L'apprentissage du tissage était pour elle incontournable. Elle a commencé il y a tout juste une année et elle est toujours à l'étape de la formation. Aït Ouazzou Djouher, la quarantaine, a rejoint au village d'Aït Hichem, dans la commune d'Aït Yahia (au sud-est de Tizi Ouzou), un groupe de tisseuses forgées dans cet artisanat ancestral pour s'initier au métier à tisser. «J'adorais ce métier depuis toute petite, ma mère faisait partie des doyennes du tissage à Aït Hichem. Elle nous a quittés en 2011 et c'est d'elle que je tiens ma passion pour le travail de la laine», affirme-t-elle. Elle se souvient pourtant que sa mère s'opposait à ce qu'elle s'engage dans ce travail. «Ce n'était pas pour me priver de ce que j'aimais, mais elle disait que c'est un métier très difficile et elle voulait m'éviter ce qu'elle a enduré», avoue-t-elle. Nna Nouara a, en effet, commencé à tisser toute jeune pour subvenir aux besoins de sa famille et élever ses enfants. Un métier artisanal qu'imposaient autrefois les conditions sociales. «Ma mère passait tout son temps devant son métier à tisser. Je me rappelle que les tapis qu'elle confectionnait, comme ceux fabriqués par d'autres tisseuses du village, étaient vendus à un commerçant qui venait régulièrement les récupérer pour être vendus dans d'autres régions. C'est comme cela que les tapis étaient commercialisés», dira Djouher. «Aujourd'hui, les temps ont changé. Le métier est certes toujours aussi difficile, mais les femmes peuvent s'organiser et tisser sans la pression des obligations quotidiennes. Et puis, il faut d'abord aimer ce qu'on fait», enchaîne-t-elle. Notre interlocutrice dira que la confection des tapis nécessite une grande concentration. «La base, c'est de ne jamais se tromper sur le nombre de fils. C'est ce qui définit les motifs et si on se trompe en comptant, il faut tout recommencer», explique-t-elle. Mais ce que Djouher apprécie dans le tissage ce sont les motifs et les couleurs utilisés. «J'ai appris les noms et la réalisation des principaux motifs sur les tapis en regardant ma mère travailler. Cela m'a beaucoup aidée dans mon apprentissage. L'usage des couleurs est aussi ce que je préfère. Comme vous pouvez le voir, nous utilisons en plus de la laine pure (blanc cassé), le jaune, le bleu, le vert, le rose, le grenat et le noir», souligne-t-elle. Aït Ouazzou fait partie des jeunes tisseuses d'Aït Hichem, mais elle estime que la relève n'est pas assurée. «Les jeunes filles fuient ce métier jugé très difficile. La relève n'est assurée que dans les familles des tisseuses. Pourtant, on peut apprendre à tout âge. Je suis un exemple de cela», dira-t-elle, ajoutant que sa fille âgée de 21 ans s'intéresse désormais au métier à tisser.