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La jeune fille et les singes
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 12 - 10 - 2010

Il était une fois une jeune fille qui, plusieurs fois par jour, s'installait devant le miroir et lui demandait : « O miroir ! Dis-moi ! Comment me trouves-tu ? » Et le miroir, devinant les paroles qu'attendait de lui notre héroïne, chargeait sa voix de tristesse et répondait :
« Oh ! que c'est pénible, que c'est épouvantable et attristant que je sois condamné à te répondre avec des mots usés, des mots souillés par des millions de bouches, puant la salive,
des mots vermoulus et poussiéreux, qui sonnent creux ! Ah si j'avais des pattes ou des ailes ! J'irais alors parcourir le monde à la recherche de mots nouveaux qui n'ont jamais été prononcés jusqu'à maintenant, jolis et parfumés comme des roses, pour décrire ce que je vois lorsque
tu t'assieds en face de moi. »
Ayant dit ces paroles, le miroir se taisait et poussait plusieurs soupirs, tristes et longs, pour faire comprendre à la jeune fille combien il était désolé d'être obligé d'employer les mots de tous les jours pour répondre à sa question. Après quoi, remplissant sa voix d'émerveillement, il s'exclamait : « Tu es ravissante ! Ah ! si j'étais un mâle, je t'aurais déjà montré combien tu es belle, combien tu es désirable ! J'aurais mis en morceaux cette robe rouge qui habille ton corps, j'aurais défait tes cheveux noirs et soyeux, et j'aurais couvert ta chair de baisers et de morsures ! Avec mes dents, j'aurais brisé toutes les chaînes qui t'entravent, et délivrée, et frémissante, tu aurais crié comme une folle les paroles que pousse une femme libre quand elle est prisonnière entre les bras d'un mâle : « Tu es mon maître et je suis ton esclave ! Maltraite-moi ! C'est un ordre ! Nous aimons être maltraitées ainsi ! »... Je t'aurais révélé les trésors fabuleux que tu renfermes et que trahit cette lumière douce qui coule doucement de tes yeux langoureux ! J'aurais laissé les lianes souples et douces de ton corps m'enlacer, et moi aussi j'aurais crié comme un fou les paroles que pousse un homme quand il est prisonnier entre les bras d'une femelle : « Tu es ma maîtresse et je suis ton esclave ! Avale-moi ! C'est un ordre ! Nous aimons être avalés ainsi ! » Le miroir s'interrompait un instant et observait la jeune fille pour mesurer l'effet de son discours. S'ensuivait toujours la même scène : embrasée, haletante, notre héroïne ôtait ses vêtements, dénouaient ses cheveux, et, approchant du miroir des lèvres entrouvertes et frémissantes, elle gémissait : « Dis-moi encore des choses comme celles que tu viens de me dire ! Donne-moi du plaisir ! Ah ! si j'avais le pouvoir de te métamorphoser en homme !... » Satisfait, vibrant de plaisir, le miroir reprenait le fil de ses flatteries.
Il disait : « Bientôt, un étranger viendra frapper à la porte, beau comme le soleil, riche comme un roi ! Toutes les filles s'échapperont des maisons et, la raison saccagée par ses yeux ravissants, elles se rouleront à ses pieds, elles le supplieront. Mais il ne posera son regard sur aucune, indifférent, méprisant. « C'est elle que je désire ! s'écriera-t-il en te désignant du doigt. C'est à elle que j'appartiens ! Eloignez-vous de moi ! » Et elles retourneront chez elles en se griffant le visage, en se frappant les cuisses, laissant derrière elles des traces humides et visqueuses puant l'humiliation... Et quelques jours après, des centaines de magnifiques voitures, brillantes et spacieuses, garnies de fleurs, t'emmèneront vers une maison comme un palais ; et sur un lit digne d'une reine, tu goûteras aux délices de la chair ; et ivre de plaisir, tu ramperas devant le corps de ton amant, tu te traîneras à ses pieds pour le remercier... Un bonheur étincelant et savoureux t'attend... » Quand le miroir s'arrêtait de parler, la jeune fille, reconnaissante, ceignait ses hanches nues d'un foulard noir et se mettait à danser en face de lui, ondulant comme un serpent, doucement, voluptueusement, les yeux voilés ; et son imagination le transformant en homme, elle le fascinait puis l'avalait, la bouche largement ouverte, humide et vorace...
Mais les prétendants qui commencèrent un jour à se présenter pour demander sa main n'avaient rien à voir avec le prince charmant que lui prédisait le miroir. Habitant dans les environs, ils étaient plutôt ordinaires et humbles, semblables à tous ceux qu'elle avait l'habitude de voir autour d'elle. Elle les refusait. Quand ses amies et ses cousines mariées lui reprochaient ce comportement, elle rétorquait, ironique : « Je ne veux pas me marier avec un homme dont je me mettrais à détester l'odeur quelques jours après la nuit de noces ! Je n'ai pas envie de vomir chaque fois qu'il poserait la main sur ma chair ! »
Parmi ces malheureux prétendants, il y avait un jeune homme qui couvait depuis longtemps un amour ravageur pour notre héroïne. Pas du tout découragé par les refus qu'il essuyait jour après jour, il continuait d'envoyer sa mère lui demander la main de la jeune fille. Mais cette dernière n'accepta jamais de devenir sa femme. Pourtant, selon beaucoup de gens, il était bien fait de sa personne, était sérieux et travailleur, et aurait été un bon époux. Alors, le cœur blessé profondément, ne pouvant plus vivre dans les environs de sa bien-aimée, il s'acheta un âne, des moutons et des chèvres, et accompagné de trois chiens, il quitta les lieux pour aller vivre à la campagne... Beaucoup de temps s'écoula, doucement, imperceptiblement, entraînant les êtres et les choses vers le pourrissement. Un beau jour, la jeune fille remarqua qu'il y avait des mois que personne n'était venu demander sa main. Une panique douloureuse empoigna violemment son cœur, et, tremblante, elle courut vers le miroir et lui posa la question qu'elle lui avait posée des milliers de fois auparavant : « O miroir ! Dis-moi ! Comment me trouves-tu ? » Mais cette fois-là, le miroir lui répondit : « Tu t'es un peu enlaidi ! Comme des chiures de mouches, des points noirs piquent ton visage maintenant. Tes cheveux commencent à se dessécher. Au coin de tes yeux et de tes lèvres, naissent doucement des rides qui frétillent comme des vers. Ta chair est en train de perdre de sa fermeté, bientôt elle s'affaissera. Tes seins ne sont plus dressés vers le ciel, fiers et provocateurs. Une fatigue les entraîne de plus en plus vers le bas, les chiffonne... » Mais la jeune fille ne le laissa pas continuer. Folle de rage, les yeux en larmes, elle le brisa en mille morceaux. « Sale menteur ! cria-t-elle vers les débris de glace qui jonchaient le sol. Affreux objet ! Tu l'auras voulu ! Le poison de la jalousie a réussi à te déformer, à te détraquer ! Pourri d'envie, tu me défigures, tu m'attribues des laideurs fabriquées par ton imagination ! Non, je suis encore plus belle qu'avant ! Je suis radieuse ! Je suis ravissante ! »
Cependant, les terribles paroles du miroir se mirent à tourmenter notre héroïne, la harcelant jour et nuit. Maintenant, il lui arrivait souvent de pleurer pendant des heures. Elle s'enfermait et ne voulait voir personne. Elle pensait. Et un beau matin, elle se réveilla aux premières lueurs de l'aube, et un balluchon dans la main, elle se dirigea vers la campagne, en cachette. Elle avait décidé d'aller à la recherche de l'amoureux qui, écorché par ses refus de devenir son épouse, s'était converti en berger.
Quelques jours après son départ, un vieil homme vivant dans une cabane isolée, lui indiqua le chemin qu'elle devait prendre pour rencontrer l'homme qu'elle cherchait. Et en effet, environ deux heures plus tard, elle vit trois baraques dressées sur une colline au milieu d'une haie circulaire. Alors, en dépit de la fatigue qui ruinait ses jambes, heureuse, elle marcha vers la clôture. Des aboiements féroces lui parvinrent. Puis, elle entendit une voix grave ordonner aux animaux de se taire, et levant la tête, notre héroïne vit surgir de la haie un homme, le visage mangé par une barbe touffue. Elle interrompit sa marche et, épuisée, elle s'assit pour se reposer.
Elle vit l'homme disparaître derrière la haie, puis réapparaître un instant plus tard, tenant dans chaque main un récipient. Il s'approcha d'elle, suivi par toute une meute de chiens. Il l'avait reconnue. Il se laissa tomber lui aussi sur l'herbe épaisse qui couvrait le sol, et sans prononcer un mot, il posa devant elle les deux récipients. C'était de la nourriture et du lait. Elle mangea avec appétit.
Une fois sa faim et sa soif apaisées, elle leva les yeux vers l'homme et dit : « Dieu te récompensera pour la nourriture et le lait que tu m'as offerts, mon frère. Maintenant, il faut que je te dise pourquoi je suis venue vers ta demeure. D'abord, je te demande pardon d'avoir si méchamment piétiné ton cœur. Aujourd'hui, je me rends bien compte du mal que je t'ai fait en rejetant ton amour. Mais je pense qu'il n'est pas trop tard. C'est la raison pour laquelle j'ai fait ce long et pénible voyage. En vérité, je suis venue te dire que si tu me veux encore, je serais ravie de t'appartenir. Je suis prête à vivre ici, avec toi, jusqu'à la fin de ma vie... »
Mais la jeune fille fut interrompue par un bêlement si aigu qu'il lui donna des frissons dans le dos. C'était une jolie chèvre blanche qui venait de crier ainsi. Elle se tenait à portée de sa main, fixant sur elle des yeux qui exprimaient une irritation méprisante. Cela dura quelques secondes, puis la bête tendit son museau vers le berger, et se mit à lui lécher le visage avec une langue rose et douce. Ensuite, elle lui écarta les jambes et se blottit contre sa poitrine, caressante... L'homme baissa la tête, toujours muet... Comprenant la scène, la jeune fille se leva hâtivement, et sans dire un mot, elle s'éloigna, le cœur broyé. Elle marchait vite, les yeux fixés droit devant elle, lorsqu'un craquement attira son attention. Elle se retourna vers le lieu du bruit. C'était un bouc. Elle devina qu'il appartenait au berger et qu'il l'avait suivie en cachette. Alors, envahie par une tendresse subite, émue jusqu'aux larmes, elle s'agenouilla, ouvrit ses bras et appela l'animal : « Viens ! Approche ! N'aie pas peur ! » Et le bouc s'approcha d'elle, et elle le serra dans ses bras, le couvrant de baisers ; et brusquement elle le vit se métamorphoser en un homme beau comme le soleil, fort et grand, comme celui qui avait peuplé ses rêves pendant des années et des années. « Viens mon prince adoré, lui dit-elle. Nous allons maintenant rentrer chez nous. »
Quelques jours plus tard, ils arrivèrent au village. Avertis depuis longtemps, les habitants s'étaient répandus dans la rue principale que devait emprunter notre héroïne pour atteindre sa maison. Dès que la jeune fille et son accompagnateur apparurent, un immense éclat de rire et des moqueries acides jaillirent de toutes les bouches. Marchant à quatre pattes, les enfants se mirent à imiter le cri des chèvres. Quelqu'un s'écria à plusieurs reprises : « Oh ! qu'il est beau le prince poilu qu'elle nous a ramené de son long voyage ! Oh ! qu'il sent bon ! Oh ! qu'il est joli avec ses deux cornes et sa barbiche ! Ecartez-vous la populace ! Laissez passer les amoureux ! » Mais notre héroïne continuait de marcher, imperturbable, la tête dressée fièrement vers le ciel, murmurant: «Pardonne-leur, mon prince adoré ! C'est le poison de la jalousie qui envenime ainsi leur langue ! Ces singes hurleurs et grimaçants ne doivent pas nous troubler ! Avançons, mon prince ! »


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