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La foi buissonnière
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 18 - 08 - 2010

En choisissant de se battre pour obtenir un nouveau statut administratif à leur ville, les habitants pensaient gagner en termes de développement économique et social. La lutte a été rude. Dans toutes les chaumières, des plans de bataille s'échafaudaient.
Les lettres aux dirigeants du pays étaient envoyées en nombre et à un rythme soutenus. Tous les élus étaient au front. Les enfants du «pays» qui ont réussi dans la capitale et les grandes villes, étaient mis à contribution. La ville ne pouvait rater l'opportunité de se hisser au rang supérieur des circonscriptions administratives. Plus de vingt ans après l'indépendance, elle est restée une petite cité urbaine, mais vivant au rythme de la campagne qui la couvait et lui servait de véritable écrin. Une campagne dynamique et prodigue qui l'approvisionnait généreusement et lui assurait l'envieuse renommée d'une ville où la vie n'est pas chère.
La population dans son écrasante majorité est originaire des tribus qui ceinturent la ville, elle se pliait au magistère moral de deux grands saints dont les représentants attitrés, selon la tradition des lieux, réglaient la plupart des différents. La solidarité y était concrète et l'entraide permanente, par l'entremise des grandes familles et des notables.
Avant même que la gouvernance moderne ne mette à l'honneur le concept de proximité, la gestion locale le pratiquait presque instinctivement. Tous les résidants étaient connus et les agents communaux qui ont hérité de l'appellation « garde champêtre » étaient en mesure de répondre à la majorité des doléances administratives et parfois de livrer à domicile les documents demandés.
Les capacités de chacun, comme ses manques, étaient aisément estimés et il n'y avait nul besoin de réunir des preuves pour exiger une contribution au fonctionnement des services communs ou accorder le bénéfice d'un concours de l'Etat.
Une équité spontanée découlait normalement d'une transparence de fait. La simplicité de la vie nourrissait la convivialité et maintenait une certaine harmonie dans la vie quotidienne. La société n'était, évidemment, pas à l'abri d'un aléa, mais elle était armée et suffisamment homogène pour prendre la mesure de tout incident, situer rapidement les responsabilités et en tirer toutes les conséquences.
Le partage de toutes les données sociales flattait l'ego de chacun, aiguisait sa conscience et permettait de revenir à l'équilibre sans trop de mal, après chaque perturbation. Mais cette sérénité collective n'allait pas résister à l'épreuve de la promotion politique dans sa traduction administrative.
La ville est organisée le long de son principal boulevard qui relie les deux portes Est et Ouest et n'est interrompu que par deux jolies placettes, chacune agrémentée, en son centre, d'un Kiosque à musique. Comme bâtiments de belle architecture, elle ne possède que deux constructions. Les nouvelles structures administratives en prennent possession et procèdent à des aménagements qui les défigurent complètement.
Les autres services, vont squatter tout lieu inoccupé. Les extensions urgentes et anarchiques engorgent la ville et finissent par la dénaturer. Par ailleurs les cadres mutés ou recrutés pour les besoins des nouvelles compétences administratives et de gestion locale vont réquisitionner, par nécessité de service, toute nouvelle réalisation.
Très vite, la mue administrative va enlever à la population tout contrôle sur son espace. Plus encore, dans la logique des choses, la population, va vite, perdre la maitrise de sa destinée. Un transfert de compétences s'opère au profit des nouvelles « directions » dotées de techniciens et d'experts et agissant selon des procédures objectives. Elles vont retirer les « choix » à leurs destinataires pour les rationnaliser. L'administration fait froidement face, dans toute son omnipotence, à ses administrés et instaure l'anonymat garant de son impartialité.
Hier encore, acteurs de leur vie et producteurs de leurs liens sociaux, les habitants de la cité deviennent, par la grâce d'une modernisation voulue, des usagers de services publics conçus ailleurs et dispensés selon des normes désormais « impersonnelles ». Ce n'est pas encore la déception , mais le désenchantement commence à faire son œuvre. Le tout premier - « premier responsable » trouve le moyen de faire « passer » les dommages du changement en caressant la ville dans le sens de ses faiblesses, il s'occupe quasi- exclusivement de l'équipe locale de Football. Les jeunes sont ravis et rêvent d'une « sélection » et les plus âgés sont anesthésiés par la nostalgie. Ses deux ou trois successeurs sont happés par la violence aveugle qui a frappé le pays et particulièrement cette bourgade à peine admise dans sa nouvelle ambition. Leurs efforts sont neutralisés par l'obsession sécuritaire, qui compromet à jamais toute évaluation objective de leur passage. La ville va, bien sûr, connaître un responsable qui va prendre sur lui de rattraper le retard accumulé dans tous les domaines et rendre justice à une population très éprouvée. Mais avant l'arrivée de ce bon père de famille, la cité va subir l'humiliation de son prédécesseur qui ne semblait pas avoir été investi d'une lourde mission mais d'une concession d'exploitation.
Celui-ci s'entoure d'une véritable faune qui écume les bas fonds et profite ouvertement des avantages qui lui confère sa haute fréquentation. Il installe de nouvelles pratiques qui se moquent de toutes les valeurs qui fondent la vie en société et érige l'incompétence, la gabegie, l'ignorance et la concussion comme seuls moyens de faire son chemin dans la vie de la cité. Il se taille a peu de frais l'image d'un jouisseur impie.
Cette situation finit par inquiéter les rares membres de sa sombre cour qui craignent pour leur avenir, étant natifs des lieux. Ils savent que tout a une fin ; que le responsable sera muté un jour ou l'autre, et qu'eux resteront liés, à jamais, à son souvenir. Alors, ils lui conseillent d'entreprendre une action marquante, à même de balancer dans l'imaginaire populaire la réprobation quasi-unanime de ses agissements.
Et, de nos jours, la voie la plus rapide et la moins coûteuse pour atteindre les cœurs, est la voie de la religion. La foi feinte et la dévotion excessive suffisent souvent à couvrir toutes les inconduites.
Il fut convenu, donc, que le responsable se rende à la prière du vendredi, mais sans ostentation aucune. Une pudeur bien campée est plus payante qu'une exhibition suspecte. La rumeur fera le reste, surtout quand cette rumeur est un peu aidée. Le responsable se présente à la mosquée au tout dernier moment et s'assied au dernier rang contre le mur. Il n'est accompagné que d'une seule personne qui en toute discrétion s'occupe de ses chaussures. Cette simplicité se veut un signe d'humilité que des regards furtifs semblent apprécier.
A la fin de la prière, le responsable avance avec la foule vers la porte de sortie et cherche ses chaussures à l'instar des autres fidèles , mais ses efforts demeurent vains. Il faut admettre que la disparition de ses beaux souliers a très bien été orchestrée. Et pour préserver toute sa force à la mise en scène, ses auteurs ont compté sur l'effet de surprise et n'ont pas tout révélé à leur chef. Les citoyens présents, flattés d'avoir accompli leur devoir religieux aux côtés de la plus haute personnalité de la ville, expriment très vite leur dépit et condamnent bruyamment le « profanateur » à toutes les gémonies. Le geyser de la rumeur venait de fuser. La nouvelle fit le tour de la ville à la vitesse de la lumière. Mais ce qui intrigue le quidam ce n'est guère la disparition des chaussures, mais le fait que « la personnalité » fasse montre d'une piété dont elle n'a jamais été soupçonnée. « Certaines suppositions ne sont que des péchés ». Cependant, le bon peuple n'a pas été dupe très longtemps, car, depuis la nuit coloniale, il connait l'adage qui affirme : que « la prière des Caïds c'est le Vendredi et l'Aïd ».


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