Comme d'habitude et depuis longtemps, l'oranaise, comme toutes les femmes du pays, travailleuses ou au foyer, n'ont pas manqué l'occasion de la fin du jeûne pour exceller dans la préparation des gâteaux de l'Aïd durant les derniers jours du Ramadhan, ou de passer commande chez des pâtissiers spécialisés dans les gâteaux traditionnels où chez des particuliers activant dans leurs propres foyers. La fête de l'Aïd est intervenue, cette année, dans des conditions pour le moins exceptionnelles. Un confinement inédit imposé par une réalité sanitaire tout autant exceptionnelle. Jamais dans l'histoire une telle situation n'aurait été imaginable. Comme dans la majorité des pays musulmans, le gouvernement algérien a décidé de limiter drastiquement les possibilités de rencontres familiales, en imposant un «couvre-feu» dès le milieu de la journée, à travers tout le pays. C'est donc un événement et une expérience en soi que les Algériens étaient invités à vivre, ou à subir, en ces deux jours de «fête». Premier paradoxe douloureux de la situation, les retrouvailles familiales, sacralisées par la religion et la tradition sous le principe de «silat errahim» (pouvant se traduire par l'obligation d'entretenir les liens filiaux), étaient purement et simplement interdites en dehors du cercle pratiquement unicellulaire de la famille. Les Algériens, les oranais surtout, , qui certes ont fait montre d'indiscipline durant le mois de Ramadhan sur le plan du respect des consignes de prévention et des mesures de confinement partiel, étaient appelés à puiser dans leurs ressources psychologiques pour vivre cette occasion sans trop céder à la déprime. Tout concourra en effet à accentuer ce sentiment d'angoisse qui plane depuis plus de deux mois, à commencer par cette atmosphère de villes mortes que ne manquera pas d'installer l'interdiction de circuler. Les Algériens étaient tenus de rester chez eux et de se limiter à se souhaiter bonne fête de façon virtuelle, du moins distanciée. Finies les embrassades et autres accolades qui marquent d'habitude cette fête de la clôture du mois béni. Après un Ramadhan inédit, un Aïd tout autant inédit. La pandémie impose désormais ses règles et sa manière de vivre.