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Insoumis ou déserteurs, ils ne voulaient pas de la guerre
Publié dans El Watan le 07 - 11 - 2004

Ainsi, à l'automne 1955 et au printemps 1956, des dizaines de manifestations secouent les départs des soldats du contingent. Parfois, comme à Rouen en novembre 1955 et à Grenoble en mai 1956, l'opposition se mue en de véritables émeutes. La ville de Rouen fait l'objet de violents affrontements pendant plusieurs jours tandis qu'à Grenoble, plusieurs milliers de personnes s'affrontent aux forces de l'ordre et endommagent du matériel de la SNCF afin d'empêcher le départ d'un train de soldats. Certes, les raisons matérielles dominent largement le refus des soldats de partir en Algérie. Pour autant, les slogans anticolonialistes ne sont pas absents des manifestations des rappelés. En effet, dès les premiers jours de la guerre, une minorité anticolonialiste se fait entendre. En 1955, la gauche dans l'opposition contribue à porter des slogans anticolonialistes. Mais, en janvier 1956, Guy Mollet, leader de la SFIO, arrive au pouvoir et, à partir de février, se range du côté des partisans de la répression. Excepté au sein d'une minorité anticolonialiste déterminée, les manifestations de rappelés de mai 1956 ne trouvent alors aucun soutien politique fort. Le refus collectif d'aller combattre en Algérie échoue. Il trouve aussi un coup d'arrêt important avec la mort de 20 rappelés à Palestro fin mai 1956. Peu à peu, les autorités militaires – qui ont été sinon totalement débordées, au moins durement éprouvées – reprennent la main sur les appelés du contingent.
Pourtant, les raisons de refuser la guerre d'Algérie ne manquent pas. C'est d'ailleurs à cette période que l'on trouve les premières affaires marquantes de désobéissance individuelle, qui appartiennent à trois catégories : l'insoumission (le fait de ne pas se présenter le jour de son appel sous les drapeaux), la désertion (le fait de quitter illégalement et définitivement son unité), le refus d'obéissance (le refus d'endosser l'habit militaire, de porter une arme ou de saluer le drapeau tout en acceptant la peine de prison qui sanctionne ce refus). La première affaire qui secoue l'opinion française est celle de l'aspirant Henri Maillot, communiste algérien, qui déserte le 4 avril 1956 avec un camion d'armes afin de renforcer le «maquis rouge» qui se forme dans le Chelif. Henri Maillot, aussitôt qualifié de «traître» et de «félon» en France, est tué avec quatre de ses camarades le 6 juin 1956. En juillet 1956, un communiste de la région parisienne, Alban Liechti, refuse de porter les armes au moment de partir en Algérie. Alors qu'il est incarcéré, son geste n'est cependant pas relayé par son parti : une campagne en sa faveur n'est lancée qu'un an plus tard. Enfin, parmi les autres désobéissances de 1956, Noël Favrelière, rappelé parachutiste, déserte dans le but de sauver un militant nationaliste d'une exécution sommaire. Cette désertion passe d'abord inaperçue ; elle n'est connue qu'en septembre 1960 avec la publication de son témoignage,
Le Désert à l'aube (éd. de Minuit). Paradoxalement, en 1957, alors que le débat sur les tortures pratiquées en Algérie fait rage en France, les désobéissances de soldats sont très peu nombreuses. Mais ce débat est rendu possible par les témoignages des rappelés qui ne sont plus présents en Algérie en 1957. Seuls quadrillent alors le territoire algérien des appelés, plus jeunes, coupés de l'actualité et des débats politiques en métropole, et repris en main par les officiers. Ces différents facteurs contribuent à expliquer le faible nombre de désobéissances en 1957. L'opposition anticolonialiste se structure toutefois en métropole, notamment parmi les chrétiens, dont le journaliste Robert Barrat constitue l'un des fers de lance. Celui-ci fonde le Comité résistance spirituelle, qui dénonce la torture dans la brochure Des Rappelés témoignent en mars 1957. Il attire aussi l'attention de Lanza del Vasto et de Joseph Pyronnet, chrétiens non violents et partisans de l'objection de conscience, sur la situation algérienne.
Ces derniers créent, en 1957, l'Action civique non violente (ACNV), à laquelle participent de jeunes insoumis et objecteurs de conscience à partir de 1959. Parallèlement, une autre organisation, Jeune Résistance, se constitue. En effet, pendant les manifestations de rappelés de 1956, un ancien séminariste, Jacques Berthelet, est parti en Suisse afin d'établir un lieu où les déserteurs et insoumis français se retrouveraient. Mais, fin 1956, ils ne sont même pas une dizaine, dont Louis Orhant, un ouvrier communiste. Ce n'est qu'en 1958 que leurs rangs s'étoffent par l'arrivée de deux déserteurs, Jean-Louis Hurst et Gérard Meïer. Orhant, Hurst et Meïer fondent Jeune Résistance pour organiser les déserteurs et insoumis dans une structure distincte du réseau de «porteurs de valises» dirigé par Francis Jeanson, dont ils sont proches.
Alors qu'en 1959, des procès et des témoignages d'objecteurs de conscience commencent à alimenter le débat, l'arrestation de membres de Jeune Résistance en février 1960 lance la polémique.
De plus, à la même période, Jean-Louis Hurst publie Le Déserteur (éd. de Minuit), et Maurice Maschino, insoumis installé au Maroc puis en Tunisie, fait paraître Le Refus (éd. Maspero). Enfin, en septembre 1960, alors que s'ouvre le procès du réseau Jeanson, la déclaration pour le droit à l'insoumission dans la guerre d'Algérie, dite Manifeste des 121, rassemble les noms de nombreuses personnalités (dont Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir). Tout cela contribue à ce que la désobéissance soit au cœur des débats de l'année 1960. En dépit des poursuites judiciaires, le mouvement de contestation s'amplifie. La vague de désobéissances vient cependant des partisans de l'Algérie française, qui tentent un putsch en avril 1961. Les soldats du contingent, appelés à désobéir aux putschistes, contribuent à rétablir l'autorité du chef de l'Etat, ce qui facilite parallèlement la condamnation morale de la désobéissance : le caractère profondément républicain du service militaire aurait empêché le «putsch des généraux». Néanmoins, certains appelés du contingent ont aussi participé à l'OAS, au putsch ou à des séances de torture. Jusqu'aux derniers jours précédant les Accords d'Evian, les désobéissances – pour ou contre l'indépendance algérienne – se poursuivent. Emprisonnés ou en exil, les réfractaires sont amnistiés en 1966 et en 1968, en même temps que les partisans de l'OAS. Quantitativement, ils sont très peu nombreux : environ un millier d'insoumis et de déserteurs et deux fois moins d'objecteurs de conscience. La prégnance du service militaire et le souvenir encore très vif de la Seconde Guerre mondiale et de la geste résistante expliquent en partie ce faible nombre. Il n'en reste pas moins que ces désobéissances ont représenté un symbole important, un trait d'union entre les Algériens et les Français à un moment où la guerre les opposait. Contre vents et marées, contre le discours univoque en France, contre l'incompréhension de la société française, ces réfractaires ont su conserver le fil de l'amitié et du dialogue pour une Algérie libre et indépendante.
* Par Tramor Quemeneur
* Doctorant à l'université de Paris-VIIIe sur les désobéissances dans la guerre d'Algérie, il a participé à plusieurs ouvrages collectifs et a coordonné 100 fiches sur l'histoire du XXe siècle aux éditions Bréal.


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