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«Il faudrait rappeler à Bruno Retailleau que le 21ème siècle est terminé»
Le politologue Paul Max Morin :
Publié dans La Nouvelle République le 23 - 03 - 2025

Comme nous l'avions annoncé dans notre édition du mercredi 19 mars, dans le cadre des rencontres de l'Université populaire de Sarcelles en banlieue parisienne le Conservatoire municipal Yitzhak Rabin de la ville avait abrité jeudi dernier en soirée une conférence ô combien enrichissante sur le thème « Algérie en héritage, Algérie en partage » animée magistralement par les trois générations d'historiens respectivement Benjamin Stora, président de la commission sur les questions mémorielles portant sur la colonisation et la Guerre d'Algérie, historien de renom de l'Algérie contemporaine, spécialiste du nationalisme algérien, à l'histoire des relations entre juifs et musulmans, de l'immigration maghrébine et auteur de plusieurs livres qui parlent sur ces sujets.La deuxième génération n'est autre que l'ancienne élève de Benjamin Stora en l'occurrence la sympathique Naïma Huber Yahi, historienne, chercheuse, autrice, directrice des affaires culturelles à Clichy-sous-bois et commissaire d'exposition, spécialiste des faits culturels de l'immigration maghrébine et également membre de la commission sur les questions mémorielles portant sur la colonisation et la Guerre d'Algérie.
Le hasard a voulu que Paul Max Morin était aussi presque un ancien élève mais de Mme Naïma Huber Yahi, le plus jeune orateur de cette table ronde donc issu de la troisième génération des historiens invités ce soir-là, est docteur en sciences politique. Il explore la matière dont l'histoire coloniale, les mémoires et les politiques contemporaines s'articulent pour avoir un impact sur des questions de la socialisation politique, la construction de l'identité, les cultures, la race, le racisme, l'immigration, le nationalisme et l'identité nationale.
Reçus chaleureusement par le maire de Sarcelles Patrick Haddad (PS) qui d'ailleurs était le chairman de cette rencontre culturelle et historique. En ouvrant les débats suite à une question posée par le maire Patrick Haddad relative au regain de tensions actuelles entre Paris et Alger en précisant « que ce n'était pas le thème qu'on va traiter aujourd'hui mais le contexte est celui-ci... » Benjamin Stora expliquera longuement devant l'assistance composée essentiellement de jeunes, vieux et vieilles mais aussi un nombre important d'élus(es).
« Vaste question qui nécessiterai un colloque de trois, voire quatre jours pour y répondre, c'est vrai que plus qu'on s'éloigne de la date de l'indépendance de l'Algérie de 1962 et paradoxalement plus qu'on se rapproche des positions de chacun au moment de la fin de cette guerre, c'est-à-dire en grosso modo entre les partisans de l'Algérie française et les adversaires, plus on s'éloigne de cette séquence particulière plus on a le sentiment dans le fond que la transmission s'est mal faite de cette histoire ne s'est pas accomplie c'est-à-dire que se qu'on a pu croire un moment que les passages des générations, le temps qu'il passe permettrait, disons, d'effacer les blessures du passé mais en fait le temps qui passe n'a rien effacé, c'est plutôt l'inverse, on a le sentiment que les jeunes générations considèrent cette histoire algérienne comme très lointaine... Mais en même temps pour ceux et celles qui ont vécus dans cette histoire, et j'insiste, ceux qui ont vécus, connus et subis dans cette histoire, elle est un marqueur d'identité pour eux qu'on le veuille ou non, c'est-à-dire ce n'est pas simplement une histoire comme toutes les autres histoires, c'est une histoire qui a fabriqué des identités particulières, des groupes de mémoires particuliers se sont promenés avec, c'est leurs propres histoires tous ces effets et autres certains ne sont pas effacés ça les a transmis, je parle de ceux qui on vécus cette période celles et ceux qui sont partie prenante.
ça représente quand même du lourd.
Effectivement, les immigrés algériens et leurs enfants et petits-enfants mais il y a aussi les harkis leurs enfants et petits- enfants, les Européens d'Algérie ce qu'on appelle les Pieds-noirs leurs enfants et petits-enfants, et il faut le dire aussi les soldats qui ont été en Algérie, un million et demi c'est beaucoup quand même aussi leurs enfants et petits-enfants qui ont été mêlés à cette histoire de près ou de loin, donc ça fait, à peu près plus de 6 millions de personnes en France 10 % de la population française qui avait un lien direct ou indirect avec l'Algérie. Donc ce problème ce n'est pas n'importe quelle histoire, il n'y a pas d'équivalent dans l'histoire coloniale... Comme tous les Français, je regarde les débats sur ce sujet et hier (mercredi NDLR ) je regardais le débat entre Jean-Michel Apathie et Alain Duhamel. Ce dernier lui disait : «Oui mais dans le fond, Jean-Michel, il y a toujours eu des massacres, des trucs dans toutes les colonisations c'est pareil»... Et Jean-Michel Apathie lui répondait non ce n'est pas pareil, l'Algérie c'est vraiment exceptionnel parce qu'il y a un fait qui s'est passé en Algérie qui n'est pas pareil ailleurs, c'est la colonisation du peuplement, c'est-à-dire l'arrivée d'une colonisation du peuplement, et ça c'est une colonisation considérable, c'est-à-dire un million de personnes et c'est pour ça qu'on ne peut pas comparer par exemple à l'Indochine par exemple, il n'y avait pas un million de Français qui vivait en Indochine il y avait seulement 50.000 de Français qui vivaient là-bas depuis six générations, c'est tout, ce n'est pas un million ou au Maroc il n'y avait pas un million d'Européens qui vivait dans ce pays ou en Tunisie.
Premièrement, c'est une différence énorme et puis la deuxième chose exceptionnelle, c'est le fait que l'Algérie n'était pas une colonie, c'était la France elle était rattachée à la France, c'était un département français avec les quatre départements plus le Sud et ça c'est une singularité qui n'a nul équivalent dans toute l'histoire coloniale.
Le Maroc c'était un protectorat tandis que l'Algérie c'était des départements français, donc quand l'indépendance d'Algérie arrive, et bien il y a le sentiment de la crise de la nation française qui tire d'une amputation qu'on enlève disons une partie de la nation, ce n'est pas le cas comme au Burkina Fasso, le Maroc, la Tunisie, le Mali... Ce n'était pas intégré dans la nation française, l'Algérie était intégrée avec ce paradoxe que tout le monde connait c'est que c'était à la fois dedans mais ce qui composait la majorité de la population n'avait pas le droit de la citoyenneté donc c'était une histoire délirante et complètement dingue c'est qu'à la fois totalement dans la France et totalement à l'extérieur des droits de la citoyenneté, et bien ça rend tout le monde fou cette histoire c'est ça qu'il faut comprendre. C'est-à-dire, il y a un côté d'exemplarité qu'on ne trouve nul part ailleurs... Tous ces paradoxes font qu'on a une situation où on a le sentiment que ça va se résoudre progressivement mais ça ne se résout pas parce que il faut prendre les choses de manière très patiente et très longue, tout le problème est là c'est-à-dire que ça ne peut pas se résoudre comme un épisode qu'on ouvrirai et qu'on refermerai en disant qu'on va faire un geste, un discours un moment et après c'est fini et on passe à autre chose. J'ai entendu quelque part : «Allez on va passer à la séquence d'après mais il n'y a pas de séquence d'après parce que quand c'est aussi profond et quand vous avez six générations qui ont vécus le temps colonial, c'est colossal vous ne pouvez pas résoudre et dénouer la contradiction même en deux ou trois générations ce n'est pas possible...
Donc quand commence un travail de mémoire il faut se rendre compte du fait que ce travail ne peut durer que sur des années ou il faut se réapproprier cette histoire, la comprendre dans sa complexité... Le problème, à mon sens, c'est qu'on a ouvert un chantier (c'est Emanuel Macron qui l'a ouvert avec moi) avec le rapport que j'ai fait et puis peut-être il s'est dit on va fermer le chantier c'est terminé on passe à autre chose ... On ne peut pas passer à autre choses parce que il y a tellement de problèmes à régler au cas par cas, homme par homme, famille par famille, village par village, région par région... C'est énorme, ça demande un travail d'archives, de cartographie, de reconnaissance... c'est un travail colossal dans des mises à dispositions des chercheurs des moyens considérables bien entendu et pas simplement par des coups d'éclats spectaculaires et médiatiques, mais c'est un travail de très longue haleine. Voila pourquoi c'est si difficile parce que on commence un travail de mémoire qui était réel et puis on a pensé, à un moment donné, que ce travail a été achevé et qu'il fallait faire autre chose et on a vu disons une clôture qui s'est effectuée notamment lorsque le président de la République lui-même a dit l'Algérie vit de cette histoire comme une rente mémorielle, il signifiait par là que nous avons beaucoup avancé et qu'eux n'ont pas avancé. Et moi, à ce moment-là, je me suis dis quel est le pays qui ne vit pas avec une rente mémorielle, tous les pays vivent avec ça, le 14 juillet, la révolution française, le front populaire, la Marseillaise, la libération, la résistance, la République, la commémoration, les drapeaux ce n'est pas une rente mémorielle ça ?
D'ailleurs on fabrique l'identité nationale avec ça. Si vous examinez le pays comme le Maroc, toutes les fêtes nationales c'est contre la France, la fête du Trône 1934, le manifeste de l'Istiklal 1944, la déposition du Sultan 1953, le retour du Sultan 1955 ce sont des fêtes marocaines qui sont toutes contre la France.
C'est terrible quand même, ils ont le droit de vivre la rente mémorielle et pourquoi on n'en parle jamais ? C'est ca le problème, mais quand les Algériens disent le 1er novembre 1954 ou le 5 juillet 1962, ça n'arrange personne la rente mémorielle, alors pourquoi là et non pas là ? Dans tous les pays colonisés les anniversaires, les commémorations, les fêtes, les héros à 90 %, c'est toujours dans l'histoire coloniale contre la France...
A suivre


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