"Des femmes de cœur" est l'intitulé du roman de Nina Koriz présenté jeudi soir par l'auteur au Centre culturel algérien (CCA) à Paris. Il se présente comme un hommage à la contribution des femmes algériennes et européennes, anonymes ou connues et dont on oublie souvent les sacrifices qu'elles ont consentis durant la guerre de libération nationale par amour à l'Algérie. L'histoire racontée dans ce livre publié aux Editions Zyriab débute en 1991 à Paris. Ambre est une jeune comédienne française qui postule à un casting.Il s'agit pour elle d'interpréter le rôle d'une jeune algéroise et le film doit être tourné à Alger. Elle est excitée par ce projet car il s'agit d'un rôle qui l'enchante et surtout parce que ses parents sont des pieds noirs, d'origine italienne qui ont vécu toute leur vie en Algérie et pour elle, ce sera l'occasion de connaitre ce pays qu'elle aime déjà et partir à la recherche de son identité. Cette quête identitaire d'Ambre va prendre la forme d'une enquête entre la France et l'Algérie, sur la passé de ses parents et l'histoire de l'Algérie durant la guerre de libération nationale. Cette enquête va la plonger dans un imbroglio sentimental et politique qui aura trente ans plus tôt bouleversé la vie de cinq adolescents, dont sa mère Sylvia. Et c'est en déterrant leur passé qu'elle va comprendre qui elle est, et va surtout découvrir quel a été le rôle des femmes, qu'elles soient musulmane, juive, ou chrétienne sur le sol algérien ou en France durant cette guerre sanglante que livraient les autorités coloniales à un peuple qui réclamait son indépendance. "J'ai centré ce roman sur les femmes car elles sont les grandes oubliées de l'histoire. Plus de cinquante ans après la guerre d'Algérie, on constate qu'il y a eu très peu d'écrits et de rares films sur leur participation à la lutte de libération du joug colonial" , a-t-elle regretté. "j' ai volontairement choisi de raconter une histoire à travers des destinées de femmes, car elles ont été nombreuses (Algériennes et européennes) à être trop souvent reléguées à des rôles de faire valoir, alors que les témoignages que j'ai pu recueillir, m'ont appris à quel point leur contribution a été plus importante et que surtout, il n'y a pas eu engagement féminin mais surtout des parcours individuels", a expliqué Nina Koriz au public du CCA. "Pour écrire ce livre, j'ai choisi de rencontrer des femmes qui n'ont jamais l'habitude de parler. Celles qui ne se sont jamais racontées mais qui ont accepté de le faire quand elles ont su que leur témoignage pourrait servir à l'écriture d'un roman et non pas à l'interview d'une journaliste", a ajouté l'auteur. "Surprise de leur méfiance envers les médias, je leur en ai demandé les raisons. Elles m'ont dit alors leur lassitude de lire, d'entendre, de voir l'histoire tronquée, manipulée, en fonction des idées ou des intérêts de chacun ", a-t-elle poursuivi. Apporter un peu de baume aux cœurs blessés.. "Ce sont des femmes apaisées que j'ai eu la chance de rencontrer. Tel est l'objectif de ce roman : apporter un peu de baume aux coeurs blessés et s'ouvrir au pardon. J'espère de tout c£ur qu'il y parvienne", a souhaité Nina Koriz. "C'est parce que je partage leur sentiment que j'estime que la réalité historique émergera du terrain", a-t-elle dit, ajoutant qu'il faut que "ceux qui ont vécu cette guerre et qui souvent ont été victimes et héros, puissent nous dire leur vécu avant qu'il ne soit trop tard". Elle a également souligné que l'écriture de ce roman a été pour elle, "un émouvant voyage dans le temps, à travers les archives, les documentaires, des livres écrits par des historiens et des politiques". "Mon plus beau souvenir demeurera cependant les échanges avec ces femmes qui m'ont permis de revivre avec elles le temps d'un après-midi, la peur, le choix, la détermination, la douleur et la joie de la libération", a souligné Nina Koriz. Ancienne élève du prestigieux Cours Saint Simon de théâtre de Paris, Nina Koriz tourna en 1992 "Automne, Octobre à Alger", de Malik Lakhdar Hamina, un long-métrage sur la période terroriste en Algérie, primé dans plusieurs festivals. Ce film politique sera le déclencheur de sa prise de conscience et son engagement auprès des personnes en souffrance du fait de leur exclusion sociale ou raciale. Ses rencontres avec des femmes de toutes générations la font réfléchir aux graves répercussions que génèrent les évènements politiques sur la destinée des femmes des pays du sud. De retour en France, elle décida de se former au métier de psychothérapeutes et fonda une école où elle accompagne des femmes de toutes origines vers leur insertion sociale et professionnelle. « Des femmes de cœur » est son premier roman.