Le Prix Nobel de littérature 2025 a été attribué à l'écrivain hongrois László Krasznahorkai, a annoncé l'Académie suédoise. Après avoir honoré la Sud-Coréenne Han Kang en 2024, la plus prestigieuse distinction littéraire revient cette année en Europe. Dans un communiqué fidèle à sa sobriété, l'Académie a salué l'auteur « pour son œuvre puissante et visionnaire qui, au cœur de la terreur apocalyptique, réaffirme le pouvoir de l'art ». Krasznahorkai devient ainsi le deuxième écrivain hongrois couronné par le Nobel, après Imre Kertész en 2002. Un écrivain habité par la littérature Né le 5 janvier 1954 à Gyula, dans l'est de la Hongrie, László Krasznahorkai grandit dans une famille d'intellectuels – son père est avocat, sa mère fonctionnaire. Après des études de droit, il se tourne très vite vers les lettres et consacre sa vie à l'écriture. En 1983, il soutient une thèse consacrée à Sándor Márai, autre grande figure des lettres hongroises. Deux ans plus tard, il publie son premier roman, Tango de Satan, sombre fresque d'un village en déliquescence. L'ouvrage sera adapté au cinéma en 1994 par Béla Tarr, avec un scénario signé par l'auteur lui-même. Krasznahorkai connaît ensuite une reconnaissance internationale avec La mélancolie de la résistance (1989), également adaptée par Béla Tarr en 2000 sous le titre Les Harmonies Werckmeister. Parmi ses autres œuvres majeures, on retrouve Guerre & Guerre (1999), Seiobo est descendue sur terre (2008), Le Dernier Loup (2009) et, plus récemment, Petits travaux pour un palais (2018, trad. française : 2024, Cambourakis). Il a également été honoré du Man Booker International Prize en 2015 pour l'ensemble de son œuvre. Les pronostics ne s'étaient pas trompés Cette année, les bookmakers avaient vu juste : avec une cote de 10/1 chez Ladbrokes, Krasznahorkai figurait parmi les favoris. D'autres grands noms étaient également pressentis, comme Haruki Murakami, Mircea Cărtărescu, Anne Carson, Can Xue ou encore Gerald Murnane. Du côté français, les noms de Pierre Michon et Michel Houellebecq reviennent, année après année, dans les conversations autour du Nobel. Une distinction plus que centenaire Créé en 1901 conformément au testament du chimiste Alfred Nobel, le Prix Nobel de Littérature récompense chaque année un écrivain ou une écrivaine dont l'œuvre a « fait la preuve d'un puissant idéal ». Ce prix s'accompagne d'une médaille d'or, d'un diplôme et d'une dotation de 11 millions de couronnes suédoises, soit environ 1 million d'euros. Depuis sa création, il a été attribué 117 fois, distinguant 122 auteurs de près de 40 pays. Les écrivains anglophones y sont les plus nombreux (31 lauréats), tandis que la France détient le record avec 16 prix, de Sully Prudhomme (1901) à Annie Ernaux (2022). En revanche, les auteurs arabes restent très peu représentés dans l'histoire du Nobel de Littérature. Seul l'Egyptien Naguib Mahfouz, couronné en 1988, a reçu cette distinction, devenant ainsi le premier — et jusqu'à présent le seul — écrivain du monde arabe à être honoré. Cette rareté témoigne à la fois d'un manque de reconnaissance internationale de la littérature arabe et de la persistance d'un certain déséquilibre géographique dans les choix de l'Académie suédoise. Un prix qui regarde encore beaucoup vers l'Europe Si le Nobel de Littérature se veut universel, il reste encore marqué par une forte domination européenne : près de trois quarts des lauréats viennent du Vieux Continent. Seules 18 femmes ont été distinguées depuis l'origine du prix, un déséquilibre souvent pointé du doigt. Toutefois, ces dernières années montrent un frémissement : sur les 20 dernières éditions, on compte 8 femmes et 10 auteurs non-européens. Krasznahorkai succède ainsi à Han Kang (2024) et Jon Fosse (2023), inscrivant son nom dans une lignée prestigieuse où figurent Rudyard Kipling, Selma Lagerlöf, George Bernard Shaw, Thomas Mann, Hermann Hesse, Ernest Hemingway, Albert Camus, Pablo Neruda, Gabriel García Márquez, Wole Soyinka, Toni Morrison ou encore Bob Dylan.