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Hamid TEMMAR au «Le Quotidien d'Oran»: La source de l'extrême confusion
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 25 - 03 - 2018

La privatisation est à l'ordre du jour. Dans tous esprits en sourdine parce que le pouvoir politique semble désemparé par l'impact économique, politique et social que pourrait engendrer le sujet selon le bout par le lequel il serait tenu. Hamid Temmar, l'homme qui a eu en charge ce lourd dossier nous en dit plus en allant au fond des difficultés qui nourrissent le sujet.
Le Quotidien d'Oran : La privatisation semble être un sujet lourd. Elle semble rencontrer une opposition plutôt générale, dans certains milieux politiques mais également parmi certains économistes.
Hamid TEMMAR : Mon opinion est que cette opposition reste précisément "générale". Elle s'attache au concept et à la réalité tels que décrits dans la littérature économique et politique essentiellement européenne et française. Je suis frappé de constater que les analystes algériens reprennent des arguments développés dans les analyses européennes qui ont mis en œuvre des programmes de privatisation dont les objectifs sont d'une toute autre nature que ceux du programme de privatisation que nous avons engagé jusqu'en 2009.
Q.O.: M. le Professeur, vous dites, si je comprends bien, que les économistes et les politiques algériens se réfèrent, pour évaluer la politique algérienne de privatisation, à des arguments qui concernent les expériences de privatisation des pays avancés qui sont d'une nature différente. Mais en quoi le programme algérien diffère des programmes menés de par le monde?
H.T.: Exactement, les arguments européens sont importés par nos analystes pour évaluer l'expérience algérienne alors que nous avons affaire à des cas historiquement totalement différents.
La politique de privatisation répond à trois questions: Quel est le champ d'application des opérations de privatisation ? Quel est le processus de décision en matière de privatisation? Comment privatiser, c'est-à-dire quelles sont les modalités de privatisation ? Ce sont trois questions de base qu'il faut considérer avec attention avant de porter un quelconque jugement ou faire une évaluation en la matière. Je suis toujours étonné par le fait que les commentateurs algériens ne se posent jamais ces questions. Notamment celle du champ de la privatisation et du processus de décision.
Je vais donc en préciser la portée. La première question qui semble technique, est en fait fondamentale, elle pose le problème de la doctrine de privatisation et la nature politique de cette dernière. Il en découle la réponse à la 2ème question: le processus appartient au gouvernement. La troisième question est l'affaire des experts qui doivent trouver la formule la moins coûteuse pour l'économie, généralement le Ministère ou l'Agence publique chargés des opérations de privatisation.
Je souhaite donc que l'on considère la première question qui, de fait, est source d'une extrême confusion malheureuse que nos experts -certains ont pourtant été responsables de privatisation- semblent tout à fait ignorer. Sur le plan opérationnel, on peut ramener la question aux choix des activités offertes à la privatisation. On peut dans ce cas distinguer deux domaines de privatisation : les entreprises publiques en charge d'un monopole (naturel) de gestion des utilités publiques et les entreprises commerciales (production de biens et services) opérant directement sur le marché. Nos experts et personnes politiques ne font jamais cette distinction. Elle est, essentielle.
Q.O.: En quoi une telle distinction concernant la nature du terrain d'application de la privatisation est-elle essentielle?
H.T.: Rappelons que la privatisation de toute entreprise peut aller de 0% à 100%. La privatisation est de 0% lorsque la propriété de l'entreprise reste publique mais la gestion est confiée à un opérateur privé qui ne met aucune part dans le capital et se rémunère sur le produit de l'entreprise (gestion concédée); le gestionnaire dispose, pour reprendre des termes juridiques de droits d'"usus" et de "fructus". La privatisation peut aller à 100% signifiant concrètement une cession de tous les droits de jouissance dont la propriété ("usus", "fructus" et "abusus"). Entre ces deux limites, toutes les situations peuvent exister.
La privatisation à 0% concerne généralement (mais pas toujours) les utilités publiques, le reste concerne (mais pas toujours) les entreprises commerçantes créatrices de biens et services. Dans le premier cas, je répète, la propriété reste publique mais sa gestion est confiée, sous contrat et contre paiement d'une prime, à un gestionnaire extérieur. Cela n'est pas très différent d'un cas de concession où la propriété peut rester publique mais le droit de jouissance est donné à un opérateur (mais contre contrat détaillé).
Q.O.: Pourriez-vous donc nous expliquer ce que recouvrent les utilités publiques et la nature de la gestion de ces utilités par opposition à la gestion commerciale.
H.T.: Le concept d'utilités publiques est difficile à cerner dans un système où le marché est la catégorie qui assure la meilleure allocation des ressources. Que faut-il considérer comme utilités publiques qui seraient des activités "naturelles" du secteur public car elles recèlent une forte préoccupation sociale, échappant ainsi à une valorisation purement marchande ?
On classait autrefois la sécurité (défense, police, prisons), l'éducation, la santé, les infrastructures et l'énergie (l'électricité), l'eau et l'assainissement, les communications et le transport (public) comme des utilités publiques financées sur le budget de l'Etat, et le prix du service fourni était généralement subventionné. En Grande-Bretagne la vague de privatisation enclenchée dans les années 1980 avec la politique de restructuration de l'économie britannique a fait voler en éclats une telle catégorisation. La concession et la sous-traitance de la gestion de certains services publics par des entreprises privées ont eu tendance à se généraliser, atteignant parfois même des secteurs régaliens tels que la sécurité ou la délivrance de visas. Chaque pays a retenu ce qui lui semblait être le domaine "réservé" du service public, et cédé ou confié le reste aux entreprises privées.
Q.O.: Nous ne sommes donc pas loin de la gestion déléguée qui serait donc une privatisation ?
H.T.: Exactement. Pendant la moitié des années 80 et surtout pendant les années 90 la privatisation pleine était encouragée dans tous les secteurs économiques y compris les utilités publiques. Au début des années 2000, un glissement est opéré, on ne parle plus de privatisation (donc de cession) des entreprises publiques en charge de la gestion des utilités publiques mais de concession et de privatisation de la gestion du Service public. A la suite du rapport de la Banque Mondiale sur la Stratégie de Développement du Secteur Privé (Février 2002) on assiste à peu près partout dans le monde, à une généralisation de l'appel à la gestion privée -contrat de gestion ou contrat de concession- dans les secteurs des utilités publiques. On l'a labellisé "gestion déléguée" ou encore et d'une manière plus élégante "Partenariat Public Privé".
Cette tendance d'aller à la gestion déléguée ou à la sous-traitance de services était faite au nom de la concurrence donc de l'efficacité du service public. L'histoire récente n'a pas vérifié que la privatisation de la gestion des services publics se traduise par une offre moins chère et plus diversifiée et soit en mesure de rencontrer d'une manière efficace les besoins des populations.
Une foule de travaux relève les effets pervers de ce type de privatisation : inégalités qui risquent de mener à l'explosion sociale, inégalités régionales, endettement des gouvernements vis à vis de STN, détérioration des systèmes scolaires et de santé (à côté, il est vrai, de succès limités et spécifiques). C'est ainsi, par exemple, que la gestion privée du système de distribution de l'eau ou de l'électricité vise la rentabilité des réseaux et exclut toute dimension de nature sociale ou toute préoccupation d'équilibre régional. Les expériences de privatisation des utilités publiques réalisées à ce jour, notamment dans les pays européens (Grande Bretagne) sont loin d'être concluantes en termes de bénéfices économiques pour la nation.
Q.O.: Quel serait donc le rapport entre ces effets pervers de la privatisation des Services Publics dans les pays développés et notamment l'Europe et la privatisation en Algérie?
H.T.: Il n'y a précisément aucun rapport étant donné que notre programme de privatisation excluait les utilités publiques. Mais le rapport, je le souligne donc, réside dans le fait que les analyses faites par certains experts algériens et les positions de personnes politiques nationales se réfèrent d'une manière systématique aux travaux et études européens qui ont porté, je le souligne, sur les expériences de privatisation des pays avancés. Qui concernent dans leur très grande majorité les privatisations des services publics. Ces travaux et études relèvent les effets pervers de la privatisation certes mais ceux des services publics.
Cette argumentation est ainsi reprise par nos analystes pour remettre en cause le programme de privatisation mis en œuvre en Algérie alors même que la privatisation menée dans notre pays depuis 2000 est d'une toute autre nature. Elle ne concerne en rien les utilités publiques. La privatisation dont nous parlons en Algérie concerne strictement les entreprises commerciales de production de biens et services marchands. Elle est de même nature que la privatisation que le monde en développement et les pays en transition ont mise en œuvre dans les années 80 et 90 dans le cadre de programme d'ajustement structurel. Ces programmes ont certes connu des ratés dans certains cas mais, s'il fallait donc se référer à l'histoire, on doit aller aux pays qui ont utilisé la privatisation pour réussir leur transition et se sont placés au niveau des économies émergentes les plus dynamiques, assurant une croissance endogène solide.
Le programme de privatisation que nous avons mis en œuvre jusqu'en 2008 s'inscrit dans un vaste projet de transformation de l'économie nationale. L'objectif principal est la pérennité de l'activité économique et la réhabilitation de la capacité de production physique, voire son expansion, et, par conséquent, la sauvegarde de l'emploi, l'accroissement de la productivité et la stabilité sociale au niveau de la communauté locale concernée.
Q.O.: Quelle leçon donc tirer de cette confusion de nature étymologique et historique?
H.T.: Elle est malheureuse car notre politique de privatisation pose une grande question et qui reste posée. Pourquoi les analystes algériens ne posent-ils jamais la question de cette autre privatisation qu'est le partenariat public-privé des entreprises de service public ou celle de la privatisation du système d'éducation et du système de santé? Pourtant les expériences de par le monde sont suffisamment riches et documentées pour qu'ils puissent raisonnablement poser la question.


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