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Jean-Marie Cléry ; L'impasse syrienne (3/3)
Publié dans AlgerieNetwork le 20 - 11 - 2011

Suite et fin de l'entretien sur la Syrie avec l'universitaire Jean-Marie Cléry. Il y est question de la dimension géopolitique de la crise syrienne, de son poids relatif, et de ce qu'il est possible d'envisager des développements ultérieurs de cette crise.
Q5 : Deux puissances régionales d'importance ont une attitude difficilement lisible sur la crise syrienne : Israël, d'une part, et la Turquie, d'autre part. Auriez-vous quelques lumières à nous apporter ?
JMC : Une certaine propagande naïvement sioniste a souvent tenté d'accréditer dans l'opinion publique occidentale l'idée que des sociétés arabes plus démocratiques fermeraient les yeux sur les méthodes de l'Etat hébreu et se jetteraient dans ses bras. Je pense que les dirigeants de Tel-Aviv, qui connaissaient mieux que quiconque les mécanismes de la pression qu'ils parvenaient à exercer sur des régimes fragilisés par la faiblesse de leur base populaire, n'ont pas cette naïveté. Ils ne semblent pas en tout état de cause avoir mis à ce jour tout leur poids dans la bataille contre le régime de Bachar al-Assad. Comme celle des Etats-Unis, leur posture n'est toutefois pas monolithique et demeure difficile à décrypter. Leur objectif le plus affirmé semble être pour l'heure d'affaiblir les capacités d'intervention extérieure du régime et son système d'alliance régionale plus qu'à le renverser.
Une considération pourrait toutefois infléchir cette option initiale et conforter les tenants israéliens de la chute d'Assad. Le Hezbollah a fait clairement le choix de soutenir son allié alaouite et donc la répression qu'il mène contre (notamment) la majorité sunnite du pays. Sans surprise, son image est donc en train de se dégrader en Syrie et elle sera presque nécessairement négative aux yeux d'un régime qui serait issu des rangs de la présente révolte. Il est fréquent d'entendre des victimes de la répression affirmer – sans d'ailleurs que leurs propos puissent être vérifiés, que des éléments armés du Hezbollah pour certains (« On les reconnaît parfaitement à leur accent libanais », insistent les habitants de Hama), des conseillers iraniens pour d'autres, participent à la défense répressive du régime. Si l'on ajoute à cela la part de la variable sectaire (qu'il ne faut pas surdéterminer, mais que l'on ne peut pour autant ignorer), la rue majoritairement « sunnite » aurait logiquement une moindre propension que les élites alaouites (qui doivent de surcroît une partie de leur légitimité religieuse au soutien que leur ont apporté les oulémas chiites iraniens et sud-libanais à partir de 1973) à soutenir le Hezbollah chiite. En ce sens et dans ces limites étroites (car le lien entre Damas et le Hamas serait, dans cette logique, renforcé par une telle transition), Israël pourrait souhaiter voir accéder une majorité sunnite à Damas.
S'agissant de la Turquie, il est exact que rien n'était prévisible dans la fermeté d'Ankara et son désaveu des méthodes répressives de Damas. Depuis le traité de coopération turco-syrien signé le 9 octobre 2009, les relations bilatérales étaient au beau fixe. Les circulations humaines et commerciales s'étaient élevées en flèche, au bénéfice économique et politique des deux pays. Une certaine empathie à l'égard de la revendication de la majorité sunnite fait peut-être partie de l'alchimie de la décision politique turque. Mais les élites au pouvoir à Ankara ont elles-mêmes mené un long combat contre un régime militaire répressif et manipulateur. Il n'est donc pas invraisemblable qu'elles aient aujourd'hui la sagesse de ne pas vouloir construire l'avenir régional sur le soutien à un clan politique dont tout le monde s'accorde à reconnaître qu'il est, à plus ou moins court terme, condamné.
Q 6 : D'une part la Turquie, malgré l'aggravation de son différend diplomatique avec Israël, semble reprendre tout son poids au sein de l'OTAN avec l'accord récent sur le déploiement de radars dans le dispositif du bouclier anti-missiles (censé protéger l'Europe de missiles iraniens mais perçu comme hostile par la Russie). Et de plus les vues d'Ankara sur la crise syrienne convergent avec celles des pétromonarchies et de Washington, s'opposant à mesure de ce rapprochement à celles de l'Iran - avec lequel elle se rapprochait depuis quelques temps. D'autre part le Hamas, même si Khaled Mechaal a semble-t-il refusé la proposition qatarie de quitter Damas pour Doha, va très certainement s'éloigner substantiellement de Damas, alors qu'a lieu une réconciliation inter-palestinienne Hamas-Fatah. Assiste-t-on à l'émergence d'une alliance de pays et d'organisations spécifiquement sunnites s'opposant de manière "modérée" à la politique israélienne et qui bénéficierait de l'indulgence de Washington ? Les développements de la crise syrienne, avec sa charge communautaire, ne sont-ils pas en train de redessiner les relations géopolitiques moyen-orientales selon des lignes plus confessionnelles, au détriment de déterminants politiques (nature du régime, position vis à vis des USA, position vis à vis d'Israël, ...) ?
JMC : Une remarque de principe d'abord. Sans nier leur importance, je me refuse à lire les enjeux de la crise syrienne par le seul prisme de la géostratégie des grandes puissances ou des puissances régionales. Je ne suis pas enclin non plus à céder à la logique pernicieuse des solidarités trop automatiques que génère parfois, si noble soit-il, le soutien aux dominés du conflit israélo-palestinien. Je ne suis ensuite pas aussi pessimiste que d'autres sur l'importance du versant négatif – si réel soit-il - de la participation de l'OTAN à la chute de Kadhafi et apparentes béquilles franco-britannique de l'actuel Conseil de Transition. Le tournant spectaculaire de la politique égyptienne vis-à-vis de l'Etat hébreu confirme sans surprise qu'une population qui se libère de la tutelle d'un dictateur n'est pas prête à se laisser imposer de l'extérieur la ligne politique qu'elle vient de désavouer sur la scène interne. Je me refuse donc à surestimer la capacité d'influence, ou de nuisance, de BHL et de ses sponsors, demain, en Libye, ou celle des occidentaux en général. J'ai dans tous les cas la conviction que cette influence occidentale n'aura jamais plus le caractère décisif et léonin qu'elle a pu avoir au 20ème siècle ou dans la première décennie du 21ème. Enfin, quitte à être qualifié d'optimiste ou d'angéliste, je me refuse par dessus tout à sous-estimer la maturité des forces politiques qui, toutes tendances confondues, sont en train d'émerger de ces dynamiques arabes de dépassement de l'autoritarisme.
Cela étant dit, le risque d'une recomposition sectaire du Proche Orient qui cristalliserait le fameux « croissant chiite » - mis en scène et cultivé par les officines américaines et israéliennes au moins aussi sûrement que par les imams du vendredi – existe bien ; mais ce retour en arrière ne me paraît pas du tout inéluctable. Il devrait se faire au détriment d'alliances intuitives, transconfessionnelles (la défense d'intérêts collectifs dans le conflit israélo-arabe, le rejet de la présence militaire américaine ou occidentale) qui me semblent plus solidement ancrées encore que les appartenances primordiales dans toutes les mailles du tissu politique régional, toutes confessions ou tendances confondues.
Q 7: Alors que la Syrie semble s'enfoncer dans le cycle répression/manifestations, un scénario de sortie de crise à court terme vous paraît-il possible ?
JMC : S'agissant de l'évolution d'une situation complexe, qui dépend en partie au moins de variables qui ne sont pas exclusivement nationales, il est plus que jamais hasardeux de parler au futur. Après avoir pris cette indispensable précaution, disons qu'il est aujourd'hui très aléatoire d'imaginer une sortie de crise à court terme. L'hypothèse d'un processus réformiste suffisamment sérieux pour générer une baisse significative du niveau de la violence paraît jusqu'à ce jour peu crédible. Pour être efficace, l'ouverture politique devrait en effet être autre que purement cosmétique. Elle impliquerait donc que l'équipe au pouvoir, qui dispose encore de solides ressources militaires et financières, accepte de s'en dessaisir à plus ou moins court terme. Même si au cours du mois de Ramadan le niveau des manifestations ne s'est pas élevé comme attendu par l'opposition et que l'initiative (répressive) a parfois paru appartenir au régime, la détermination des manifestants (dont certains plaident désormais ouvertement pour l'action armée) est telle qu'il est peu pensable que celui-ci puisse une nouvelle fois passer seulement en force et, comme après Hama il y a trente ans, gagner par la seule répression une nouvelle décennie de paix civile. A défaut de les quantifier, on peut recenser les ingrédients qui vont donner forme à l'avenir proche de la Syrie : morosité du moral d'une partie de l'opposition interne face au relatif succès du cocktail répression/désinformation, lenteur de l'organisation d'une opposition externe dépourvue de personnalités représentatives et « plombée » par le soutien trop ostentatoire d'acteurs occidentaux particulièrement illégitimes dans la région, volonté de la Russie et plus encore du géant chinois de continuer à affirmer leur « différence syrienne » ; en sens inverse, inflation et tensions sociales inévitables, « états d'âme » des alliés iranien et libanais du premier cercle, rumeurs encore invérifiables de scissions dans les rangs sunnites de l' armée et de certaines fractions des personnels de sécurité, « militarisation » enfin, dans le nord du pays notamment, d'une fraction au moins des opposants.
Si la présence d'observateurs internationaux est largement réclamée dans les rangs de l'opposition, l'hypothèse d'une intervention étrangère à la libyenne semble quasi unanimement rejetée. «Cela au moins, c'est sûr » s'insurge une damascène pour tenter d'éclairer cette opacité de la crise qui la désarçonne : « Il ne faut pas d'intervention étrangère, il faut laver notre linge sale en famille ». Et de poursuivre. « Le problème, il est vrai, c'est que, par les temps qui courent, on ne sait plus vraiment qui fait partie de la famille ».
Si la recette du futur syrien proche est complexe, il reste aujourd'hui plus que jamais difficile d'y lire la promesse d'une amélioration structurelle à court terme.
Merci beaucoup M. Cléry.


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