Clôture de la rencontre du président de la République avec les chefs de partis politiques représentatifs aux Assemblées élues    El Bayadh: le Moudjahid Benzerkat Mohamed inhumé au cimetière de Sidi Ahmed    TAC-2024: l'Algérien Nassim Saïdi triomphe à la 24e édition    Algérie-République du Congo: un mémorandum d'entente dans le domaine des hydrocarbures    Ressources hydriques: "l'avenir réside dans le dessalement de l'eau de mer"    Derbal s'entretient à Bali avec son homologue Irakien    Tébessa: ouverture du 16e Salon national des arts plastiques    Tizi-Ouzou: ré-inhumation des restes mortuaires de 81 chouhada au village Ath Argane    Diagnostic précoce du cancer: mise en place de plus de 20 sous-commissions    Londres presse la communauté internationale d'apporter davantage d'aide à la population de Ghaza    Contrôle des médicaments: 1155 dossiers traités par l'ANPP depuis 2021    Sélection algérienne (U20): les Verts à pied d'œuvre à Abidjan    Accidents de la route: 38 morts et 1623 blessés en une semaine    Ghaza: des dizaines de martyrs et de blessés au 228e jour de l'agression sioniste    Armée sahraouie: nouvelles attaques contre les positions des soldats de l'occupant marocain dans le secteur de Haouza    Le parti espagnol «Nueva Canarias-BC» plaide pour le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination    Création d'une Association des diplômés des universités et instituts algériens pour renforcer la coopération bilatérale    Message de condoléances du Président Tebboune    Coupe de la Confédération Le Zamalek balaye Berkane et remporte le trophée    JO-2024 : Mohamed Ali Gouaned qualifié sur le 800m    Nouveau sacre pour l'ESAT et le HBCEB    Structure de l'actionnariat de Naturgy Energy Group et de la société Medgaz, face à l'offre d'achat du groupe énergétique émirati TAQA    Saidal lance le projet Phoenix Biotech    Plusieurs quantités de comprimés psychotropes saisies    Le premier groupe de pèlerins s'est envolé hier vers les Lieux Saints de l'islam    «Poursuivre la marche sur la voie du progrès et du développement»    Plusieurs milliers de personnes marchent à Bruxelles pour exiger des sanctions contre l'entité sioniste    « Tuez-les tous (Palestiniens), Dieu Capital nous sera reconnaissant ! »    Journée nationale de l'étudiant Diverses activités organisées dans le Sud    Clôture de la 9e édition    La Radio Algérienne célèbre cette date hautement symbolique    Arrivée du premier groupe de Hadjis Algériens aux Lieux Saints    TAC-2024: une avant-dernière étape pluvieuse, le maillot jaune en ligne de mire    Les chefs de partis appellent à une forte participation au prochain scrutin    Le Général d'Armée Saïd Chanegriha en visite de travail à la 1ère Région Militaire    Journée nationale de l'étudiant: diverses activités organisées dans le Sud    Le pouvoir politique US des deux poids, deux mesures….    Palestine. Mieux vaut tôt que jamais    Le droit de massacrer, de Sétif à Gaza    Megaprojet de ferme d'Adrar : « elmal ou Etfer3ine »    Témoignage. Printemps Amazigh. Avril 80    Le Président Tebboune va-t-il briguer un second mandat ?    L'imagination au pouvoir.    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Ils revendiquent la régularisation de la Pension complémentaire de retraite: Sit-in des mutualistes de la Sonatrach devant le siège Aval    Coupe d'afrique des nations - Equipe Nationale : L'Angola en ligne de mire    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Poésie, l'épreuve des incertitudes
Publié dans El Watan le 17 - 03 - 2005

Plutôt que de se livrer à ses lecteurs, chronologiquement, il s'en remet aux livres qu'il a eu le plaisir de lire, et, bien sûr, d'aimer.
Ces mêmes livres prennent alors le relais en se transformant en autant de miroirs réfléchissant les différentes étapes de sa vie.
Son contemporain, Taha Hussein (1889-1973) fait, à quelques différences près, la même chose tout en déclarant que l'écriture autobiographique, libre de toute entrave psychologique et sociale, est encore loin de s'imposer dans les lettres arabes modernes.
Il me plaît, pour ma part, de prendre cette même bifurcation, entendez celle du livre, pour rendre visite à un ami qui n'est plus de ce monde.
Cette semaine, en lisant un numéro spécial d'une revue littéraire consacré au romancier autrichien Robert Musil (1880-1942), le souvenir de mon ami, l'aimable poète et agronome Youcef Sebti, se fit présent en pensée et par le cœur. Le 28 décembre 1993, on est venu défoncer la porte de sa maison située dans l'enceinte même de l'Institut national d'agronomie d'El Harrach. Ses livres furent piétinés et brûlés, et, bien sûr, son corps fut mutilé, car, pour les criminels, il fallait bien boucler la boucle ! Mon ami, pour ceux qui ne l'ont pas connu, était un petit bout d'homme. Un souffle de rien du tout pouvait le terrasser.
Lui, qui savait de quoi est faite la terre, ne marchait pas, mais donnait, plutôt, l'impression de marcher dans l'air pour reprendre la tournure si chère au poète Al Maâri.
Je lui rendis visite par une journée glaciale, quelques jours avant que les criminels ne viennent le déposséder de sa vie et interrompre son voyage perpétuel dans le monde de la connaissance. Le petit bout d'homme était là, devant moi, se lovant dans une kachabia pour se protéger contre les morsures du froid en provenance de l'Atlas tellien.
Des piles de livres l'entouraient, le courtisaient en quelque sorte.
J'avoue l'avoir envié, car je ne connais pas plus belle et meilleure compagnie que celle des livres ! Il m'avait demandé un certain nombre d'ouvrages traitant de questions philosophiques islamiques, anciennes et modernes. Titubant dans sa kachabia, il ramena un plateau de dattes et le déposa entre nous.
Dans nos vieilles traditions, nous le savons bien, tout ce qui renferme une saveur douce constitue le prélude au bon accueil, et Youcef était aussi doux que les dattes qu'il m'avait offertes.
Un monde aux contours précis
Ce dont je suis certain après tant d'années, c'est bien notre chevauchée, à bride abattue, dans le vaste monde de la littérature arabe. Youcef avait commencé alors à écrire en langue arabe. Il était, comme à l'habituée, semblable à un sismographe. Même flux verbal avec, à l'arrière-fond, une touche d'ironie. Même intérêt pour tout ce qui va dans le sens de l'approfondissement de la pensée, toute pensée. Il enregistrait tout, rien n'échappait à son esprit si vif et si alerte. C'est alors qu'il me demanda : «Est-ce que tu connais l'œuvre de Robert Musil ?» Je répondis que oui, puis il enchaîna : «Est-ce que tu as lu son roman (L'Homme sans qualités) ?» Oui, fis-je en hochant la tête. Et comme un enfant, il se sentit tout heureux, et il se mit à se frotter les mains : enfin, je trouve quelqu'un qui porte le même intérêt que moi au roman de Musil ! Youcef avait lu Musil dans une traduction française, alors que moi, j'ai eu le plaisir de le lire dans une traduction anglaise. Nous fîmes l'état des lieux de la situation sociopolitique en Europe du début du XXe siècle jusqu'à la montée du nazisme en Allemagne en 1933. Il finit par me poser la question que je redoutais tant : «Et qu'est-ce qui t'a plu dans ce roman ?» «Pour dire vrai, lui répondis-je, ce roman ne m'a pas tellement emballé. C'est, à mon avis, un roman sans sujet, un roman sans fin apparente. Je dois dire, cependant, que j'ai aimé le courage de son auteur, et sa manière de mettre en doute ses capacités créatrices. C'est comme le fameux poème d'Edgar Alan Poe (Le Corbeau) qui dit beaucoup de choses, et qui ne dit rien en même temps.» En poète d'une grande finesse, Youcef accepta mon point de vue. Si je ne me trompe, je crois qu'il voulait de moi que j'établisse la relation entre le roman de Musil et les romans publiés à la même période, c'est-à-dire ceux de Marcel Proust, de James Joyce, de Virginia Woolf et de Sherwood Anderson. Il était passionné par les romans fleuves où il est question de capter le mouvement de toute une société durant une période déterminée. Le livre, à titre d'exemple, et dans son entendement, n'est pas un ensemble de feuilles, mais un monde physique avec des contours précis renfermant poids, qualité, volume et projection dans l'espace et dans le temps. N'a-t-il pas voulu voir quelque chose de semblable dans le roman de Musil ? Refusant d'aller le voir sur son lit de mort, je pris la même attitude qu'avait prise Federico Garcia Lorca à l'égard de son ami Mejias, le fameux matador, mort dans l'arène en 1934. Il refusa de le voir, car il voulut garder de lui un souvenir frémissant de vie. C'est, je crois, ce que j'ai fait avec mon ami, Youcef Sebti, ce grand matador de la poésie et de la réflexion philosophique.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.