La légendaire gare ferroviaire de Maillot (commune d'Ahnif) dans la daïra de M'Chedallah est tombée dans l'oubli et n'est plus qu'un vieux souvenir depuis la suppression de l'arrêt du train et ce depuis plus d'une dizaine d'années. Aucun geste n'a été fait pour arrêter sa dégradation effrénée, malgré le maintient de quelques gardiens. Cette gare historique, construite aux environs de 1870, a connu son plein essor durant la période de l'occupation française. Cela en raison de l'implantation de centaines de colons établis dans les vastes plaines de M'Chedallah, et dont les récoltes sont acheminées - à partir de cette gare - jusqu'aux ports d'Alger et de Béjaïa pour être embarquées à destination des pays d'Europe de la rive nord de la Méditerranée tels, la France, l'Espagne, et l'Italie…etc. Ce qui s'ajoute aux centaines de voyageurs utilisant ce moyen (le train) quotidiennement. Au jour d'aujourd'hui, mis à part le passage des trains, rien ne vient troubler la quiétude fantomatique de cette gare qui offre un piètre visage ainsi qu'une dégradation assez avancée de son infrastructure et de ses équipements. La bâtisse plus que centenaire ne tient debout que par miracle ; car, n'ayant bénéficié d'aucune rénovation, elle ressemble à s'y méprendre, à une station ferroviaire du Far West. Il ne manque au décor que les chevaux, les chariots et les cow-boys, comme pour ajouter une note funeste au lugubre panorama de l'endroit. La suppression de l'arrêt de Maillot-gare pénalise l'une des daïras, la plus peuplée, de la wilaya de Bouira, ainsi que les romantiques et les nostalgiques d'un voyage en train comme au bon vieux temps. Cette gare revient dans tous les récits de l'ancienne génération et constitue un pan important de la mémoire collective. Il fût une époque où cette gare était l'unique moyen de locomotion et de déplacement pour la population, les contingents d'indigènes de la commune mixte de Maillot mobilisés pour participer à la 1ère et la 2ème Guerres mondiales ont été acheminés à partir de cette gare, soit vers Constantine ou Alger pour partir au front libérer la France. Combien de fois Maillot-gare a été citée par les poètes locaux pour décrire le déchirement de la séparation des familles qui accompagnent, leurs enfants mobilisés, jusqu'au train ? C'est aussi au niveau de cette même gare qu'ont été embarqués les déportés vers Cayenne et la Nouvelle Calédonie, comme d'ailleurs, c'est à partir de cette gare que les richesses de la région ont pris le départ pour garnir les tables européennes au moment où la population autochtone était décimée par la faim et le typhus. C'est enfin au niveau de la gare Maillot que sont descendus, drapeau à la main, en 1962, les moudjahidine de la région qui revenaient des frontières notamment tunisiennes. Maillot-gare est donc l'un des plus anciens vestiges de l'Algérie colonisée, elle mérite un tout un autre sort que celui de l'abandon et la désertion.