On peut faire autant de lois, la facilité du bureaucrate en panne d'idées est de faire toujours des lois, les expériences historiques montrent qu'elles seront inefficaces sans s'attaquer au fondement du développement, à savoir la bonne gouvernance et la valorisation des compétences. Comme il serait erroné d'assimiler la bonne gouvernance aux seuls indicateurs économiques, comme le niveau des réserves de change, de la croissance du PIB/PNB, vision mécanique, les maladies apparentes du corps social étant l'inflation et le chômage. La crise interne que connaissent bon nombre d'Etats dans le monde ne touche pas seulement à ses fonctions et à sa structure, mais concerne davantage la capacité de l'Etat à asseoir sa légitimité ainsi qu'à formuler des politiques publiques en phase avec les besoins socio- économiques tenant compte tant des nouvelles mutations mondiales qu'internes, en fait à l'écosystème. La bonne gouvernance est définie par les institutions internationales dont l'ONU, comme étant l'ensemble des traditions et institutions par lesquelles le pouvoir s'exerce dans un pays avec pour objectif le bien de tous. Elle comprend les procédés par lesquels les titulaires du pouvoir sont choisis, contrôlés et remplacés, la capacité du gouvernement à gérer efficacement les ressources et à appliquer des politiques solides et enfin le respect des citoyens et de l'Etat envers les institutions régissant les interactions économiques et sociales intervenant entre eux. Selon les Nations unies, la bonne gouvernance comprend les éléments suivants : donner à tous, hommes et femmes, la possibilité de participer au processus décisionnel; -la transparence : découlant de la libre circulation de l'information; la sensibilité des institutions et des processus vis-à-vis des intervenants ; le consensus afin que des intérêts différents soient conciliés afin d'optimaliser le bien être général; l'équité afin que tous, hommes et femmes aient des possibilités d'améliorer leur niveau de vie ; l'efficience des institutions afin qu'ils produisent des résultats qui satisfont aux besoins tout en faisant le meilleur usage possible des ressources; la responsabilité des décideurs du gouvernement, du secteur public/privé et des organisations de la société civile et enfin une vision stratégique : des leaders et du public qui est nécessaire pour réaliser un tel développement et très récemment la prise en compte de la préoccupation environnementale. Pour les mesures de la bonne gouvernance, sur le plan politique et institutionnel on distingue : la voix citoyenne et responsabilité qui mesurent la manière dont les citoyens d'un pays participent à la sélection de leurs gouvernants, ainsi que la liberté d'expression, d'association et de presse; la stabilité politique et absence de violence qui mesure la perception de la probabilité d'une déstabilisation ou d'un renversement de gouvernement par des moyens inconstitutionnels ou violents, y compris le terrorisme ; l'efficacité des pouvoirs publics qui mesure la qualité des services publics, les performances de la fonction publique et son niveau d'indépendance vis-à-vis des pressions politiques ; la qualité de la réglementation qui mesure la capacité des pouvoirs publics à élaborer et appliquer de bonnes politiques et réglementations favorables au développement du secteur privé; l'Etat de droit qui mesure le degré de confiance qu'ont les citoyens dans les règles conçues par la société et la manière dont ils s'y conforment et en particulier, le respect des contrats, les compétences de la police et des tribunaux, ainsi que la perception de la criminalité et de la violence ; la lutte contre la corruption qui mesure l'utilisation des pouvoirs publics à des fins d'enrichissement personnel, y compris la grande et la petite corruption, ainsi que «la prise en otage» de l'Etat par les élites et les intérêts privés. Ces indicateurs posent la problématique des liens entre la bonne gouvernance en distinguant : les institutions politiques et juridiques qui contribuent à la construction d'un Etat de droit aussi d'assurer l'accès de la population à la justice et à la sécurité ; les institutions économiques qui assurent le fonctionnement efficace et efficient de l'activité économique, la gestion optimale des ressources économiques et les institutions sociales et communautaires qui assurent l'amélioration de la qualité de la santé et de l'éducation des populations ainsi que leur consultation et leur participation au processus de développement. Devant privilégier les intérêts nationaux , il serait utile pour les leaders algériens afin de mettre en pratique les outils mis en relief précédemment d'analyser propositions à partir des importants travaux de bon nombre d'économistes, de sociologues et experts en sciences politiques qui loin de la théorie abstraite ont proposé des solutions à partir d'enquêtes sur le terrain. Les différents travaux de Aglietta et Boyer sur la régulation, le prix Nobel en sciences économiques d'Elinor Ostrom pour son analyse sur les biens communs, les apports de Ronald Coase et de Williamson pour leur analyse de la gouvernance économique, qui approfondissent celle du fondateur de la Nouvelle économie institutionnelle, (NEI), ayant comme chef de file, Douglass North, ont démontré que les institutions ont un rôle très important dans la société, déterminent la structure fondamentale des échanges humains, qu'elles soient politiques, sociales ou économiques. Les institutions impliquant la société constituent un des facteurs déterminants de la croissance économique de long terme, le terme d'institution désignant les règles formelles et informelles qui régissent les interactions humaines», et aussi comme les règles du jeu qui façonnent les comportements humains dans une société. D'où l'importance des institutions pour comprendre la coopération sociale, comment contrôler la coopération des différents agents économiques et faire respecter le contrat de coopération. Parce qu'il est coûteux de coopérer sur le marché, il est souvent plus économique de coopérer au sein d'une organisation. En plus, ces analyses, en introduisant l'importance de la confiance et du «capital social» comme ciment de la coopération, font progresser également la gouvernance environnementale et locale, dans le sens d'une plus grande décentralisation avec l'implication des acteurs locaux dans la mise en place des règles, loin d'une réglementation autoritaire centralisée, la diversité institutionnelle étant nécessaire pour comprendre la complexité de notre monde. Car avec les nouvelles technologies d'information, le monde est devenu une grande maison en verre, influençant les comportements et rendant nécessaire une nouvelle gestion tant des institutions que des entreprises, la cité ne pouvant plus être gérée comme par le passé expliquant sur le plan politique le divorce croissant Etat-citoyens. Les enquêtes sur le terrain donnent à penser que là où des réformes sont engagées, la gouvernance peut être améliorée et existent des liens dialectiques entre mauvaise gouvernance, bureaucratie et extension de la sphère informelle et corruption. En conclusion, l'on ne doit pas assimiler bonne gouvernance et la démocratie à l'occidentale. Comme l'a montré l'économiste indien Amara Sen, prix Nobel de sciences économiques, il y a lieu de tenir compte des riches anthropologies culturelles africaines, de concilier la modernité et les traditions, une nation sans son histoire et sa culture étant comme un corps sans âme. Et l'Algérie, sans chauvinisme, sur la base d'une juste réciprocité(partenariat gagnant-gagnant) avec ses partenaires étrangers, devra privilégier avant tout ses propres intérêts, n'existant pas de sentiment dans les relations internationales. Abderrahmane Mebtoul Professeur des Universités