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Une symphonie culturelle en hommage à la création
À Saïda, femme entre les lignes et sur l'écran
Publié dans La Nouvelle République le 08 - 06 - 2025

« Qu'on écrive un roman ou un scénario, on organise des rencontres, on vit avec des personnages ; c'est le même plaisir, le même travail, on intensifie la vie. »1. Telle une abeille infatigable butinant mille et une fleurs dans les jardins luxuriants de l'imaginaire, le Festival national de la littérature et du cinéma de la femme, dans sa huitième édition, a su distiller à Saïda un nectar d'une rare finesse artistique.
Chaque rencontre, chaque projection, chaque lecture s'inscrivait dans une partition subtile, offrant un orchestre harmonieux où chaque note célébrait la créativité féminine. À la croisée des mots et des images, cette manifestation vibrante a rassemblé des figures illustres de la scène littéraire et cinématographique – des plumes engagées comme Yasmina Khadra et Maïssa Bey, des regards affûtés comme ceux de Merzak Allouache ou d'Ahmed Bedjaoui. Dirigé de main de maître par le maestro Karim Moulay Belkacem, ce rendez-vous annuel, désormais incontournable, rêve tout haut d'horizons internationaux.
Dans cette ville aux vents du Haut-Plateau, jalouse de ses eaux minérales et thermales, le festival s'élève comme une respiration précieuse, un souffle d'art au féminin mêlant engagement, émotion et intelligence. Il ne s'agit pas seulement de projeter des films ou de lire des textes, mais de convoquer les imaginaires, de questionner les regards, de tisser des ponts subtils entre générations, disciplines et territoires.
Quand le rideau s'ouvre, la parole s'élève
Au Théâtre Régional Sirat Boumediene, véritable cœur battant de Saïda, le festival a levé le rideau. Paré de lumières et d'émotions, ce temple du quatrième art a accueilli des invités de marque, en présence du wali de la wilaya de Saida, M. Amoumène Marmouri, et du représentant du ministre de la Culture, M. Ismaïl Ibrir. Pendant plusieurs jours, du 26 au 30 mai 2025, les murs ont vibré aux sons des voix féminines, aux échos des films en compétition, aux élans des lectures publiques, des tables rondes littéraires, des master classes et des rencontres passionnées avec le public.
Quand la parole éclaire, Khadra répond présent
Moment d'élévation, la conférence de Yasmina Khadra (Mohamed Moulessehoul), à la cinémathèque DouniaZad, a été un phare dans cette mer d'événements. Par un verbe clair et ciselé, il a rappelé que la littérature n'est pas une fin en soi, mais un levier : « Elle ne saurait être simple jouissance esthétique, mais doit être un levier de conscience, une manière de critiquer la réalité pour mieux la dépasser. » Avec la passion du conteur et la rigueur du penseur, il a évoqué la place centrale de la femme dans ses romans : personnages de combat, de lucidité, de tendresse intransigeante, non sans, comme à l'accoutumé, rendre un vibrant et émotionnel hommage à la Grande dame qu'était sa mère et qui l'avait, comme il a tenu à le dévoiler au public, inspiré pour son dernier roman, dans lequel il avait mis tous ses talents avérés, « Les Vertueux »... Lors de l'échange avec le public, l'auteur a également éclairé son silence littéraire sur l'Emir Abdelkader, qu'il rêve de faire vivre en roman, mais que l'absence de collaboration historique empêche, pour l'instant...
Voix de femmes, voix du cœur
À la Maison de la culture Mustapha Khalef, autre lieu d'émerveillement pour le public saidéen, les voix féminines ont vibré dans l'intimité des textes lus à voix haute. Zoubida Barhou, Ania Merazeg, Djigika Ibrahimi, Nadjat Rahmani — parmi d'autres — ont donné chair à leurs mots, accompagnées par la plume libre et intense de la célèbre écrivaine Maïssa Bey, modératrice et figure tutélaire de la parole féminine algérienne, ainsi que par le romancier et dramaturge saidéen Bouri Mustapha, révélation du monde du roman arabe et de la dramaturgie, détenteur du prix Katara du roman arabe et primé au concours « Doha Drama Award » dans la catégorie texte de théâtre pour son œuvre Souvenirs d'un temps à venir.
Dans un hommage vibrant à Frantz Fanon, la professeure Djigika Brahimi, de l'Université Mouloud Maameri, a rappelé la mission subversive et libératrice de la littérature. Lutter, penser, écrire : tel est le triptyque qui irrigue l'événement. Comme le disait Toni Morrison2 : « Si vous êtes libre, vous devez libérer quelqu'un d'autre. Si vous avez du pouvoir, alors votre tâche est d'autonomiser quelqu'un d'autre. »
Musique de films et mémoire sonore
L'art du son, quant à lui, s'est invité à la fête par la voix inspirée et la musique de Safy Boutella, compositeur de renom international, qui a dévoilé les arcanes de la bande originale du film Lalla Fatma N'Soumer. Sa master class fut une leçon d'art et de mémoire, où l'ancrage dans les traditions sonores s'est marié au souffle moderne du cinéma. Ce fut l'occasion d'un dialogue fécond sur les racines musicales comme vecteurs de narration cinématographique. En guise de conclusion, il a offert au public un arrangement musical chanté de raï typiquement saidéen, témoignant de son attachement profond à la culture locale.
Le cinéma en partage
Autre moment fort : la présentation en avant-première du film La Première Ligne de Merzak Allouache, suivie d'un échange sincère avec un public attentif. D'autres projections, toujours centrées sur la condition féminine, les transformations sociales ou les interrogations identitaires, ont jalonné les premiers jours du festival.Le grand critique cinématographique, professeur Ahmed Bedjaoui, fidèle au rendez-vous, a offert des lectures riches et sensibles des œuvres projetées, tout comme Maïssa Bey pour les écrivaines qu'elle avait présentées en modérant la table ronde les concernant. Tous deux ont insisté sur la nécessité de rapprocher littérature et cinéma pour éclairer les zones d'ombre de nos sociétés. Comme le disait Federico Fellini3 : « Le cinéma, c'est un rêve que l'on transforme en réalité.»
Une passerelle entre les générations
Les moments de partage n'ont pas manqué : ventes-dédicaces, débats universitaires, discussions informelles. Une large place fut donnée à la jeunesse, invitée à participer, à lire, à rêver. Le festival s'affirme comme une école vivante de création, un carrefour intergénérationnel où le verbe se transmet et se transforme.
Palmarès et clôture en musique
Après avoir longuement scruté les œuvres en lice, ausculté leur souffle esthétique et leur palpitation humaine, le jury, au terme de délibérations passionnées, a levé le voile sur deux créations d'exception. Il est des films que le temps engloutit dans ses sables, jusqu'à ce qu'une main passionnée les exhume avec délicatesse. Tel fut le geste de Nabil Djedouani, artisan de mémoire, qui, par un travail de restauration minutieux, a ravivé une flamme presque éteinte. Boualem Zid El Goudam, du regretté Moussa Haddad, ne se contente pas de retracer un itinéraire : il érige un miroir tendu vers notre passé commun, une passerelle entre l'oubli et la réminiscence. À ce titre, et en parfaite harmonie avec le commissaire du festival, M. Karim Moulay Belkacem, le jury avait décidé de lui offrir un hommage d'exception : un prix d'honneur, comme un acte de reconnaissance à l'endroit d'un film devenu balise dans l'archipel de notre patrimoine cinématographique. Offrir un prix, c'est tendre la main à une œuvre qui dérange les certitudes, qui bouscule le confort des regards et secoue les silences. Le soir de la clôture du festival, le choix du jury s'était arrêté sur un film d'une intensité discrète mais saisissante, une œuvre qui murmure au lieu de clamer, qui choisit la voie de la pudeur pour atteindre celle de la vérité. Sans artifice, Terre de vengeance d'Anis Djaad s'est imposé comme une lame douce mais pénétrante. Par sa sobriété narrative, la noblesse de son cadre visuel — signé Hamoudi Laggoune — et la profondeur muette de l'interprétation livrée par Samir El Hakim, le film ne cherche ni à séduire ni à provoquer. Il se contente d'être juste, sincère, nécessaire. Tel un miroir sans fard, il nous rappelle que le cinéma, loin d'être une simple féerie d'ombres projetées, peut aussi être un espace de lucidité, un lieu où la conscience s'éveille.
Palmarès officiel
Dans le bruissement feutré des applaudissements, le rideau est tombé sur cette édition avec l'élégance des grandes heures. Et, comme des étoiles épinglées à la nuit, les prix sont venus couronner les œuvres qui ont su faire vibrer les consciences et les cœurs :
– Prix d'honneur à titre posthume au regretté Moussa Haddad, pour Boualem Zid El Goudam : un hommage vibrant à un artisan de la mémoire, dont le regard continue de hanter l'écran comme un murmure d'éternité. – Khelkhal d'Or, premier prix de cette édition, attribué à Anis Djaad pour Terre de vengeance : film poignant où la douleur s'inscrit dans la poussière du réel, avec la retenue des tragédies anciennes.
– Prix de la Nouvelle remis à Hattab Hadjer Nour El-Hoda, pour Ailes de frêne : un texte d'une sensibilité rare, qui déploie la fragilité et la résilience féminines avec la grâce d'un vol suspendu entre cendre et lumière
Saïda, oasis vibrante au carrefour des arts et des voix féminines
Quand le rideau tombe sur cette huitième édition, l'écho des voix, des images et des idées continue de se répandre dans les ruelles de Saïda, telle une symphonie inachevée, une promesse suspendue entre mémoire et modernité, tradition et création. Ce festival national de la littérature et du cinéma de la femme s'est imposé comme une oasis féconde, où souffle un vent nouveau porté par l'intelligence, la beauté et l'espérance. Sous la baguette inspirée du Maestro Karim Moulay Belkacem, Saïda se métamorphose, le temps d'un rendez-vous, en un théâtre d'émancipation où la femme — dans toute sa richesse, sa complexité, sa liberté rayonnante — trouve une scène à sa mesure. Plus qu'un simple événement culturel, cette traversée artistique trace le sillon d'un projet ambitieux : faire de cette ville un carrefour culturel, un phare dans le Maghreb, et au-delà.
Saïda, riche de son patrimoine, de ses talents en germe et de son tissu associatif bouillonnant, n'attend qu'un souffle pérenne, une vision qui embrasse le futur avec audace. Pourquoi ne pas rêver qu'elle devienne à l'image de Carthage ou Ouagadougou, un pôle incontournable d'échanges, une biennale de la création féminine, une université d'été des arts ou un réseau de résidences croisées pour écrivaines et cinéastes du monde arabe, d'Afrique et d'ailleurs ? L'avenir appartient aux lieux qui osent rêver à hauteur d'humanité. À Saïda, ce rêve est déjà en marche, inscrit dans les regards complices, projeté sur les écrans, murmuré entre les lignes. Il ne demande qu'à s'amplifier, porté par la force d'une femme plurielle, source d'inspiration et de renouveau.Il suffit donc d'oser le dire, de le rêver, et de le faire : « Fais de ta vie un rêve, et d'un rêve, une réalité. »4
Par Khelfaoui Benaoumeur
MCA-Université Kasdi Merbah Ouargla
Notes :
1- François Truffaut (1932-1984) cinéaste français.
2- Toni Morrison (1931-2019) romancière, essayiste, critique littéraire, dramaturge, librettiste, professeure de littérature et directrice de publication américaine
3- Federico Fellini (1920-1993) réalisateur, scénariste de cinéma et de bande dessinée, caricaturiste, acteur et écrivain italien
4-Antoine de Saint-Exupéry (1900-1944) écrivain, poète, aviateur et reporter français


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