C'est une bien originale proposition que vient de lancer l'économiste et consultant français Camille Sari : la mise en place d'une monnaie commune à l'Algérie et le Maroc, le «dinrham». Une monnaie commune qui cohabiterait avec les monnaies nationales, pour booster les échanges commerciaux entre les deux pays avant de s'étendre ensuite au Maghreb. Dans son ouvrage «Algérie et Maroc : quelles convergences économiques?», Camille Sari estime que 'l'intégration économique maghrébine est un moyen de gagner en indépendance économique et de développer des échanges mutuellement avantageux entre les pays de la région». Elle permet aussi «une moindre dépendance et des facilités énormes de commercer sans passer par les devises fortes». L'ouvrage donne un aperçu sur les situations économiques de l'Algérie et du Maroc depuis leur indépendance, pour en illustrer autant les points de convergence que de divergence. Cette analyse des économies des deux pays permettra d'aider les politiques algériens et marocains mais également les économistes des deux pays d'avancer vers le parachèvement du marché maghrébin uni. En consultant la littérature existante, des enquêtes et des études menées dans les deux pays voisins, Camille Sari tente par des analyses d'expliquer le processus d'intégration économique à réaliser entre les deux pays et démontrer les bénéfices que la région peut tirer «d'une meilleure coordination des politiques économiques.» Passer de 2% d'échanges à 40% Pour donner plus de consistance à cette intégration maghrébine et notamment au niveau des échanges entre l'Algérie et le Maroc, deux pays voisins, Sari propose ainsi la mise en place d'une monnaie commune, à savoir le «dinrham» (contraction des mots dirham et dinar) qui cohabiterait avec les monnaies nationales. Le «dinrham» tend à «faciliter les échanges de biens, de services et de capitaux sans altérer le droit de battre la monnaie de chaque Etat», estime-t-il. L'objectif est de passer d'un taux des échanges entre pays du Maghreb de 2 à 40%, une moyenne des échanges au sein des zones économiques internationales. La publication s'est par ailleurs intéressée également aux questions monétaires, comme l'endettement, le taux de change, l'inflation et la productivité, en les considérant comme étant «les instruments de régulation (...) contribuant à la mise en œuvre d'un système de coordination harmonieux.» Les vérités des PME L'ouvrage de Camille Sari sur les opportunités économiques entre l'Algérie et le Maroc confirme d'une certaine manière ce que beaucoup de PME des deux pays affirment tout le temps : il existe réellement un grand marché, un formidable gisement à ciel ouvert de biens et services pour le moment inexploité. Des chefs d'entreprises marocaines notamment installés à Casablanca, estiment qu'''il vaut mieux aller chercher son ciment ou son fer à Oran ou Annaba via le port de Nador, que d'aller en Ukraine, avec tous les surcoûts que le fret maritime suppose''. Lors de la création de la chambre de commerce algéro-marocaine à Casablanca en 2005, beaucoup de patrons de PME marocaines, mais également algériennes, conviennent du fait que les échanges entre les deux pays peuvent être 'mutuellement'' bénéfiques pour les deux parties. Mais, pour l'heure, cet objectif reste encore inaccessible, même pour des PME d'Oujda et de Tlemcen, séparées seulement par la bande frontalière. Le volume des échanges commerciaux entre l'Algérie et le Maroc était de 720 millions de dollars en 2009 et 570 millions de dollars en 2008. L'ouvrage de Sari (449 pages, éditions Cabrera et Gnôsis) est ainsi une autre halte dans la compréhension des relations économiques et politiques entre le Maroc et l'Algérie. Camille Sari est conseiller économique, consultant international et spécialiste des monnaies et de la finance internationale. Il a enseigné dans différentes universités parisiennes, dont Paris III Sorbonne Nouvelle et Paris XIII, et dans de grandes écoles de commerce.