Cela fait sept années que Mustapha Nedjar, comédien de la troupe théâtrale de Sidi Bel Abbès nous a quittés, terrassé par une crise cardiaque le 19 février 2002. Il a préféré partir en retraite anticipée avant même d'atteindre l'âge du départ parce que, après la disparition de Kateb Yacine l'ambiance n'était plus la même, et ceux qui lui ont succédé n'étaient pas en mesure de gérer cette institution sur les plans culturel et administratif. D'ailleurs, de son temps Yacine disait : «Je ne suis pas un directeur administrativement parlant, je ne sais même pas comment rédiger une demande.» Donc, pour cette tâche, il a désigné un administrateur. Il a été enterre dans l'anonymat le plus total, sans crier gare, tout en laissant derrière lui un riche parcours artistique, que seuls ceux qui le connaissent lui reconnaissent. Mustapha Nedjar a vu le jour le 25 janvier 1942 à Melika (oasis) un village du Mzab dans la wilaya de Ghardaïa. Il a touché à tout, avant de rejoindre les planches. Il a travaillé à la RTA en qualité de comédien, tout en campant des petits rôles radiophoniques. Il a interprété pour la première fois en 1959 une pièce qui s'intitule Le bandit masqué ensuite, durant les années 64-65, il rejoint l'école de Ben Aknoun, où il acquiert ses premières connaissances sur l'art dramatique. Puis, un jour, un grand homme des planches de l'époque le découvre et lui propose de rejoindre la troupe Théâtrale indépendante (TT.) que dirigeait Hassan El-Hassani dit (Bou Begra). A cette troupe, Nedjar a vécu de grands moments de sa carrière artistique où il s'est épanoui, dans quelque-unes de ses pièces historique qui s'intitulent Ti goul ou ti goul pas, et encore dans Si Belgacem el Bourjoizi du même auteur, sans omettre aussi Oum ethouare du regretté Mahboub Stambouli, dramaturge, auteur et compositeur. Avec cette troupe, Nedjar a effectué une tournée nationale et partout où elle se produisait, elle était largement applaudie. C'est de là que Mustapha est devenu l'élève de Bou Begra ; d'ailleurs il lui arrivait de l'imiter. Avec cette dernière, il est resté de 1969 jusqu'en 1972, date à laquelle il a quitté le TTP.pour rejoindre par l'intermédiaire de Aziz Degga, comédien et humoriste la fameuse troupe théâtrale que dirigeait Kateb Yacine, à savoir «Le théâtre de la mer», devenu par la suite «L'action culturelle des travailleurs» sous la tutelle du ministère du Travail et de la Protection sociale de l'époque, en l'occurrence Maâzouzi Mohamed mais également grâce à Ali Zaâmoum qui était directeur de la formation professionnelle, chargé de l'émigration. Depuis qu'il a rejoint cette troupe, Mustapha a pris part à la distribution de toute l'?uvre orale de son auteur à commencer par Mohamed prends ta valise et puis toutes les autres pièces dont il a toujours été à la hauteur dans le campement de son personnage au pluriel, à titre d'exemple le personnage du rabin et Moshé Dayan et autres dans Palestine trahie, le muft, le caïd dans Mohamed prends ta valise, le sultan dans La poudre d'intelligence etc. Il faut dire qu'à cette époque, la troupe jouait jusqu'à deux représentations par jour dans deux endroits différents et c'est pour cette raison que tous les comédiens sont constamment sur le terrain en guise de militants que ce soit dans les usines, devant les stagiaires de la formation professionnelle, les universités et même dans les douars et ce, à travers beaucoup de villes ainsi que de villages d'Algérie. Après son départ forcé en 1978 vers la ville de Sidi Bel Abbés dans l'Ouest algérien, la troupe avait repris toute l'œuvre de Yacine, et toujours avec succès escompté à chacun de leurs passages sur scène. Nedjar a pris part à d'autres montages proposés par de jeunes auteurs tel que Mohamed Bakhti dans Anti ouana , Ya ben aami wine, «El- djelssa marfouaa, toujours avec succès. Il a même interprété un long texte en monologue d'une adaptation faite par Malek Eddine Kateb .d'un auteur brésilien intitulé «Allal danger». Nedjar n'est pas uniquement comédien des planches, il est aussi acteur de cinéma. A ce titre, il a été distribué dans, notamment, «Ali au pays des mirages», «Le moulin de monsieur Fabre» ainsi dans «Bouaamama» ou «Tlemcen passé et présent». En dépit de son riche parcours et son engagement corps et âme dans la plupart des oeuvres de la troupe de Kateb, Nedjar est resté loin des feux de la rampe. En quittant, Sidi Bel Abbes, il est retourné dans son village de Melika où il a mis sur pied une association culturelle qui porte le nom d'une héroïne nationale, en l'occurrence «Thin Hinan la reine du désert». Sans atteindre son objectif, il a rendu l'âme le 19 février 2002 à l'âge de 60 ans. Il a été enterré dans le cimetière de ses ancêtres.