Quand l'ignorance du culte authentique se conjugue avec le culte de l'ignorance, cela révèle que la raison perd sa foi, la foi déraisonne. L'école perd ses repères, les enfants ignorent leurs pères, réduits à se former qu'au contact de leurs paires, cette génération de repaire de vipères sans foi ni loi, sinon celles de l'inconscience et de la déviance propres à cette catégorie d'âge. De nos jours, notamment en Algérie, la famille ne remplit plus sa mission éducative, l'école, sa vocation pédagogique. Ironie de l'histoire, à l'époque où, dans la majorité des pays, le ministère de tutelle se nommait ministère de l'Instruction, l'école prodiguait une réelle éducation ; depuis qu'il a été baptisé ministère de l'Education, l'école se cantonne à enseigner exclusivement l'instruction. De surcroît, une instruction scolaire idéologique et réactionnaire. Une instruction qu'on peut qualifier d'intoxication mentale. Elle gave l'élève de connaissances inutilisables, le plie à l'ennui et à l'abrutissement. De même, paradoxalement, l'Etat s'est démis de cette mission éducative des enfants pour la déléguer exclusivement à la famille au moment où celle-ci est en pleine implosion, décomposition, et recomposition mais selon les canons libertaires et libertins du modèle sociétale amorale capitaliste. Force est de constater que toutes les instances structurantes chargées de la construction de l'identité personnelle et de la socialisation de l'enfant sont en crise. Excepté, pour la situation de Algérie, l'institution religieuse islamique, jamais autant prégnante et conquérante, notamment au moyen de ses mosquées, devenues uniques lieux archaïques tout à la fois d'instruction, d'éducation, de socialisation et de politisation. Aujourd'hui, en Algérie, la construction d'une mosquée s'érige souvent sur la destruction scientifique de l'école, l'abrutissement de l'élève, la pulvérisation de la famille. L'école est devenue l'antichambre de la mosquée. D'aucuns diraient la chambre à coucher de l'islamisme où s'opère impunément le viol de l'esprit des enfants. La mosquée a annexé l'école, a désaxé la famille, rendues toutes les deux inopérantes et caduques en matière éducative. La parole de l'imam prime celle du père, celle de l'enseignant, figures parentale et scolaire destituées de leurs prérogatives éducatives. Quand l'ignorance devient une vertu, l'idiotisme s'inculque à l'école La mosquée a dévoyé la mission pédagogique de l'école algérienne. Elle lui a imprimé une orientation scolaire où l'enseignement du Livre unique sacré a désacralisé tous les livres du Savoir. Les connaissances scientifiques ne sont plus sacrées. Les savoirs ne sont plus consacrés. La Mosquée, les a massacrés. Dès le début de notre siècle, Lila Aït Larbi s'alarmait de la descendante aux enfers du système éducatif algérien. Elle écrit le 9 août 2000 dans le journal Le Matin : « La société algérienne a troqué la pédagogie contre l'idéologie, l'avenir contre le passé, la liberté d'expression et la richesse linguistique contre la langue de bois, le civisme contre le fanatisme, la réflexion contre l'apprentissage… L'échec de l'école est celui de la société, du pays tout entier, de la politique qui refuse de se projeter dans l'avenir et qui regarde le passé comme seul repère possible ». Une chose est sûre, l'ancien temps de la soif de connaissance longtemps béni, de la fertilité culturelle algérienne raffinée, a été définitivement banni, excommunié de la science didactique et pédagogique, remplacé par la tentaculaire et totalitaire théologie islamique. Cette théologie islamique infiltrée dans l'enseignement sous la dénomination amphigourique de « sciences islamiques », ou plutôt « sciences autistiques », tant l'idéologie islamique, en particulier sa version salafiste, s'apparente à l'autisme, ce trouble neuro-développemental affectant les interactions sociales réciproques, la communication ; caractérisé par un comportement compulsif obsessionnel, restreint, répétitif et stéréotypé ; marqué par un mode de pensée détachée de la réalité et une prédominance de la vie intérieure illustrée par le repliement sur soi-même, induisant une intolérance exacerbée aux changements. Quand l'ignorance devient une vertu, l'idiotisme s'inculque à l'école. Aujourd'hui, la mer intellectuelle algérienne a été asséchée, tarie par l'envahissement du désert de l'ignorance de l'Orient. Le Sahara algérien se chargeant d'irriguer en revenus sa population prosternée spectatrice de sa morne existence, grâce à la manne pétrolière socialement corruptrice. L'Algérien contemporain, au lieu de s'instruire intellectuellement en vue de développer son pays, préfère contempler passivement le ciel pour l'implorer d'exaucer ses vœux pieux d'une vie ascétique fondée sur la dévotion, la prière, la mortification, le refus d'affronter le monde et ses difficultés (caractéristique de l'inadaptation à la vie sociale), le goût maladif à considérer le monde et la vie comme un mal nécessaire, une vallée de larmes gorgées de souffrances déversées par Dieu pour tremper la foi des vrais croyants, fortifier leurs âmes. La terre lui sert juste de surface de génuflexion. Mais jamais comme espace de fertilisation de la réflexion. Ni encore moins de moyen pour s'adonner à de laborieuses productions industrielles et agricoles. À quoi bon travailler, du moins en Algérie, pour développer le pays ? Logique algérienne : détruire le pays est une œuvre de construction et construire le pays équivaut à le détruire C'est devenu un spécialiste de l'importation de ses subsistances et un professionnel de l'exportation de sa vie vers les pays mécréants. En effet, l'Algérien se nourrit de la production des autres pays développés, et, quand il daigne travailler, il alimente la production des autres pays par la vente de sa force de travail aux patrons étrangers. C'est à perdre son latin, ou plutôt son arabe dardja ou son kabyle. Au pays, il aime tenir les murs, à l'étranger il est fier de se murer derrière l'usine à trimer pour son ancien colon. Nos pères révolutionnaires libérateurs doivent se retourner dans leurs tombes. Hier, ils ont libéré l'Algérie de lOccupation. Aujourd'hui, leurs enfants n'aspirent à aucune occupation. Ni laborieuse. Ni intellectuelle. Ni culturelle. Ils préfèrent occuper la mosquée. L'envahir, l'exploiter à des fins réactionnaires, sectaires. La mosquée leur sert de lieu de production : production de l'ignorance et de vacuités existentielles. Pendant que l'Algérien s'adonne à sa principale occupation religieuse opérée dans la mosquée, le pays, lui, est livré aux travailleurs étrangers, notamment chinois et africains. L'Algérien préfère transformer sa vie en champ de ruines, plutôt que de produire sa vie par le travail des champs, dans les chantiers. Les chants du muezzin suffisent à remplir ses occupations, à combler sa médiocre existence. À croire qu'il a inversé les valeurs. L'école, ou l'annexe de la mosquée, lui a inculqué deux notions antinomiques. Destruction et construction. L'Algérien semble avoir confondu les deux termes dans son apprentissage schizophrénique scolaire dispensé par l'enseignement islamique. Pour l'Algérien contemporain à la personnalité borderline et au comportement bordélique, faire œuvre de destruction est synonyme de construction. Et toute construction se bâtit par la destruction. Dans la petite cervelle de l'Algérien contemporain, façonnée par l'école islamisée dispensatrice de l'ignorance, cette vertu islamique fondamentale, les deux opérations se valent : elles sont équivalentes. Détruire le pays est une œuvre de construction. Construire le pays équivaut à le détruire (par l'abstentionnisme professionnel, ce refus de participer au développement social du pays adopté par la majorité de la population adulte ; par la prévarication administrative opérée a différents échelons des institutions du système par les rares « travailleurs » algériens pourvus d'une conscience professionnelle ingénieusement prévaricatrice). Belle logique schizophrénique infligée par l'école de l'ignorance, qui dispense le vice enrobé dans une vertueuse pédagogie islamisée. La raison raisonnable raisonnante est dissonante en Algérie. La logique dissolvante islamique, source de dissonance cognitive, a fait perdre à l'Algérien son harmonieux entendement. Cette logique islamique dissonante, intellectuellement dissolvante, est responsable du défaut d'investissement dans la production, de l'absence de progrès technologique, en un mot de développement économique.