Cet été avec l'arrivée massive des nationaux établis à l'étranger, notamment en France, et les départs de résidants algériens vers l'Europe, instruction a été donnée aux brigades canines des Douanes algériennes, en l'occurrence celles de Annaba, de redoubler de vigilance en matière de contrôle des véhicules en provenance de l'étranger via les frontières maritimes et terrestres. A signaler que les brigades sont appelées à être renforcées par une première acquisition d'une vingtaine de chiens renifleurs d'ici 2010, en plus du projet de création d'un laboratoire de douane pour assurer tout type d'analyse ayant particulièrement trait aux drogues et autres substances et psychotropes. « Car, actuellement, explique le directeur régional des Douanes de Annaba, Z. Haderbache, les narcotrafiquants ont changé de mode opératoire quant à l'introduction en Algérie ou à l'exportation vers l'Europe d'importantes quantités de drogue. Ceux-ci utilisent des jeunes femmes conduisant des véhicules haut de gamme, à bord desquels peuvent être dissimulés plusieurs kilos de produits prohibés ». Selon la même source, outre les caches d'origine existant déjà dans certains types de voitures (sièges arrière et bas de caisse), les dealers recourent le plus souvent aux pneus, d'autant qu'un seul peut contenir jusqu'à 32 kg de kif. Notre interlocuteur précisera à ce sujet : « Nous avons pu déjouer plusieurs manœuvres tendant à introduire de grandes quantités de drogue au niveau des points d'entrée et de sortie des ports. Nous essayons d'être en phase avec chaque nouveau mode opératoire des trafiquants. A titre d'exemple, pour détourner le flair des chiens antidrogue, ces derniers imprègnent ces produits de gasoil, d'épices, de poudre de café, de sang et même de crottes de chiens. Nous procédons à la formation régulière de douaniers maîtres-chiens à l'Ecole nationale des brigades des douanes de La Rochelle en France. Là-bas, les chiens renifleurs les plus utilisés sont les labradors, caniches, english springers spanials, braques ou bergers allemands. » Pour ce qui est des passeurs, le directeur des Douanes citera trois catégories : des personnes d'origine algérienne, des binationaux et des étrangers d'origine tunisienne, française et suisse. Par ailleurs, vraisemblablement alarmées par les saisies de ces produits, en nette évolution d'année en année, surtout en 2006 et 2007, la Douane algérienne ont décidé de mettre le paquet à l'effet de contrer ce phénomène. « En effet, si l'Office national de prévention et de lutte contre la toxicomanie fait état de la prise, l'année écoulée, de 16,5 t de résine de cannabis et de 23 kg de cocaïne contre 10 t en 2006, du côté des douanes, l'on a enregistré des saisies respectives de 3,422 et 3,069 t de kif traité », note Z. Haderbache. D'après ce dernier, toutes ces données ont servi à l'analyse du trafic illicite de drogue et de substances psychotropes en Algérie, effectuée par la direction de la lutte contre la fraude des Douanes algériennes afin de pouvoir dresser une cartographie de ce phénomène et de renseigner leurs homologues étrangers dans le cadre de la coopération, l'objet étant d'échanger les informations sur les modes opératoires utilisés par les trafiquants, les itinéraires empruntés pour l'acheminement de ces produits et l'affiliation des personnes impliquées aussi bien dans l'importation que dans l'exportation. Le cannabis est introduit à partir du Maroc (premier producteur mondial) à travers toute la bande frontalière ouest du pays, notamment les régions de Tlemcen et Béchar. Pour contrecarrer l'étendue du trafic et mieux maîtriser la situation, il est prévu la mise en place, d'ici à 2010, de 21 nouveaux postes de surveillance appuyés des moyens matériels et humains nécessaires », considère le responsable. « Le trafic par voie terrestre s'intensifie de plus en plus. », ajoute-t-il « L'ancien itinéraire utilisé par les narcotrafiquants consistait à acheminer cette drogue en empruntant la route du Sud, vers la Libye (un marché très juteux) via la Tunisie à partir du poste frontalier est de Oum T'boul », explique notre interlocuteur. Or, actuellement, les narcotrafiquants semblent privilégier la période estivale et les voies maritime et aérienne pour alimenter le marché européen. L'itinéraire est ainsi orienté vers tous les grands ports d'Algérie, dont ceux d'Alger, Oran, Béjaïa, Skikda, Ghazaouet et Aïn Témouchent. Pour ce qui est de la voie aérienne, les aéroports de Annaba et d'Oran demeurent les plus sollicités par les narcotrafiquants. Aussi l'été demeure-t-il pour eux la période adéquate pour introduire en Algérie des quantités conséquentes de psychotropes en provenance d'Europe, de France en particulier. Ces substances sont sous forme de comprimés (Rivotril, Subutex et Di-Hidan). Ce que confirme le directeur régional lorsqu'il affirme : « Ces substances, émanant du trafic en Europe, sont introduites pour alimenter les marchés libyen et algérien où des minicartels de trafic de ce genre de drogue se sont solidement installés à l'est du pays et plus précisément dans les villes d'El Tarf et de Annaba. » En la matière, les chiffres avancés, relatifs aux deux exercices précédents et la nette évolution du trafic, sont effarants. En effet, en 2006, pas moins de 2050 comprimés Rivotril avaient été saisis par les services des douanes contre près de 40 000 cachets de Subutex également saisis en 2007, les plus grandes prises étant enregistrées durant les trois mois de l'été. Ces substances, une certaine catégorie de la jeunesse algérienne en raffole, notamment en période estivale où toutes les folies sont « permises ».
