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Khaled Nezzar, ancien ministre de la défense : « S'il y a eu un complot, il était en dehors de l'Armée et contre elle »
Publié dans El Watan le 05 - 10 - 2008

Il refuse de s'exprimer encore une fois sur le sujet, en estimant en avoir trop dit, mais il reprend les extraits de plusieurs de ses déclarations publiques et de ses livres témoignages, pour éclairer l'opinion publique sur une étape des plus douloureuses de l'Algérie. Dans ses écrits, le général accuse directement l'ancien président, Chadli Benjedid, qui avait dirigé le pays de la fin 1979 jusqu'à janvier 1992.
Pour le général, s'il y avait un complot, « il était en dehors de l'Armée, et peut-être même dirigée contre elle ». Mais, il révèle que l'explosion populaire était prévisible vu la situation qui a régné dès les débuts des années 80. De nombreux événements ont secoué la politique interne sous le règne de Chadli Benjedid, et ont connu leur paroxysme durant l'été 1988, très chaud par « les rumeurs et les révélations sur la famille du président et certains membres de son entourage ». Toutes les institutions de l'Etat, la Présidence, les services et le gouvernement étaient tiraillées par des luttes de clans, au point où aucune ne faisait confiance en l'autre. « On ne peut comprendre les déboires futurs de l'Algérie sans faire le constat du manque tragique des cadres compétents au sommet de l'Etat. Cette quasi-mort cérébrale a été illustrée par la venue au pouvoir d'un militaire, sans envergure politique ni charisme. Au lieu de s'entourer de vraies compétences en mesure de l'aider, Chadli ouvrit les portes à la médiocrité et à l'irresponsabilité. La parentèle arrogante et corrompue transforma la Présidence d'abord en cour puis en sérail. Les décisions qui engageaient le pays étaient prises dans des cercles étroits, en fonction d'intérêts claniques plutôt qu'au bénéfice du pays. Il plaça des personnes fidèles à sa personne aux plus hauts postes de responsabilité de l'Etat (…)Chadli usera de tous les stratèges pour se maintenir au pouvoir. » « L'équilibre régional », son leitmotiv, lui permettra d'opposer les factions aux factions pour perdurer (…). Pour illustrer ce choix des hommes, évoquons l'un de ces commis qui porte la responsabilité de la faillite qui a conduit le pays à la catastrophe de 88 : Abdelhamid Brahimi, nommé chef du gouvernement, qui était le type même de parvenu qui a construit sa carrière politique sur le faux-semblant et l'artifice. Il avait mis en pièces l'œuvre de Belaïd Abdeslam et de Sid Ahmed Ghozali, écrit M. Nezzar, en investissant dans le gâchis au détriment de la productivité et fait perdre à Sonatrach le marché gazier américain, qui aurait suffi à amoindrir les effets de la crise financière du milieu des années 80. Dans son analyse, l'ancien ministre de la Défense affirme que Abdelhamid Brahimi dépensait l'argent du contribuable sans compter. « Le plan anti-pénurie (PAP) c'était lui, l'allocation devises généralisée, c'était lui (…) ; les années Brahimi, avant le réveil de 1986, avaient fait le bonheur de Tati et autres marchands de pacotille. Hadj Yala, alors ministre des Finances, ne cessait de dire que l'Algérie était riche, et des contrats colossaux étaient signés. Les gouvernements français qui se succédaient poussaient à la dépense et l'Algérie ne faisait que s'endetter (…) ; l'immense gâchis et l'endettement se faisaient au nom du slogan « Pour une vie meilleure » qui devait accorder à Chadli l'affection des Algériens et donc son maintien au pouvoir… ».
Les institutions minées par les luttes de clans
Selon le général, le maître d'œuvre de cette politique qui « anesthésiait » Chadli et lui faisait croire au contentement généralisé est en fait Abdelhamid Brahimi, lequel, selon Nezzar, était également l'auteur du mot d'ordre « partagé » par tous les responsables politiques de l'époque, « ne rien dire qui puisse déstabiliser le président » et si bien répercuté par Ghazi Hidouci, le futur ministre de l'Economie, « la crise est ailleurs ; elle ne concerne pas l'Algérie ». Il ajoute que sur le plan moral, la corruption, l'enrichissement rapide, les scandales, le chômage, les difficultés quotidiennes auxquels sont confrontés les citoyens ont fini par discréditer les dirigeants et provoquer la haine de l'Etat et tout ce qui l'incarne. Lorsque des hommes de bonne intention, comme El Hadi Lakhdiri, attiraient l'attention de Chadli, Brahimi, Hidouci et Messaâdia le « ré-anesthésiaient » très vite en lui rappelant les grandes réussites de son ère et le calme qui régnait sous sa direction. En fait, selon Nezzar, la quiétude devait déboucher un jour ou l'autre sur des explosions incontrôlées. « Les premières émeutes de Constantine n'ont pas été analysées à leur juste signification puisque l'approche a été uniquement sécuritaire ». L'ancien ministre de la Défense rappelle également que l'armée était en pleine restructuration à l'époque. L'état-major a été créé en 1984, date à laquelle ont commencé les mises en place des commandements des forces avec des structures propres, une répartition des missions et des tâches mieux définies, notamment dans les fonctions d'organisation, de préparation et d'emploi, de gestion et d'administration. Pour mener cette politique de modernisation, Nezzar est nommé en 1987 commandant des forces terrestres, du fait de sa connaissance du terrain, vu qu'il est passé par plusieurs régions militaires en tant que chef, mais aussi parce qu'il avait le pouvoir de s'adresser directement au chef de l'état-major, le général Abdellah Belhouchet, et au président Chadli. Il lui fallait, dit-il, ménager certains de ses anciens compagnons d'armes moins pourvus sur le plan des connaissances techniques, amenés par la force de la modernisation soit à céder leur poste, soit à se désister de leurs prérogatives. « L'imbrication du politique et du militaire était telle que la chose n'était pas toujours aisée (…) J'y gagnais des inimitiés qui ont continué pendant longtemps à refaire surface. L'unité du commandement a eu pour effet positif une unification des différents états-majors et a facilité la création de grands ensembles et surtout contribué à briser définitivement les ‘'fiefs régionaux'' qui s'étaient constitués pendant deux décennies. Ne parlait-on pas alors du bey de Constantine ou du proconsul d'Oran ?. » Selon Nezzar, la mise à la retraite de certains de ses compagnons d'armes, y compris parmi ceux qui ont porté Chadli au pouvoir. Le projet de restructuration de l'ANP a été combattu, ne fût pas pour ce dernier facile à signifier. La réforme de l'ANP a donc été combattue par des personnes très proches du président. Il note, néanmoins, qu'il est vrai que c'est l'armée qui a porté Chadli au pouvoir. Selon lui, la politique ne se décidait pas à l'état-major, mais à la présidence de la république et au gouvernement, où les luttes de clans se sont accentuées. Il note que le détonateur des émeutes a été le fameux discours de Chadli du 19 septembre 1988, où il appelait les Algériens à manifester, à « bouger ». C'était le coup d'envoi de la révolution qui devait abattre les caciques et ébranler les chasses gardées pour la refonte du système. « Tout était ficelé pour faire passer mes réformes devant le comité central du FLN. Le slogan sera entendu et le mauvais coup minutieusement préparé. Même le projet de révision constitutionnelle était prêt, puisque le référendum a eu lieu moins de deux mois après les émeutes. » Il explique que cela a commencé par l'évacuation de l'ANP d'Alger, peu de temps avant les événements, selon le canevas du couple Chadli- Hamrouche. « Chadli a imposé et poussé le perfectionnisme jusqu'à ordonner la fermeture de l'atelier de confection de treuillis et de chaussures implanté dans l'avenue de l'ALN. Mustapha Cheloufi, alors secrétaire général du ministère de la Défense, qui voulait prendre plus de temps dans le but de trouver d'autres locaux, a eu pour réponse : ‘'Alors, tu refuses d'obéir ?'' et il a dû s'exécuter. Chadli me bouda parce qu'il me soupçonnait de traîner les pieds, de délocaliser un simple dépôt de munitions situé à Boufarik, alors que je lui cherchais simplement un endroit plus sécurisé. »
« La torture, une salissure qu'il faut effacer »
Sur la torture, Khaled Nezzar déclare qu'il s'agit d'une salissure qui restera gravée dans les mémoires. Il affirme qu'il en a été informé après la levée de l'état de siège, vers la mi-octobre, par son ami le général à la retraite Touati, lui annonçant une conférence de presse à l'hôpital Mustapha. Il dit avoir désigné un officier parachutiste pour mener une enquête ayant confirmé certains cas. Pour lui, l'armée n'a jamais été impliquée dans ces actes « commis clandestinement ». Sur la question du recours à l'usage des armes lors des émeutes, Nezzar, qui avait pour mission le rétablissement de l'ordre, explique avoir affronté une situation moralement et psychologiquement très difficile. « Cela s'est fait dans la précipitation car les unités ne se trouvaient pas à Alger. De plus, elles étaient entraînées à la guerre et non à la mission de rétablissement de l'ordre, qui relève des prérogatives de la police. Orientées vers Alger, elles sont venues avec des engins armés d'obus, des équipements de combat et des stocks d'essence comme pour une opération militaire. Dès lors, comment pouvait-on faire autrement ? Il fallait suppléer aux forces de police totalement débordées et que l'on disait désarmées, pour des raisons que j'ignore juste avant les évènements. L'intervention de l'armée devenait donc nécessaire pour contenir l'insurrection et le nombre trop important des insurgés. Le but de déploiement dans les rues d'Alger n'était cependant pas de réprimer aveuglément mais de saturer la ville afin de calmer le jeu. L'entreprise n'était pas aisée. Des difficultés de connaissance du terrain, de quadrillage des quartiers et de logistique ont compliqué la situation. De plus, nous avons dû casser la chaîne de commandement et décentraliser la décision au niveau des compagnies et des sections. Comment maîtriser une ville avec des brigades de 3000 hommes chacune ? » Pour Nezzar, les soldats étaient eux aussi des enfants du peuple. « Ils ne sont pas venus pour tuer ou réprimer. » Néanmoins, les fusillades de Bab El Oued et des Trois-horloges ont, pour Nezzar, été provoquées par des tirs venant de la foule devant le siège de la police et un mouvement de panique des manifestants face aux militaires aux Trois-Horloges. En tout, le bilan avancé par Nezzar lors de ces événements depuis le début, du 5 octobre jusqu'à la fin vers le 10 octobre, s'élève à 169 morts dont 56 à Alger. Une page d'histoire qui, selon lui, ressemble à celle de 1967, lors de la tentative de putsh menée par Tahar Zbiri, et qui s'est soldée par la mort de plus de 120 soldats, et à celle de 1963 et même lors de la révolution. Des expériences, conclut-il, qui n'ont pas permis de tirer des leçons. Il finit par préciser que les événements d'octobre n'ont rien amené à l'Algérie, si ce n'est des morts et la dévastation.
Les références de cet article sont les ouvrages de Khaled Nezzar et les entretiens réalisés avec lui ainsi que les livres témoignages qu'il a édités.


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