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Le français : butin de guerre ou bulletin d'adhésion ?
Publié dans La Nouvelle République le 09 - 02 - 2023

Kateb Yacine, stalinien impénitent, et esprit assurément pas pénétrant mais colonialement pénétré, au point de cultiver une haine de soi symbolisée par son aversion pathologique des deux fondements de l'Algérie, la langue arabe et l'islam, a popularisé cette spécieuse formule proférée sous forme de slogan, de tirade théâtralement débitée : « La langue française est notre butin de guerre ».
Son impertinent cri de ralliement s'adressait assurément à ses congénères lettrés vivant dans leur tour d'ivoire, c'est-à-dire la petite caste d'intellectuels francophones fabriquée par la France coloniale par la grâce de la langue d'allégeance : le français. Car ce slogan ne pouvait concerner les 92% d'Algériens analphabètes, pour qui le français était personnifié par le colon, incarné par Bugeaud et Bigeard, et non pas Molière et Victor Hugo.
Kateb Yacine devait avoir une mentalité de pauvre pour s'imaginer riche avec son dérisoire « butin de guerre » concédé mesquinement par la France coloniale. En fait, au vrai il ne s'agit pas d'un butin de guerre, mais plutôt d'un bulletin d'adhésion à la langue française coloniale. Et, par extension, à la culture de ses titulaires. Au paradigme politique et philosophique de la France, en vertu du principe que toute langue, à plus forte raison en position d'hégémonie, véhicule les représentations sociales, les systèmes de valeurs et les schèmes de pensée intrinsèquement liés au pays tutélaire.
Pour autant, lorsqu'on emploie l'expression « butin de guerre », cela implique que nous aurions pris possession d'un immense trésor inestimable qui nous aurait prodigieusement enrichi.
Or, à l'époque coloniale, dans le cas de la langue française, celle-ci n'avait jamais permis aux « indigènes algériens » de s'enrichir intellectuellement, encore moins de prospérer scientifiquement. Pour preuve : à l'indépendance, seuls 8% de la population algérienne était rudimentairement scolarisée. Kateb Yacine lui-même n'a pu dépasser le cycle secondaire : il n'a même pas son baccalauréat. Aussi, le français n'a jamais constitué notre butin de guerre. En revanche le Français (colonial) nous a toujours mené une putain de guerre (d'extermination simultanément démographique, culturelle, cultuelle, civilisationnelle, linguistique). La langue française, outre le fait qu'elle fut parcimonieusement dispensée à une infime minorité, fut en vérité le cheval de Troie de la politique d'assimilation culturelle instaurée par la France coloniale. Elle ne fut jamais un attelage chargé de tracter les savoirs scientifiques pour libérer les potentialités intellectuelles du peuple algérien. Lui accorder les opportunités universitaires en vue de lui ouvrir les voies de son émancipation politique, de son progrès socioéconomique, de son indépendance nationale. La langue du maître Français fut dispensée à une minorité d'indigène musulman pour lui permettre de devenir, non pas une élite cérébrale, mais le dévoué cerbère politique voué à administrer loyalement ses coreligionnaires analphabètes au profit de la puissance coloniale française.
Entre les mains des quelques lettrés soigneusement sélectionnés, le français constituait-il une arme pour lutter potentiellement contre le colonialisme ou une ceinture explosive ceinte autour du corps social du peuple algérien pour faire imploser concrètement sa langue arabe (kabyle), sa culture millénaire, ses racines arabo-berbères, sa religion musulmane ? Cette langue française permettait-elle de s'ouvrir au monde comme le proclamaient (encore aujourd'hui) les thuriféraires de la culture élitiste coloniale, ou travaillait-elle à la marginalisation et épuration de l'univers identitaire arabo-berbère, c'est-à-dire à la disparition de « soi-collectif » algérien, exécutée par une forme de suicide culturel ?
Une chose est sûre, de nombreux Algériens francophones et francophiles, pourfendeurs de l'arabisation de l'enseignement algérien, avec leur mentalité de colonisé expliquant leur amour immodéré de la langue et de la civilisation françaises, peuvent reprendre à leur compte cette proclamation de foi servilement déclamée par le poète malgache Jacques Rabemananjara en 1959 à propos de la langue française : «Nous nous sommes emparés d'elle, nous nous la sommes appropriée, au point de la revendiquer nôtre au même titre que ses détenteurs de droit divin». Voilà : la langue française est devenue leur langue sacrée, au point de vouloir sacrifier la langue maternelle et officielle du peuple algérien : l'arabe, pourtant réellement langue sacrée, étant la langue du Coran. Cette autre proclamation de foi française écrite par un auteur haïtien au début du XXe siècle peut également être appropriée par ces Algériens sectateurs de la francophonie : « Notre langue est française, françaises sont nos mœurs, nos coutumes, nos idées et, qu'on le veuille ou non, française est notre âme. ».
L'âme de ces Algériens culturellement néo-colonisés est incontestablement française, comme leur arme est la langue française, ce butin de guerre fièrement revendiqué comme faisant partie intégrante du patrimoine linguistique algérien. C'est avec cette arme française que ces hommes liges de la France, adoubés par l'Elysée, comptent tuer l'âme algérienne, assassiner la culture arabo-berbère, ressusciter la suprématie culturelle française. Assiéger l'Algérie avec leur cheval de Troie : le français, ce système linguistique pirate infiltré dans le logiciel intellectuel et éducatif de l'Algérien. S'introniser, au terme de leur odyssée néocoloniale, Rois de l'Algérie francisée. Franchisée. C'est-à-dire une Algérie devenue succursale de la France.
Comment un butin de guerre instrumentalisé par des francophiles, cette « cinquième colonne culturelle », pourrait devenir triomphalement le trophée de guerre de la France impérialiste contemporaine, si l'Algérie continue à souscrire à ce bulletin d'adhésion linguistique néocoloniale. À cette francophilie néocoloniale.
Ces Algériens francophiles sont des « invertis nationaux ». Au lieu d'épouser les valeurs culturelles, linguistiques, morales et politiques produites par le pays, ces élites algériennes n'éprouvent de l'amour culturelle qu'à l'endroit des Français, leurs frères de lit linguistique. Ces molles élites algériennes sont attirées uniquement par la France, magnifiée pour sa supposée puissance culturelle, sa virilité économique, son dynamisme politique. Elles aiment se donner politiquement aux Français, apparemment dotés d'organes institutionnels plus musclés. S'offrir moralement à eux. Se plier à leurs désirs sans se faire prier. Se dévouer à la culture française. Se vouer à la langue française, érigée en déité linguistique.
À notre époque décadente marquée par l'invasion de la théorie du genre, qui vise à entretenir une confusion entre les identités sexuelles ; caractérisée par le basculement des valeurs morales, on peut dire de ces Algériens francophiles « retournés » qu'ils sont « nationalement invertis ». C'est-à-dire ce sont des citoyens algériens qui, au lieu d'avoir de l'attachement patriotique à l'égard de leurs frères de sang, de nouer des relations naturelles d'amour nationale avec leurs compatriotes, manifestent l'inversion nationale (qui rime avec aversion nationale). Autrement dit, ils s'unissent exclusivement aux citoyens français dans une intimité culturelle contre-nature, s'offrent à eux dans une relation passive de soumission idéologique masochiste, d'allégeance politique traîtresse, de docilité intellectuelle renégate, au nom de valeurs prétendument universelles incarnées uniquement par la France « démocratique ». En résumé, ils aiment se faire fouetter par leur maître, les Français, idéalisés, vénérés et idolâtrés.
Un acteur français a écrit à propos de la soumission : « Moi, mon père, il me l'a transmise, la soumission. Mais avec un brin d'orgueil, un brin de noblesse ». Dans la même veine, l'Algérien francophile néo-colonisé pourrait écrire dans la langue de Molière qu'il révère : « Moi, la France, elle me l'a inoculée, la servitude. Mais avec condescendance, dédain qu'elle réserve à l'engeance servile de mon espèce ».


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