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Une tragédie grecque
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 20 - 07 - 2015

Que retenir de la négociation de la Grèce avec ses partenaires de l'Eurogroupe? Quelles conclusions en tirer?
Le deal final imposé à la Grèce par les pays de l'Eurogroupe a été jugé insensé et inapplicable même par des commentateurs de chez Bloomberg ou du Guardian. Transformer un des leurs en “colonie”, selon le terme utilisé par un analyste européen, n'est assurément pas un geste à mettre à l'honneur des pays d'une zone euro elle-même en difficulté. Depuis 2009 en effet, cette zone ne parvient pas à gérer les grandes asymétries nationales.
Le piège s'est refermé sur la Grèce et d'aucuns estiment qu'il eut mieux valu qu'elle recouvre sa souveraineté pour reprendre en main son destin et renouer avec la croissance en dehors de la zone euro. Les pays qui sont venus à son “aide” l'ont enferrée en fait dans un système hautement compétitif qui ne lui offre pas de planche de salut. La solidarité systémique supposée a fait défaut et un retour à la croissance par le maintien dans la zone euro est une perspective improbable parce que l'Etat grec se trouve dépouillé de ses attributs régaliens et démuni de tout levier de gouvernance économique.
Lorsque la Grèce a rejoint la zone euro en 2011, le PIB par tête d'habitant était de moitié celui de l'Allemagne. Depuis, la compétitivité grecque relativement à l'Allemagne a chuté de 40%. En réalité, La zone euro ne dispose pas de mécanismes de transferts compensatoires pour gérer les déséquilibres, au contraire des Etats-Unis par exemple où des relais institutionnels permettent des réallocations entre les Etats. Actuellement, la Bundesbank détient 500 billions d'euros de crédits sur les autres banques de la zone euro et a accueilli une bonne partie des capitaux grecs qui se sont évadés. Le problème n'est donc pas la Grèce. Il est congénital à la zone euro et il n'y a pour l'heure aucun mécanisme régulateur en vue (comme les sovereign-bond, rejetés d'ailleurs par l'Allemagne) pour corriger ces déséquilibres. La Grèce aura été la victime expiatoire de cette insuffisance intrinsèque de la zone euro. Les donneurs de leçons de l'Eurogroupe n'ont fait que s'attaquer au maillon faible et ont botté en touche les défis de fond.
Au plan politique, cet épisode démontre qu'un nouvel ordre européen vient de s'affirmer. Il a ainsi signifié aux Etats membres se trouvant dans un chemin de traverse qu'il y aura, un jour ou l'autre, un tribut à payer pour un retour dans le droit chemin balisé par les règles communautaires. Pour se maintenir dans ce club privilégié de l'Eurogroupe, le pays en difficulté devra transférer des pans de souveraineté à des superstructures intergouvernementales -non issues du suffrage universel- afin qu'elles prennent en main sa gouvernance économique et financière. En situation difficile, mieux vaut ne pas avoir les deux genoux à terre, mieux vaut avoir quelque ressource dans le tiroir-caisse ou, à tout le moins, quelque argument en réserve dans la boîte à outils à négociation pour affronter l'impitoyable faux ami intérieur. La voie suivie par la Grèce débouche sur une impasse fatale et a définitivement tranché le nouvel ordre européen dominé par l'Allemagne.
Dans la constellation ultralibérale communautaire (pays membres, Commission, Parlement, médias, “experts”), la droite européenne s'est levée comme dans l'arène romaine d'antan pour scander la mise à mort du vaincu gisant au sol l'épée sur la poitrine ! N'était-ce là un second message lancé à l'adresse de ceux qui voudront encore opposer l'argument démocratique du référendum à la face des gouvernants du nouvel ordre européen. La France, les Pays-Bas et l'Irlande s'y sont déjà essayés sans succès. M. Tsipras ne pouvait pas ne pas avoir à l'esprit ces tentatives non concluantes quand il organisa un référendum qui énerva les pays partenaires de la zone euro. Se sentait-il en capacité de convertir le succès interne en essai concluant dans la négociation alors même qu'il venait de perdre la première manche avec le plan de “réformes” initial ?
Le peuple grec va certes devoir payer la facture des errements de ses gouvernants successifs, mais lui-même n'a-t-il pas été le complice passif de l'improductivité de l'entreprise “Grèce” et de sa mise en faillite. Il va aussi devoir payer pour tous le prix d'une certaine complaisance de la gouvernance communautaire à propos des fameux indicateurs de convergence qui avaient été excessivement positivés afin de faciliter l'adhésion de certains pays devenus membres, ou complaisance aussi dans le cadre de la surveillance des déficits budgétaires.
Nouveau venu dans l'arène communautaire, le Premier ministre grec a été dévoré tout cru, disons-le. Sa carrière de militant de gauche l'a desservi dans un environnement ultralibéral où même un pays, comme la France, peine à faire entendre sa voix. Le Capital est devenu souverain. Il dicte aux Etats sa volonté. La bataille qu'il a engagée dépassait l'avenir de la seule Grèce. Entre l'avenir de la zone euro et celui de la Grèce, le compte a été vite fait parce que les “marchés” étaient aux aguets. La personne du Premier ministre grec et son pays vont subir le retour de flamme du coup d'éventail -référendaire- flanqué à la face de l'Eurogroupe. Pareilles représailles sur un Etat membre n'ont pas de précédent dans l'historique de la construction communautaire. D'autant que la Grèce, après avoir perdu sa fonction de maillon important dans le dispositif atlantique du temps de la guerre froide, ne pouvait faire valoir un positionnement stratégique dans le contexte d'une bataille globale révolue. En d'autres temps, des amis outre-Atlantique seraient intervenus pour l'aider dans le contexte du partage des charges, mais les règles et les esprits au sein de l'UE ont fort changé depuis.
Au lendemain de ce deal, la Grèce va faire son entrée sur le marché des pays en solde. Ce pas franchi par les pays de l'Eurogroupe est loin d'honorer l'UE. On l'aurait compris face aux Etats-Unis, la Russie ou la Chine, mais face à la Grèce, l'UE s'est franchement déshonorée. A moins qu'il ne soit démontré qu'un programme d'ajustement structurel dur est générateur de croissance, il semble bien que la Grèce va être livrée corps et biens à l'omnipuissance du Capital et des forces du “marché”.
Le Premier ministre grec s'est vraisemblablement fait piéger par de faux amis qui l'ont envoyé dans les bras de l'Allemagne pour lui éviter une sortie de l'Eurogroupe. Le scénario du “Grexit” présenté brutalement par le ministre allemand des Finances avait tout l'air d'un contre-bluff qui a servi à précipiter la reddition au même moment où M. Tsipras était amicalement poussé dans le dos en direction de l'Allemagne. La manœuvre autour du “Grexit” a vraisemblablement été une action concertée visant à sauver le groupe en sacrifiant un des siens. D'ailleurs, la “précieuse” expertise française, dont aurait bénéficié la Grèce, a convergé au final avec la volonté allemande d'un “redressement” plus dur encore, c'est-à-dire sur une mise sous “tutelle” de la Grèce (la question de la compatibilité avec les règles communautaires restant par ailleurs posée). Elle-même en défaut par rapport aux règles budgétaires communautaires, il y avait pour la France une limite qu'elle ne pouvait franchir au risque de mettre en péril ses propres négociations sur son déficit budgétaire. Dans les faits, le binôme franco-allemand a fonctionné dans le même sens. Il faudrait à cet égard ne pas confondre sympathie pour la Grèce et solidarité active en négociation, une solidarité qui aurait entraîné un bras de fer avec les autres membres de l'Eurogroupe.
Sur un autre plan, la décote de la position géopolitique de la Grèce renseigne sur la vulnérabilité de certains pays (au sud de la Méditerranée) enclins à penser que leur contribution dite majeure dans la lutte contre le terrorisme et donc à la sécurité de l'Europe les mettrait à l'abri d'une potentielle déstabilisation par les armes ou par le Capital. Si l'UE a sacrifié l'un des siens, pourquoi donc s'empêcherait-elle, si nécessaire, en des circonstances différentes, de laminer tout pays de son voisinage au nom des intérêts du club des nantis européens. La voie a bien été ouverte en Libye et en Syrie. Mais, en l'occurrence, le traitement du cas grec aura servi de révélateur du nouveau visage.
Il faut espérer que l'Europe se ressaisisse parce que les syndromes d'un système communautaire qui se craquelle se multiplient. Les pays au sud de la Méditerranée n'ont pas besoin d'une Europe arrogante ni d'une Europe qui se fissure parce que l'onde de choc qui viendrait du Nord pour les frapper de plein fouet y démultiplierait durablement et profondément les germes de l'instabilité et de l'insécurité qui s'y propagent déjà à grande allure.
Dès lors, il n'est guère difficile de déduire de cette tragédie grecque ce qu'il pourrait en coûter à un pays défaillant du sud de la Méditerranée lié ou non à l'UE par quelque mécanisme de “coopération renforcée”. La gamme des leviers d'action de l'UE, vis-à-vis des pays tiers, comme les sanctions, l'embargo, le gel des avoirs, les bombardements ciblés par des Etats membres par le biais de l'Otan, pour renverser un régime, ou à des fins humanitaires, ou encore le ciblage des personnes, s'est à présent “enrichie“ d'une possible nouvelle option.
Par extension, et sans trop forcer sur le parallèle, il ne fait plus de doute que l'esprit et les approches d'une politique européenne de voisinage en cours de rénovation, dit-on, ne peut pas ne pas s'appliquer aux pays qui en seront parties prenantes, un traitement “non moins différencié” que celui appliqué à un pays membre…
* Ex-ambassadeur à Bruxelles


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