La brouille qui règne en matière de représentativité syndicale au sein d'Algérie Télécom, où deux ailes syndicales, affiliées toute deux à l'UGTA, se disputent ce titre, ne permet pas une lecture claire des développements de la sourde colère qui secoue les rangs des travailleurs, depuis l'avènement des dernières augmentations de salaires, mais le malaise socioprofessionnel, toutes les parties en conviennent, se fait de plus en plus pesant. Selon un avis largement partagé, l'augmentation des salaires décidée ces derniers mois par la direction générale d'Algérie Télécom a davantage provoqué les rancoeurs dans les rangs des travailleurs, car ayant bénéficié beaucoup plus aux cadres, au détriment des personnels classés en bas du tableau des échelons, «défavorisés par le calcul arithmétique qui découle de l'application de la hausse des 13 %, indexée sur le salaire de base». Comme nous l'annoncions dans l'une de nos récentes éditions, la tension qui couvait parmi le personnel d'Algérie Télécom est montée à la surface, lors de l'assemblée générale des travailleurs tenue dans l'après-midi du 23 janvier dernier, et organisée par l'une des deux ailes syndicales, en l'occurrence la coordination syndicale d'Algérie Télécom. A l'unanimité, les salariés d'Algérie Télécom qui ont assisté à cette assemblée générale, dont le nombre varie selon les estimations des uns et des autres, une centaine sur 1500 travailleurs selon le syndicat rival, une salle archicomble selon les organisateurs, «ont appelé à une grève en signe d'un mécontentement généralisé», souligne-t-on dans un communiqué transmis à notre rédaction. Pour rappel, la coordination syndicale d'Algérie Télécom de la wilaya de Constantine, affiliée à l'UGTA, a tiré la sonnette d'alarme à propos «d'une grogne des travailleurs manifestée à l'égard de cette disproportion effarante entre les différentes catégories du personnel». On parle même de la création au sein d'Algérie Télécom de deux classes distinctes, «la classe qui ne cesse de s'enrichir, et la classe laissée en rade lorsqu'il s'agit des hausses de salaires». Selon les propos des syndicalistes, les travailleurs ont appelé à une grève «pour dire non à la marginalisation, à l'exclusion, à l'oubli et à la distribution abusive des richesses de l'entreprise entre les disciples du pouvoir». Dans ce même contexte, on dénonce l'anarchie indescriptible dans la gestion des ressources humaines, où le recrutement se fait au secret, presque dans la clandestinité, s'insurgent les représentants des travailleurs. Ces derniers parlent sans ambages d'une entreprise séquestrée. «Algérie Télécom est otage d'une gestion chaotique», concède-t-on. L'autre aile du syndicat, représenté par M. Hamrouche Fodhil, prévoit l'organisation d'une journée de contestation, mais il faut pour cela convaincre les travailleurs d'adhérer à cette initiative. Chose presque impossible. Car, les travailleurs clament «qu'ils ne reconnaissent aucun représentant syndical». Lors du dernier mouvement de contestation organisé d'une manière spontané à la veille de l'Aïd El Adha par les travailleurs, pour revendiquer le versement de la prime d'intéressement, les travailleurs que nous avons rencontré, sans exception, nous rappelaient que leur action n'est chapeautée par aucun syndicat. «Nous ne reconnaissons aucun droit à quiconque de nous représenter», insistait-on. Il est à craindre, donc, que la protestation prenne les mêmes formes que celle engagée récemment par les travailleurs d'Algérie Poste, sans aucun canal syndical. Car, le malaise socioprofessionnel est une réalité admise par tous, syndicalistes de tous bords et travailleurs. Nous avons tenté de prendre attache avec le directeur de wilaya, ainsi que le directeur régional d'Algérie Télécom, pour avoir un son de cloche de la direction, à propos de cette tension, mais l'un et l'autre étaient occupés par les inventaires annuels.