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« J'ai réclamé la restitution des biens volés par la France, en particulier ceux de l'Emir Abdelkader… »
Exclusif : L'historien Benjamin Stora à LNR :
Publié dans La Nouvelle République le 20 - 05 - 2025

La série des interviews exclusives que le bureau de La Nouvelle République à Paris avait consacrées avec des historiens Français de renommée internationale pour commémorer les massacres du 8 mai 1945 à l'image de Gilles Manceron, Olivier Le Cour Grandmaison s'achève aujourd'hui avec un autre ténor et spécialiste de la Guerre d'Algérie, Benjamin Stora. L'imminent historien Benjamin Stora auteur faut-il le rappeler de ses derniers ouvrages ''L'arrivée de Constantine à Paris 1962-1972'' paru aux éditions Tallandier au mois de septembre 2023, ''Les Algériens en France'' en collaboration avec Nicolas Le Scanff (Une histoire de générations) qui parle sous forme de bande dessinée de l'histoire de l'immigration algérienne en France au XXe siècle paru aux éditions La découverte – Septembre 2024.
La Nouvelle République : 80 ans après, malgré la proposition de résolution portée par les députés Renaissance, Mme Sebaihi, sa collègue Julie Delph et vous-même réclamant la Reconnaissance et la condamnation du massacre du 17 octobre 61 ainsi que celui des massacres du 8 mai 1945 et l'inscription d'une journée de commémoration à l'agenda des journées officielles et cérémonies nationales en France, n'est toujours pas au point, du moins pour la Reconnaissance. Pourquoi selon vous ?
Benjamin Stora : « Il existe un décalage entre le travail des historiens, et la reconnaissance officielle par la France des massacres de mai-juin 1945. Pourtant, ces massacres sont bien documentés depuis de nombreuses années. En Algérie, il faut citer les travaux de Mahfoud Kaddache sur l'histoire du nationalisme algérien, ou la grande thèse soutenue par Mohamed El Korso. J'ai moi-même, dans ma thèse sur l'histoire de Messali Hadj, soutenue en 1978 sous la direction du professeur Ageron, décrit ces massacres qui ont duré plusieurs semaines à Sétif, Guelma, Kherrata. A l'époque, dès l'été 1945, les responsables du Parti du Peuple algérien (PPA) avaient avancé le chiffre de 45 000 morts. Tout le travail, depuis de nombreuses années, consiste à combler ce fossé entre ce savoir accumulé, et la prise de responsabilité, de reconnaissance politique par l'Etat français dans les massacres de 1945. C'est pourquoi, en tant qu'historien, j'ai soutenu cette démarche visant à l'inscription de cet événement sanglant dans l'agenda des journées officielles. J'espère que cela pourra se faire. »
Plusieurs élus français, dont des députés et sénateurs de la gauche et du centre, se sont déplacés jeudi dernier en Algérie pour commémorer les massacres du 8 mai 1945. Cette délégation est arrivée dans le pays, dans un contexte toujours très tendu entre Paris et Alger. Qu'en dites-vous de cette démarche ?
« Il est toujours important que se tissent les liens entre les élus français et la société algérienne. Malgré les aléas des crises politiques entre les deux pays. Les liens ne doivent pas se rompre, car il existe dans l'Hexagone une forte immigration algérienne, enracinée, existant en France depuis plus d'un siècle. Ainsi, à titre d'exemple, je dirai, qu'en 2026, cela fera un siècle qu'a été proclamé à Paris la naissance de l'Etoile nord africaine, première organisation à réclamer ouvertement l'indépendance de l'Algérie. Il faudrait, peut être, commémorer, ensemble, cet événement. »
Cette même journée a été célébrée en France pour marquer la fin de la Seconde Guerre mondiale à laquelle des soldats d'origine algérienne avaient fièrement contribué, marquant la victoire historique contre le nazisme et en aucun cas ça n'était reconnu par la France. Quel est votre avis là-dessus ?
« Là aussi, la participation des soldats algériens aux combats de la Seconde Guerre mondiale contre le nazisme, de la campagne d'Italie avec la terrible bataille de Monte Cassino jusqu'au débarquement de Provence en août 1944, est peu connue en France. Ce travail de connaissance peut se faire pas seulement sur le plan politique, mais également par le biais d'événements culturels. Ainsi, en 2005, le film « Indigènes » de Rachid Bouchareb a fait connaître à un large public en France cette histoire des soldats coloniaux. Il existe d'autres outils de communication. Par exemple, la bande dessinée principalement en direction de la jeunesse. Ma bande dessinée, sur les « Algériens en France » paru cette année en France a rencontré un large écho sur les nouvelles générations de jeunes français, et de franco-algériens. »
« La France et l'Algérie sont dans la reconnaissance mutuelle des massacres du 8 mai 1945 en Algérie et il est important que l'on soit là pour témoigner de cela, que l'on soit solidaires avec un peuple qui commémore un événement douloureux de son histoire », avait déclaré récemment au Figaro M. Laurent Lhardit député socialiste et président du groupe d'amitié France-Algérie à l'Assemblée nationale. Quelle est votre lecture par rapport à cette déclaration ?
« Je ne peux qu'encourager cette démarche visant à faire tomber les préjugés, les stéréotypes négatifs qui sont diffusés en France par des médias d'extrême-droite à longueur de journée sur des Chaînes de Télévision et de Radio en France. »
Le journaliste Jean-Michel Alphatie suspendu par RTL a levé le voile sur une vérité historique méconnue du grand public voire de l'éducation nationale en France. Que dites-vous de cette « interdiction » ?
« Il est vrai que la prise de position de Jean-Michel Apahie a levé le voile sur cette terrible réalité de la conquête. Plusieurs ouvrages sont parus récemment en France, celui d'Alain Ruscio et de Colette Zytnicki. Il faut aussi citer les publications de Hosni Kitouni, en particulier son livre, « Le désordre colonial. « L'Algérie à l'épreuve de la colonisation de peuplement ». Tout ce travail historique récent, ou ancien (je pense aux livres de Mostéfa Lacheraf, « L'Algérie. Nation et société », ou à mon livre, « L'Algérie coloniale » publié en 1991) montre bien comment les officiers français ont d'abord hésité, puis se sont lancés dans une conquête totale de l'Algérie en 1830. L'immense société algérienne est alors diversement visitée, étudiée, observée, pour se voir colonisée par l'envahisseur étranger. Ce dernier se fait parfois le héraut de la civilisation à apporter, expropriant de fait l'indigène devenu superflu.
Pendant ces années, se déroule alors une guerre sans merci d'une violence inouïe marquée par plusieurs atrocités commises par l'armée française qui pratique la « razzia » par les « colonnes infernales ».
La correspondance des officiers français, de Saint Arnaud à Lamoricière, de Cavaignac au duc d'Aumale, et la psychologie des écrits entre protagonistes offrent un point de vue terrible, sur ces personnages qui ne sont pas entrés dans la mémoire collective française sous un angle critique. Toute cette connaissance sur la conquête coloniale au 19e siècle ne pourra pas être toujours ignorée, car le désir de savoir est très grand dans les nouvelles générations, en France et en Algérie. »
Les objets, les archives pillées en Algérie, pendant la colonisation à ce jour, on n'a rien rendu à l'Algérie depuis 1830. C'est normal pour vous ?
Je suis intervenu dans les réunions des commissions mixtes, des historiens français et algériens, pour réclamer la restitution des biens volés, en particulier ceux de l'Emir Abdelkader. En vain. Il m'a été répondu qu'il fallait pour cela une loi de restitution. Ce travail, comme pour la reconnaissance officiel des exactions et des massacres coloniaux, doit se poursuivre, je l'espère. C'était mon intention, lorsque j'ai remis mon rapport au président de la République française, pour la reconnaissance des assassinats de Maurice Audin, d'Ali Boumendjel et Larbi Ben M'Hidi par l'Etat français. Ce qui a été fait. J'espère que cette activité mémorielle ne sera pas remise en cause par les nostalgiques de l'histoire coloniale s'ils arrivent un jour au pouvoir. »
Selon un quotidien américain en 2022, seuls 6 des 24 crânes restitués par Paris en juillet 2020 étaient clairement identifiés comme étant ceux de résistants tués au XIXe siècle par les troupes coloniales françaises , les autres apparemment ne le sont pas ou sont d'origine incertaine. Vous en dites quoi à cette publication ?
« Je n'ai pas travaillé sur cette question, et ne peux vous répondre précisément. Mais sur l'histoire des crânes, je vous recommande la lecture d'un très beau livre qui vient de paraître en France, « Le pain des Français » aux éditions Gallimard, de Xavier Le Clerc, qui est un dialogue imaginaire entre un écrivain et le crâne d'une fillette algérienne de 8 ans, décapitée en 1850, crâne entreposé au Musée de l'Homme à Paris.. La littérature aussi nous apprends comment entrer dans la compréhension de l'histoire. »
Pensez-vous que la relation entre Paris et Alger va s'améliorer dans pas longtemps ?
« C'est difficile de faire des pronostics, car chaque jour apporte son lot de révélations, de rebondissements de tous ordres. Il faut attendre, être patient. »
Nous vous donnons la parole pour conclure cette interview.
« J'ai commencé mon travail sur l'histoire de l'Algérie contemporaine en soutenant un mémoire de maîtrise à l'Université de Nanterre, en 1974, sous la direction de René Rémond... C'était, il y a un demi-siècle. Il y a eu depuis, d'autres publications, comme mon « Dictionnaire biographique des militants algériens » en 1985, jusqu'à la biographie de François Mitterrand pendant la Guerre d'Algérie, en passant par la réalisation de documentaires pour la télévision.
Cinquante ans aussi de voyages en Algérie, de rencontres avec des universitaires algériens, et je pense, en ce moment, tout particulièrement à mon ami récemment décédé, Abdelmadjid Merdaci, mais aussi à l'écrivain Rachid Mimouni que j'ai bien connu avant son décès en 1995, et au cinéaste Mahmoud Zemmouri, avec qui j'ai longuement échangé sur les rapports entre images de fiction et écriture de l'histoire. Cette réflexion est au centre de mon dernier livre (« Un historien face au torrent des images »). »
Interview réalisée à Paris


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