forcée et l'ensemble de ces éléments sont effectivement présents et sinistrement présents tout au long du mois d'octobre 1961 plus spécifiquement à l'occasion des rassemblements pacifiques appelé en effet par la fédération de France du FLN pour protester contre le couvre-feu raciste établit par Maurice Papon avec l'aval, faut-il le rappeler, est maintenant tout à fait importante après les déclarations qui n'est d'ailleurs pas une déclaration, le communiqué de l'Elysée d'Emanuel Macron implique Maurice Papon mais ce dernier n'a pas pu agir seul et qu'il a agit constamment avec l'aval du gouvernement.
Votre association avec d'autres aussi d'ailleurs milite depuis plus de 30 ans pour la reconnaissance du crime d'Etat du 17 Octobre 1961. Où on est-on aujourd'hui ?
«Eh ! Bien, nous en sommes à cette situation singulière. Effectivement, Emanuel Macron a déclaré samedi dernier que c'était un crime et qu'il était inexcusable mais encore une fois ce crime n'est pas qualifié, il n'est pas qualifié de crime d'Etat c'est pourquoi cette reconnaissance n'en n'est pas une.
Macron impute la responsabilité principale à Maurice Papon ce qui est une contre-vérité à la fois politique, historique et institutionnelle, parce que chacun sait ou devrait savoir qu'un préfet de police de Paris qui puisait en période d'exception, en période de crise comme c'était le cas en octobre 1961 n'agit pas de son plein gré mais agit bien sûr avec le soutien politique, du gouvernement. Maurice Papon a effectivement procédé ainsi tout au long du mois d'octobre 1961 et le 17 octobre 1961 et au lendemain de cette date-là, Maurice Papon a toujours été soutenu puisque les autorités françaises ont forgés un mensonge d'Etat destiné à couvrir l'ampleur du crime qui venait d'être commis.»
Quelle lecture donnez-vous au document de Pierre Vidal Naquet paru dans le numéro Vérité Liberté le 31 octobre 1961, soit quelques jours après le crime de Maurice Papon ?
Cette publication très importante prouve que les contemporains qui voulaient savoir ce qu'il s'était passé en octobre 1961 et plus particulièrement le 17, ont été capables d'obtenir des informations très précises et de nombreux témoignages accablants pour les autorités policières et politiques. Ce sont les unes et les autres qui les autorisent déjà à parler de «terreur d'Etat», de «progroms» et de «rafles».
Initié par un collectif composé d'enseignants, artistes, chercheurs(es) et de militants dans le cadre de la mobilisation nationale pour que ce massacre soit reconnu comme crime contre l'humanité... Que pensez-vous de ces initiatives organisées à travers toute la France ?
à constater qu'en l'espace de 20 ans entre le 40ème et 60ème anniversaire, les choses ont progressés au niveau local notamment puisqu'on a constaté que ce que j'appelle une nationalisation des initiatives relatives à la commémoration et à l'exigence à la reconnaissance du crime d'Etat perpétré il y a maintenant soixante ans ce qui est fort et une bonne chose, reste que les autorités françaises et notamment le chef de l'Etat restent très en deçà des exigences des uns et des autres et de ce que les historiennes et historiens Français, étrangers et Algériens ont désormais établit en ce qui concerne le 17 octobre 1961.
Vous n'êtes jamais ou rarement invité sur les plateaux des chaînes de télévisions françaises pour parler des crimes de Maurice Papon et consorts. Pourquoi cet embargo médiatique selon vous ?
Alors écoutez, en partie c'est moins vrai puisque il y a eu énormément de choses qui ont été écrites et dites sur le sujet...
Là, je parle des plateaux TV Monsieur Olivier !
Ah ! Les chaînes de télévision ? Bah ! Ecoutez, c'est sans doute parce que justement avec quelques autres nous exigeons et nous défendons depuis très longtemps des revendications très précises qui sont la reconnaissance des crimes d'Etat, l'ouverture des archives et la mise en place d'un véritable lieu de mémoire.
En réponse à certains politiques français vous avez répondu : «L'histoire de l'Algérie et la France n'est pas commune, elle est imposée ». Pourriez-vous être plus explicite ?
Ah ! Parler de l'histoire commune, c'est une expression qui revient souvent, relativement à l'histoire entre la France et l'Algérie, repose implicitement sur l'idée qu'au fonds la France et l'Algérie par le passé de la France coloniale, bien sûr, l'Algérie aurait été placée sur le même pied d'égalité. Or, à l'évidence c'est une contre-vérité historique, il ne s'agit donc pas d'une histoire commune dès lors que le général Bugeaud a été nommé gouverneur général d'Algérie à partir des années 1840, c'est évidemment une histoire politique, juridique, militaire, sociale qui est imposée par la puissance coloniale à l'Algérie avec ce que l'on sait de massacre, de déportation de population civile et de spoliation de terre, donc, c'est la raison pour laquelle je récuse absolument l'idée d'une histoire partagée, c'est une histoire qui est catastrophiquement imposée au peuple algérien depuis 1840 jusqu'au 19 mars 1962.
Revenons au Président Macron présent ce samedi à Bezon qui s'incline devant la mémoire des victimes du 17 octobre 1961 déclare je cite : «Le crime perpétré par Maurice Papon est «Inexcusable» Qu'en dites- vous de cette initiative sachant qu'on est en pleine campagne électorale présidentielle et les relations entre l'Algérie et la France sont tendues depuis début octobre ?
Je pense que la déclaration est d'abord et avant tout déterminée par des considérations et de politique intérieure, chacun essaye d'être moins naïf comme Manuel Macron est en campagne électorale, il s'agissait donc de trouver une sorte de cote mal taillée en faisant croire à la reconnaissance alors même que cette reconnaissance n'a pas eu lieu et ne doit pas provoquer de réactions particulièrement violentes du côté de la droite.
Suite au rappel de son Ambassadeur à Paris, Jean-Yves Le Drian joue à son tour, comme Macron, à l'apaisement entre l'Algérie et la France. Que pensez-vous de ce revirement de la situation du gouvernement français ?
Je pense que dans un premier temps Emanuel Macron a été prêt pour des considérations électorales à sacrifier conjoncturellement les relations diplomatiques entre la France et l'Algérie et maintenant, il sait évidement pour des raisons à la fois financières et géopolitique de tempérer cela et je pense que les déclarations qui ont été dites samedi dernier où le communiqué de l'Elysée est évidement très largement insuffisants au regard de ce que nous savons de ce qui a été perpétré le 17 octobre 1961.
Selon un militant du Rassemblement National, «Eric Zemmour c'est de l'humour». Et vous; vous en pensez
quoi ?
Je ne partage pas évidement cette appréciation d'une part je ne pense pas que c'est de l'humour ; il est en campagne électorale et il mène une campagne qui est à la fois raciste et islamophobe. Rappelez-vous qu'Eric Zemmour a été condamné par deux fois pour incitation à la haine raciale
Un dernier mot peut-être sur le rapport de Benjamin Stora ?
Ce rapport, dans lequel les catégories de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité ne sont pas employées est un rapport rédigé sur mesure pour le chef de l'Etat. De ce point de vue, il est très en-deçà de ce que les historiens, les juristes et les politistes savent et ont établi relativement à la colonisation de l'Algérie et à la guerre qui débute le 1er novembre 1954.
Interview réalisée à Paris


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