Nombreux sont ces artistes qui souffrent dans l'Algérie d'aujourd'hui de l'oubli malgré leur riche parcours. Une situation subie dans une colère et une déception impuissantes. Exemple de ces artistes, Mohamed Slim, de son vrai nom Adda Dahmani, 71 ans, qui après une longue carrière dans la chanson et le théâtre entamée au début des années 1950 se retrouve avec une retraite de 5000 DA/mois. « J'ai commencé à chanter dans les scouts musulmans groupe El Falah à Sidi Abderrahmane à Alger. C'est durant cette période que j'ai connu Mahfoud Kaddache, un des responsables des scouts. En 1951, je rentre dans la troupe musicale Ouarda Beidha sous la direction de Mustapha Sahnoune. En 1952, je suis passé à l'émission musicale devenue, après l'indépendance, Alhan oua chabab. A l'issue de cette expérience, j'ai été sélectionné avec d'autres artistes comme El Hachemi Guerouabi, Mohamed Lamari et Mohamed Zerbout, pour entamer ma carrière de chanteur », relate Mohamed Slim. II a intégré ensuite la radio. En ces lieux, il rencontre Mahboub Bati qui lui compose la chanson Bent El Djazaïr. II l'aide aussi à enregistrer en 1959 en France quatre disques 45 tours comprenant deux genres de la chanson algérienne, à savoir le chaâbi et l'oranais ainsi que le moderne. Après l'indépendance, il enregistre entre autres la chanson Ikhouani la tensaou echouhada (texte de Moufdi Zakaria, musique de Abderrahmane Aziz), puis entre dans la Troupe de théâtre populaire (TTP). Une troupe théâtrale animée par Hassan El Hassani. « Cette troupe a été dissoute en 1974 faute de moyens financiers. Ainsi, en 1975, je suis admis dans la troupe théâtrale de Kateb Yacine, Action culturelle des travailleurs (ACT) à Alger. J'y ai activé quatre ans, puis Kateb Yacine est nommé directeur du théâtre régional de Sidi Bel Abbès. II quitte ainsi Alger et nous l'avons suivi à Sidi Bel Abbès. J'y ai travaillé 5 ans. J'ai quitté la troupe en 1980 pour revenir à Alger », relève notre interlocuteur. « Avec Kateb Yacine, nous avons fait des tournées à l'intérieur et à l'extérieur du pays », se souvient-il. De 1980 à 1992, il se contente de concerts. Depuis 1992 à ce jour, « je fais des clips qui ne sont jamais diffusés par la télévision algérienne pour des raisons que j'ignore », constate l'artiste. Et d'ajouter : « Le ministère de la Culture a honoré, récompensé et rendu hommage à plusieurs artistes. En parallèle, on m'oublie. C'est ce qui me fait mal. Ce n'est pas l'argent qui m'intéresse mais la reconnaissance. Sachant que j'ai près de 60 ans de carrière, l'oubli me fait souffrir. » Cela dit, Mohamed Slim continue à travailler comme il peut. Ainsi, il vient de confectionner deux albums comprenant chacun six chansons et deux clips avec ses moyens. II cherche un éditeur pour les faire sortir.