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Noam Chomsky, anatomie d'une mécanique américaine
Publié dans El Watan le 05 - 05 - 2005

On se souviendra de ce que cette option avait été entrevue pour notre pays à la fin des années 1980. La question fut détournée en un faux débat sur la réforme du système éducatif et de la place qui devait revenir aux deux langues étrangères : la langue française et la langue anglaise (débat qui n'est pas clos, loin s'en faut), soit dit en termes de systèmes politiques, un prétendu choix entre contrat social ou recours au consentement.
Dans son ouvrage Media Control : the Spectacular Achievements of Propaganda (New York, 1997), le linguiste Noam Chomsky démonte la sordide mécanique de la démocratie spectacle que les USA tentent d'imposer au «tiers-monde» pour s'imposer à tout le monde, et ce depuis 1919, depuis la Charte de W. Wilson. Dès l'introduction de son ouvrage, Chomsky annonce que la démocratie américaine n'a rien à voir avec la démocratie. Elle reposerait sur un principe élémentaire : «…le peuple doit être exclu de la gestion des affaires qui le concernent et les moyens d'information doivent être étroitement et rigoureusement contrôlés» (p.15).
Afin que cela soit possible, dit Chomsky, il suffit de s'assurer étroitement des moyens de propagande, de manipuler les opinions des gens en créant des psychoses, d'embrigader et de contrôler sévèrement des intellectuels de service, et enfin d'éradiquer toute velléité de dissidence ou d'opposition. Cette stratégie, selon Chomsky, fut l'œuvre d'un journaliste, Walter Lippmann. Il avait élaboré une idéologie devant reconvertir la notion même de démocratie en «un art de fabriquer le consentement» par des recettes de propagande (p.22). Lippmann a fonctionnalisé une vision de la société démocratique en révisant la notion grecque et en la réinvestissant de son caractère élitiste et ségrégationniste. En ce sens, Lippmann établissait un lien direct entre Platon (distinguant entre les citoyens éclairés et les métèques stupides) et Locke (fondateur du principe pragmatique et béhavioriste du consentement inné). Ainsi, le pouvoir reposerait-il sur les cadres associés à la gestion et au contrôle de la société (les acteurs) afin de contenir et de dompter «le troupeau dérouté» dont il importe de se protéger contre ses piétinements et ses rugissements (les spectateurs qui doivent se retirer de l'arène une fois qu'ils auront donné, au moyen des élections, leur consentement ou leur appui à tel ou tel membre de la classe des acteurs). La nouvelle conception de la démocratie suppose donc le pouvoir discrétionnaire des cadres, le monopole et le contrôle draconien des médias, l'arrachage du consentement au système de la part des spectateurs. Ainsi, la bicéphalité du système reposerait sur la distinction entre celui des cadres et celui de la masse.
Les frontières entre les deux catégories sont hermétiques et l'accès à la catégorie dirigeante se fait par allégeance absolue à une infime minorité de maîtres qui «possèdent la société» (p.25). Les études behavioristes ont permis aux stratèges de cette conception exclusive de la démocratie de distinguer entre deux catégories de gens ; ceux qui ont la faculté de raisonner (les acteurs), les plus réduits en nombre ; et les émotionnels (les spectateurs), les plus répandus. De ce fait, gouverner c'est «créer des illusions nécessaires» (p.27) pour fonctionnaliser «des simplifications abusives émotionnellement convaincantes» (p.27). En gérant le «troupeau» par le pathos, le consentement peut provoquer une adhésion à la politique même injuste des décideurs sans que cela n'entraîne le moindre questionnement ni le moindre doute. Noam Chomsky dit à ce sujet que c'est par la propagande oiseuse et vide à coups de slogans insensés que le système se perpétue appuyé sur une politique de spectacles (TV, matchs divers, championnats, festivals, etc.) en un mot, tout ce qui dispense de penser, de réfléchir et donc d'agir (p35) et partant tout ce qui, selon Edward Bernays, participe à «créer le consentement» (p.37). Pourtant, malgré tout, cela reste insuffisant. Car le consentement (donnée individuelle) a besoin d'être socialisé par la «fabrication de l'opinion» (p.40) dont la fonction paradoxale est de désocialiser l'information (croire qu'on est seul à savoir) tout en socialisant la désinformation par le spectacle par exemple. Il faut souvent des crises violentes pour que la société se réveille et se révèle à elle-même. La gestion du «troupeau» par les acteurs peut se réaliser selon deux types de schémas : «cultiver les valeurs martiales» ou alors provoquer des «inhibitions pathologiques de l'usage de la violence». Ces deux schémas sont tributaires du rapport à l'histoire et à son traitement souvent falsifié. Cette falsification peut se faire de manière douce dans les pays aguerris par la maîtrise de la propagande ou de manière violente dans les états totalitaires (p.47).
Les trois derniers chapitres du livre, n'ayant pas de lien avec notre recherche actuelle sur le déficit de formation dans le mouvement patriotique algérien, seront traités ultérieurement. Que nous apporte donc l'ouvrage de Chomsky. Le mouvement patriotique algérien aura connu deux moments : l'activisme militaire avec exaltation des valeurs martiales (guerres paysannes) puis structuration politique avec création d'associations et de partis à partir de la première guerre mondiale et passage à la lutte politique avec les masses constituées en acteur privilégié de la lutte. Mais l'inculture politiqu distinguera rapidement entre la base militante et les cadres qui s'emparent de la direction du mouvement (électoralisme activiste dès 1919).
Là encore, deux conceptions de la démocratie s'offrent aux Algériens en lutte. La première comme démocratie active et la seconde comme spectacle. L'absence de culture des lumières a conduit rapidement les cadres à se tourner vers les ersatz de la culture traditionnelle avec une action conduite par un guide suprême et gérée sur le mode consensuel par une minorité (ijmaâ). Sans formation philosophique ni politique, le mouvement portera les germes du spectacle.


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