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La «Décadence» selon Michel Onfray (1ère partie)
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 23 - 02 - 2017

Encore un pavé dans la mare d'un philosophe très médiatisé, et qui vient d'occuper la «une» des principaux magazines de France et de Navarre. Sorti chez Flammarion en janvier 2017, Michel Onfray vient de nous offrir un nouveau cadeau, un livre de pas moins de 650 pages qui, tout comme un précédent ouvrage-réquisitoire adressé à titre posthume à Sigmund Freud, fait polémique. Ce livre a pour titre : » Décadence».
ENTREE DE JEU -
Ce livre nous entretient sur la longue agonie de la civilisation judéo-chrétienne, désarmée aujourd'hui face à la montée de l'Islam (sans préciser s'il s'agit de ce qu'on appelle désormais «islamisme radical» ou de l'Islam tout court), et entend appuyer la thèse d'un auteur «incompris et injustement fustigé», nommé Huntington, pour avoir annoncé le « choc des civilisations».
Alors que l'Occident s'accommode d'une sécularisation frivole, productrice de l'individualité et du relativisme castrateur, l'islam ne cesse de se donner une vocation planétaire, trans-territoriale, voire a-territoriale. Cette vocation se poursuit dans sa vérité éternelle, inamovible, au moment où l'Occident se repaît dans un pluralisme entropique...
L'auteur considère en revanche que l'Occident a connu la même vocation exclusive et planétaire. Evoquant l'Islam, il pense que «cette religion virile, guerrière, conquérante, puissante, forte de ses soldats prêts à mourir pour elle, entre dans le concert des civilisations qui se proposent de régner de manière impériale, universelle, planétaire. Ni le bouddhisme, ni l'hindouisme, ni le confucianisme, ni le judaïsme, au contraire du christianisme et de l'islam, ne proposent de convertir la totalité de l'humanité. Ces deux forces, qui sont deux spiritualités, deux civilisations, deux cultures, existent en s'opposant. L'empire chrétien s'était étendu rapidement à partir de la conversion de Constantin. Il va désormais compter avec ce frère ennemi pour plus de mille ans».
Notons que l'ouvrage ressemble plus à un pamphlet qu'à de l'histoire proprement dite. Aucune référence bibliographique ne figure ni en bas de page ni à la fin du livre. Les seules références dans le corps du texte, sont des rappels tirés du récit biblique et de la littérature hagiologique. On remarquera par ailleurs la vitesse d'un TGV avec laquelle évolue imperturbablement notre auteur : âgé de 58 ans, il nous livre une bibliographie personnelle de pas moins de 110 travaux publiés, dont au moins 80 livres. Si l'on estime qu'on entre en âge de maturité intellectuelle susceptible de s'affirmer dans le marché de l'édition (tout au moins en sciences humaines) à partir de la trentaine d'années, notre auteur a publié en moyenne 3 à 4 ouvrages par an !
Avons-nous affaire à un enfant prodige ou à un docteur «cocotte-minute» pour reprendre une expression d'un de nos anciens ministres de l'Education qui s'alarmait de la profusion en même temps que de l'inconsistance des thèses qui étaient soutenues à une époque où l'outil internet commençait, pour le meilleur ou pour le pire, à produire son effet.
THÈSES EN PRESENCE
Le passage du judaïsme au christianisme constitue une rupture d'avec la raison et la vraie foi entendue comme une praxis non hégémonique. Cette affirmation est constitutive de quatre thèses contenues dans ce livre :
Première thèse : La Cité grecque antique est porteuse d'un panthéisme, au nom duquel le citoyen est un homme libre. Elle a inventé la démocratie et n'entend exercer aucune hégémonie ni aucun pouvoir tutélaire à l'égard de ses voisins.
Deuxième thèse : Le judaïsme est l'unique religion monothéiste à n'avoir aucune prétention à l'imposer aux autres peuples. Elle serait donc une religion «autocentrée».
Troisième thèse : la rupture d'avec le judaïsme et la romanisation d'un culte d'extraction proche-orientale dénommé «christianisme» constitue le prélude à l'impérialisme. Le premier responsable de cette rupture s'appelle Paul. Le message de Jésus, qui aurait pu n'être qu'une secte juive parmi d'autres, s'expatrie chez les Gentils. C'est Paul qui en est le protagoniste. Le second, c'est l'Empereur Constantin, pour s'être converti d'abord, et pour avoir légalisé cette religion ensuite. C'est à partir de là que le christianisme cesse d'être une religion martyre, pour devenir une religion du pouvoir impérial romain.
Quatrième thèse : le célibat des prêtres (catholiques) a pour origine l'impuissance sexuelle de Paul. Même s'il s'agit là sans doute d'une assertion intuitive, ou d'une clause de style, elle s'installe néanmoins dans le registre psychanalytique, jadis combattu pourtant par notre auteur dans son livre intitulé: « Le crépuscule d'une idole: l'affabulation freudienne» (éd.Grasset).
Commentons dans l'ordre ces quatre propositions :
Critique de la première thèse : La sagesse des Hellènes n'a pas manqué de fabriquer le «barbare», c'est-à-dire l'autre, l'étranger. Tous ceux qui font partie de la Cité ne sont pas des citoyens. C'est le cas des Métèques, qui sont des autochtones de statut inférieur (artisans, marins etc.), des esclaves qui sont « apparentés » au maître dont ils portent le nom précédé d'un génitif (fils de..., sujet de… et qui sont attachés à sa maison comme les «Iklan» chez les Touaregs), enfin des femmes, qui n'ont de citoyenneté que par rattachement au patrilignage (du père ou du mari). Il se trouve en effet que la sagesse athénienne s'accommode d'une forte hiérarchisation des statuts, dans laquelle l'esclave n'est pas « persona» ( étymologiquement «masque», personnage par extension, c'est-à-dire faisant partie de la société gentilice propre au monde indo-européen). La démocratie grecque, et par extension romaine, ne reconnaît comme activité socialement reconnue, que le « nec-otium », étymologiquement le non oisif, ce qui par contraction devient « negotium », activité marchande ès qualités. Ainsi, le paysan ou l'homme de peine ne sont pas reconnus comme actifs, mais comme «laborant», ceux qui travaillent, sauf que la notion de «Labor » prend une signification différente du travail dans l'acception moderne. Les tâches manuelles, notamment paysannes, sont dévolues aux esclaves en Grèce antique, et leur sort ne s'améliore guère avec l'époque féodale ouest-européenne, qui hérite de la tri-fonctionnalité des statuts propres å l'espace germano-tribal. ( G.Duby dans «Les trois fonctions ou l'imaginaire du féodalisme «, confirme pour l'Europe la thèse de Georges Dumézil pour le monde indo-européen dans « Mythe et épopée « , Ed.Gallimard, 1968).).
À ce titre, la structure tripartite du féodalisme trouve sa légitimité dans la ternarité augustinienne (les anges, les prêtres continents et les prêtres laïques). Cette ternarité est remaniée â l'orée du 10ème siècle avec l'arrivée des gens du Nord, les Normands, qui ont fondé la dynastie capétienne (Hugues Capet), et qui va durer jusqu'à la Révolution française (987-1789). Cette dynastie reprend à son compte les trois fonctions, composées dans un chant liturgique dédié à un mythique roi Robert, par deux Evêques (Adalberon de Laon et Gérard de Cambrai ) : Il y a ceux qui prient (prédicant) , ceux qui combattent (pugnant), et ceux qui travaillent (laborant). Les premiers sont là pour le salut des âmes des fidèles, les seconds pour la défense du territoire de la chrétienté, qui se trouve aussi à Jérusalem, ville du Christ (ce qui justifiera l'épopée des croisades), et les derniers, qui constituent l'écrasante majorité, pour nourrir les deux premiers, et surtout pour expier leurs pêchés, s'agissant du pêché originel d'abord, et de son expiation par le Christ lui-même, ce qui renvoie à une dette morale infinie. Pour les auteurs cités plus haut, le christianisme reprend, en le transformant, l'archétype trilogique indo-européen, qui n'est pas éloigné de la tradition néo-platonicienne incarnée par le philosophe Plotin, dont Saint Augustin fut le disciple à distance dans sa jeunesse au cours de laquelle il prônait le manichéisme.
Tout cela tend à montrer que contrairement à la thèse de Michel Onfray, qui entend faire la coupure entre christianisme et rationalisme hellénique, l'Eglise romaine s'est construite dans cet héritage à large spectre, et cela se renforcera davantage avec la Renaissance.
Par ailleurs, la sagesse grecque s'accommodait d'une propension à l'hégémonie, sinon philosophique et culturelle, du moins militaire : Guerre des Mèdes contre la Perse, guerre des Thermopyles contre Sparte (Trucydide), sans oublier l'impérialisme avant la lettre d'Alexandre le Grand.
Critique de la deuxième thèse : Le judaïsme rangé au niveau des religions védiques à caractère non prosélitique, est une contre-vérité. Dans «le judaïsme antique», Max Weber signale, dans le Deutéronome, un des livres du Pentateuque composé avant la destruction du premier Temple de Jérusalem (attribué aux paroles de Moïse après la sortie d'Egypte vers le 14ème siècle av. J.-C., sa datation historique étant fixée au VIIème siècle ), l'existence du statut d'esclave pour «fait de guerre» ou de «dette» et, faisant suite aux commandements de l'année jubilaire ( Dt.15-6) :» Tu prêteras à beaucoup de peuples et tu n'emprunteras à aucun «. Cette mention trouve sa traduction politique un peu plus loin : « Tu domineras des nations nombreuses mais toi, elles ne te domineront pas». Ce texte, composé dans la période pré-exilique, c'est-à-dire avant la déportation des Juifs à Babylone (586 av. J.-C.), révèle un fait majeur : la rupture d'avec les «autres peuples», au nom de la primogéniture, celle de la »terre promise « (par le dieu Yahvé à Abraham) et du « peuple élu», révèle que le non prosélytisme juif n'est pas une vertu mais un principe électif, à caractère ethno-racial. L'autre fait curieux qui vient de cette devise est de se maintenir dans le statut de créancier et non de débiteur, comme gage d'indépendance et de suprématie. Même quand le peuple juif a connu les pires détresses, le récit prophétique interprète cela comme une mise à l'épreuve pour mériter le statut d'élu primordial. Cette tradition s'est maintenue au cours des siècles, durant lesquels le Juif est assimilé au personnage de l'usurier : quand, au milieu du XIVème siècle, la Grande Peste s'est abattue sur l'Europe, ceux parmi la noblesse qui avaient emprunté de l'argent aux Juifs de Saxe, d'Alsace et de Rhénanie, se sont retournés contre eux, sous prétexte qu'ils avaient empoisonné les puits et causé la maladie. Au lieu de les rembourser, ils les ont massacrés.
Cet épisode mis à part, qui en dit long sur l'anti-sémitisme catholique, la posture de «peuple paria»( Max Weber) que les Juifs se sont donné volontairement pour ne pas se fondre dans les autres peuples, est la caractéristique fondamentale de la pérennité d'une dénomination, celle de « juif «, constante depuis quatre mille ans, alors que les peuples qui leur étaient contemporains ont disparu depuis longtemps. Cette réflexion est celle de Freud («L'homme Moïse et le monothéisme» paru post-mortem en 1939) qui rappelle qu'on chercherait en vain aujourd'hui la trace des Etrusques, Assyriens, Akkadiens, Garamantes, Mycéniens, etc. Quand le pauvre Roger Garaudy, dans son ouvrage intitulé : « Les mythes fondateurs de la politique israélienne «, écrit ( page 57 ) : » Cette « purification ethnique » devenue systématique dans l'Etat d'Israël d'aujourd'hui, découle du principe de la pureté ethnique empêchant le mélange du sang juif avec le sang impur de tous les autres «, il n'a fait que reformuler un principe canonique inscrit dans le frontispice de la Thora . Plus loin, il rappelle qu'à la fin des années 20 , début des années 30, l'aristocratie juive (le banquier Rotschild et son alter ego Krupp, magnat de l'industrie de la Ruhr, entre autres) a consenti une alliance avec les barons se réclamant de l'héritage teutonique, pour s'unir ainsi dans la même idéologie du peuple élu, celui du 3ème Reich. Cette alliance exclut solidairement les peuples subalternes, juifs compris. Roger Garaudy a été conspué pour avoir écrit ce livre, a reçu des insultes par le tout-venant médiatique et ce, jusqu'à la fin de ses jours. Schlomo Sand, Juif ashkénaze, professeur d'histoire à l'université de Tel-Aviv, a publié avec courage et lucidité, au risque d'être mis en quarantaine par ses pairs, un livre intitulé : »Comment le peuple juif fut inventé « , édité chez Fayard, suivi d'un autre plus récent, paru chez Flammarion : « Comment j'ai cessé d'être juif «. Il montre en quoi la judéité raciale, qui est en train d'être revendiquée aujourd'hui avec force argumentation scientifique à l'appui de prétendues recherches de laboratoire en génétique, devient un moyen d'exclusion des « faux Juifs «, comme les peuples d'Abyssinie et d'Ethiopie (fils présumés du Roi Salomon et de la reine de Saba...), voire les descendants des Samaritains quasiment disparus et dont les ascendants auraient été relégués au Yémen (les fameux »Sabéens « de Maïmonide, contemporain d'Ibn-Ruchd), pour ne pas parler des Berbères judaïsés au troisième siècle avant l'ère chrétienne, peuple relique quasiment disparu, suite à des reconversions ultérieures. Michel Onfray attribue le certificat de bonne conduite au judaïsme pour n'avoir soumis aucun peuple à sa religion, quand des intellectuels juifs de renom y signalent les effets pervers. Au total, le peuple palestinien, fils des Cananéens d'hier, pourchassés de leurs terres au nom de la morale biblique par des pasteurs nomades appelés Hébreux (Hyksos en Egypte, ‘Abirû en araméen, c'est-à-dire ceux qui ont «traversé» l'Euphrate) dont la motivation était de fuir la Mésopotamie déjà sur-occupée pour trouver des terres de pâturage et de culture dans les contrées plus propices. L'écosystème du Jourdain, de Palmyre et du Nil, constitue l'œkoumène, c'est-à-dire la scène où s'est joué le drame biblique. Quant aux Cananéens qui ont survécu au massacre perpétré par l'armée de Josué au nom de la nouvelle religion (cf. «Livre de Josuah « 7:9.), ils ont servi dans les galères phéniciennes qui sillonnaient les côtes méditerranéennes. Procope, historien romain du Ve siècle, relate une fontaine à Tighisis (près de Annaba) où se trouvait une inscription punique dans laquelle on pouvait lire : »Nous sommes de ceux qui avaient fui devant ce brigand de Josuah fils de Havé «. Nous avons trace de ces exilés de la première heure, chez nous, sur la côte-ouest à Sydna-Youchaa, Ghazaouet) et à Djidjel. On les reconnaît à leur parler où le «kaf «remplace le «qaf», et où le tch domine. Chassés il y a quatre mille ans de leurs terres, et disséminés sur le pourtour méditerranéen, les Palestiniens d'aujourd'hui, fils des Cananéens d'hier, vivent l'exil le plus long de l'histoire connue de l'humanité.
Critique de la troisième thèse : Il s'agit de la «rupture théologique» : l'auteur accuse Paul, juif résidant à Tarse en Asie Mineure (Turquie actuelle), alors sous domination romaine, d'avoir rompu avec la tradition juive, en voulant convertir les Gentils, c'est-à-dire les polythéistes et, plus grave encore, les populations non juives. Pire, il aurait négocié avec eux les conditions de leur conversion comme, par exemple, l'exemption de la circoncision : en fait, héritée des Egyptiens par les Juifs avant l'Exode mosaïque, cette pratique atteste de l'identité sémite. Paul dérogea à cette loi pour faciliter l'adhésion à la nouvelle religion. Il y a une différence de taille entre la version historiographique la plus amplement admise, et le verdict d'Onfray, selon lequel, cette rupture venait de sa volonté unilatérale. Ce problème existe aussi dans l'Islam à ses débuts, où certaines pratiques de la Djahiliya furent tolérées pour obtenir l'adhésion des Mecquois, parmi lesquelles le régime successoral et la polygamie (fût-elle réglementée par la chari'a). En effet, il s'avère que dans l'histoire de l'humanité tout entière, jamais les révolutions religieuses ou culturelles n'ont pu se faire ex nihilo, tout au moins sur la durée. La Révolution française de 1789 a décapité l'Eglise catholique, mais l'a tolérée plus tard quand la fièvre de l'anti-cléricalisme s'est peu à peu éteinte, sous Bonaparte d'abord, puis à la faveur de la Restauration, puis de la Monarchie de juillet, avant de trouver le deal que met en place la loi de séparation de 1905. Je m'interroge, à ce propos, sur la vraisemblance de la révolution d'Akhenaton, qui aurait fait détruire les idoles et imposer le culte d'Athon, le dieu solaire. Cicéron dans un texte peu connu (« De natura deorum», en parodiant le naturaliste Lucrèce, cher à Michel Onfray, pour son livre « de natura rerum», livre que les latinistes de ma génération ont parcouru goulûment durant nos classes au collège de Slane) ne tarit pas d'éloges sur cette nouvelle religion. Malheureusement, une telle adhésion tardive de Ciceron au cosmothéisme du Pharaon révolutionnaire (qui a vécu 12 siècles avant l'auteur romain) n'a pas suffi à faire écourter son règne par les prêtres d'Amarna, dans des conditions dramatiques pour ce dernier. La morale de cette histoire est qu'il n'a pas su construire du neuf avec les bribes de l'ancien...
A suivre...
*Professeur émérite de l'Université de Picardie -Jules Verne


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