L'année dernière a vu l'enregistrement, au niveau du service de médecine légale, de plus de 200 cas de violence contre ascendant. Mais, on est bien loin, semble-t-il, de la réalité car la majorité des parents maltraités, notamment les mamans, supportent leur souffrance en silence, et ce, pour ne pas dénoncer leurs enfants. Quand l'affaire s'ébruite et va devant le tribunal, la maman maltraitée se présente à la barre, l'air craintif et s'enfonçant encore plus dans sa djellaba. La vieille qui se tient face au président de l'audience a du mal à contenir ses larmes. «Oui, finit-elle par lâcher doucement, oui c'est mon fils qui m'a frappée car je ne voulais pas lui donner l'argent pour s'acheter du kif». A ces mots, le fils indigne sursaute et lance: «Ce n'est pas vrai, votre honneur, elle ment !» Le visage du magistrat devient alors cramoisi en voyant la réaction du fils. «Vous n'avez pas honte, lui lancera l'homme de loi, traiter ainsi votre mère de menteuse !» Toujours craintive, la pauvre maman expliquera au magistrat: «Le problème, monsieur le juge, ne réside pas dans le fait que je ne veux pas lui donner de l'argent, mais je ne veux pas qu'il s'empoisonne avec ce kif». «Vous voyez, lancera une fois de plus le président de l'audience au mis en cause, cette mère que vous avez frappée et martyrisée voulait simplement vous protéger, comme le font toutes les mamans envers leurs enfants». Ne sachant quoi dire, le fils baissera la tête et marmonnera des paroles inaudibles. Ce genre de violence contre ascendant prend de plus en plus d'ampleur si on se réfère au nombre d'affaires traitées au niveau des tribunaux. C'est, en moyenne, deux à trois affaires par semaine. C'est surtout les mamans qui sont les plus vulnérables et deviennent, de la sorte, les souffre-douleur de leurs indignes enfants. Toutefois, l'amour maternel étant le plus grand, une fois devant le tribunal, lorsqu'elle se décide à porter plainte, la maman implore elle-même la clémence du magistrat de l'audience. Les exemples de cette violence au quotidien sont nombreux. Lorsque ce ne sont pas des coups, c'est des méchantes menaces. Ainsi, ce fils, à El Ançor, qui, sous l'effet de barbituriques, a menacé sa mère avec une hache. Elle ne devra son salut qu'à l'intervention rapide des voisins. Les peines prononcées dans ces cas-là sont de 1 à 5 ans de prison ferme. Mais, ce ne fut pas le cas pour cet autre fils indigne qui a tué sa mère avant de l'enterrer dans la cour du domicile. Là, la peine capitale a été retenue. Ou cet autre qui menacera de brûler la maison paternelle si sa mère ne la vendait pas pour lui donner sa part. Au niveau du service de médecine légale, on nous explique que ces mères sont choquées car, non seulement, elles gardent des séquelles corporelles, mais elles portent aussi des stigmates psychologiques que rien ne pourra effacer. Battue par l'enfant qu'elle a porté dans ses entrailles est très dure à admettre. Au niveau des urgences, nous expliquera une source médicale, certaines mamans maltraitées tentent de cacher la vérité en avançant qu'elles sont victimes d'accidents domestiques. Telle celle qui expliquera s'être blessée avec une vitre alors que les traces de violence étaient bien visibles. Interrogées sur le nombre de mères battues qui se sont présentées au service des urgences ou, encore, à celui de médecine légale, des sources sûres nous expliqueront que, parfois, il est enregistré jusqu'à quatre cas par jour.