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Pinochet, Papon, Duval… et les autres
Publié dans El Watan le 24 - 12 - 2006

Mon dictateur, un tortionnaire, un oppresseur du peuple vient de passer de vie à trépas. Augusto Pinochet disparaît ainsi, après avoir été voué aux gémonies, à la colère et au mépris de l'opinion publique internationale pour son comportement indigne d'un être humain, pour les sévices et les assassinats perpétrés contre le peuple chilien de 1973 à 1990. Ses agissements sanguinaires et criminels ont été qualifiés de crime contre l'humanité, mais il n'eut, malheureusement pas, à en subir les conséquences pénales et pénitentiaires devant en découler en toute logique et justice. Dommage. Dommage pour les victimes, l'humanité… et l'histoire. Cette impunité laisse un arrière-goût amer tant le spectre de la torture et des nombreuses liquidations physiques reste présent et tenace. L'absence de réparation morale et de regrets, pour la mémoire des martyrisés, laisse un sentiment de colère, mais surtout d'inachevé. D'inachevé, si une condamnation, pour le respect de cette mémoire et également de l'histoire humaine, n'est pas prononcée, même à titre posthume. Les médias, notamment les médias lourds, surtout ceux français, ont fait largement état de cette disparition et aussi des actes abominables du dictateur.
Pourquoi pas ? C'est leur droit et également leur devoir. Cependant, une observation vient immédiatement à l'esprit. Pourquoi cette presse française, du moins celle du pouvoir ou proche de lui, écrite et/ou télévisuelle, ne lésine-t-elle pas pour relater et commenter, voire «juger», de tels événements lorsque la France n'est pas directement concernée et garde-t-elle la bouche cousue dans le cas contraire ? Surtout lorsqu'il s'agit du comportement odieux de sa soldatesque, de son administration et d'une bonne partie de ses ressortissants établis dans ses anciennes colonies.
Faut-il rappeler une fois de plus comment sa justice a débouté les victimes des massacres du 17 octobre 1961 à Paris pour la plainte qu'elles ont déposée, avec la Fondation du 8 Mai 1945 (partie civile) pour crime contre l'humanité contre Maurice Papon, dont l'attitude face aux Algériens «Parisiens» n'avait rien à envier à celle de Pinochet face aux patriotes chiliens. Des tentatives d'un jugement de ce dernier, même après sa disparition, sont entreprises ici et là en France. Tant mieux. Mais pourquoi cette tendance en faveur de la justice ne suscite-t-elle pas autant d'engouement lorsque c'est le cas pour quelque 400 Algériens assassinés le 17 octobre 1961 en plein Paris sous la responsabilité avouée et reconnue de Maurice Papon, qui, lui , est toujours en vie. La justice n'est-t-elle pas la même ou en existe-t-il plusieurs en fonction d'une hiérarchie de «races humaines» ?
Et le cas des généraux Aussaresses, Massu, Bigeard… ? Aussaresses a reconnu publiquement, face aux caméras des chaînes de télévisions,d'avoir pratiqué des supplices, à plusieurs reprises, sur des patriotes algériens et d'avoir supprimé, de ses propres mains, plus d'une soixantaine d'entres elles. Son cynisme le pousse jusqu'à en écrie un livre. Le héros Larbi Ben M'hidi exécuté alors qu'il se trouvait entre les mains du ministre Bigeard, comme le fut le résistant Jean Moulin dans les geôles nazies, ne mérite-t-il pas que les autorités officielles françaises reconnaissent son martyre et s'inclinent enfin devant sa mémoire. Il existe beaucoup d'autres cas de tortures, d'exécutions collectives et d'assassinats. La présence coloniale française en est jalonnée de 1830 à 1962. L'histoire ne saura les oublier et les dévoilera inéluctablement, afin que nul n'oublie et que les générations successives s'en souviennent à jamais. Elles sauront que le négationnisme et le révisionnisme, n'est-ce pas M. Douste-Blazy, ne pourront tromper personne et encore moins estomper la mémoire, du moins la mémoire algérienne, en voulant falsifier le passé et l'histoire en promulguant la loi du 23 février 2005 vantant l'aspect positif de la colonisation française tout en taisant outrageusement les affres, les humiliations et les spoliations du peuple algérien du fait de cette dernière. Ce n'est que par la reconnaissance et ensuite la condamnation, sans équivoque, de tout le mal fait par le colonialisme français au peuple algérien qu'un traité d'amitié entre l'Algérie et la France aura sa raison d'être et sa pleine efficacité pour l'avenir. Peut-on envisager ce dernier dans un climat de sérénité et d'objectivité si, à la base, les hypothèques du passé et le silence en résultant, aussi douloureux soit-il pour les uns et aussi peu reluisant pour les autres, ne sont pas levés.
De plus, il est temps de mettre un terme aux amalgames. Ainsi, l'Algérie est en droit de se sentir visée par la publicité faite autour du film Indigènes et la décoration quasi simultanée de harkis, car pour elle, la Seconde Guerre mondiale (1939-1945), c'est avant tout le massacre de 45 000 de ses enfants, le jour de la victoire sur le nazisme pour laquelle le sang algérien a abondamment coulé. Quant aux harkis, qui d'entre les Algériens et tous les hommes épris de justice peut oublier ou passer sous silence le zèle dont beaucoup d'entre eux ont fait preuve en assassinant, incendiant, volant, violant et détruisant ?
Si l'Algérie ne peut pas ne pas se sentir interpellée par cette volonté récurrente de certains partis et d'une partie du pouvoir actuel français de continuer de «regarder autrement» le colonialisme, en niant délibérément ses effets destructeurs, néfastes et inhumains. Cette persistance maladive et quelque peu raciste de tenter de «rehausser» le passé de la France au détriment de celui de ses anciennes colonies agace et dénote clairement que, quelles que soient les déclarations tardives de justification (souvent limitée) et de tentative d'apaisement, il est temps pour le pays des droits de l'homme de regarder, bien en face, son passé colonial et d'en assumer les responsabilités. Le passé, après un maquillage de circonstance, qui ne peut servir d'exutoire pour des calculs de politique interne, le temps d'une élection. Le passé, quel qu'il soit, reste forcément lié au présent. Il finit toujours par ressurgir, d'une façon ou d'une autre, tant que ne s'opère pas un travail d' «exorcisme» et un examen de conscience rigoureux et sans aucun état d'âme. Quelque part, n'est-on pas en droit de se demander si le «bouillonnement» dans les banlieues parisiennes, lyonnaises, marseillaises… n'est pas la conséquence et la continuité d'une position politique de reniement de la réalité, des injustices, du mépris et du comportement discriminatoire vécus par ces colonisés ? Le refus «de faire face à la vérité historique» continuera, sans nul doute, à maintenir ce climat de frustration et une tendance à la violence.
La frustration se manifeste encore plus quand les autorités françaises ne sont pas avares de déclarations de condamnation d'événements similaires qui se sont produits ailleurs, à l'exemple du drame arménien. L'arrogance de faire l'apologie de la colonisation (la loi du 23 février 2005 avait même prévu d'en enseigner «les aspects positifs»), outre son caractère provocateur, affiche une volonté d'amnésie au risque de bafouer délibérément les souffrances et les injustices de toutes sortes induites par cette même colonisation. Plus grave encore, certains manifestent le désir d'en tirer gloriole. Il n'est pas du tout aisé de parler de «la face cachée de son histoire». Dans son excellent ouvrage Escadrons de la mort, l'école française (édition La Découverte), Marie-Monique Robin dénonce précisément «l'indifférence générale» provoquée par les révélations sur l'enseignement dans certains pays d'Amérique latine, des pratiques d'interrogatoires fignolées pendant la guerre d'Algérie, par d'anciens tortionnaires dont notamment Aussaresses, par ailleurs, chef du service Action de l'ancien SDECE. Osera-t-on encore affirmer que la torture dont de très nombreux Algériens ont été les victimes et les cobayes n'a jamais existé ? Niera-t-on son «exportation» avec assistance technique vers plusieurs pays (Argentine, Chili…) ? C'est vraisemblablement ce refus de mea-culpa pour le passé et l'entêtement à vouloir le glorifier à tout prix, qui génèrent le grain de sable dans le mécanisme des relations entre les pays africains d'une façon générale et la France. Le comportement doit lui aussi changer. Malheureusement, il ne le fut point, à penser, à titre d'exemple, au moment où l'Algérie traversait une période critique du fait du terrorisme. Bien au contraire.
La crise actuelle avec le Rwanda en est une autre illustration du fait de l'émission par le juge Bruguière d'un mandat d'arrêt contre neuf collaborateurs du président Paul Kagami, à qui l'on reproche l'attaque de l'avion de son prédécesseur, Juvénal Habyarimana parvenu au pouvoir après un coup d'Etat sanglant. Le drame rwandais résulte de problèmes ethniques (Hutus et Tutsis) mais a été accentué puis provoqué pour, sans nul doute, des raisons d'influence dans la région entre Anglo-Saxons et Français. Dans une interview accordée au journal Libération, le général canadien Roméo Dallaire, commandant de la Minur (Mission des Nations unies d'assistance au Rwanda), affirmait : «Les Belges et les Français avaient des instructeurs et des conseillers techniques au sein même du quartier général des forces gouvernementales, ainsi que dans les unités d'élite les plus extrémistes (…). Des officiers français étaient intégrés au sein de la garde présidentielle qui, depuis des mois, semaient la zizanie et empêchaient que les modérés puissent former un gouvernement de réconciliation nationale.» De nombreux hommes politiques et des médias ont été surpris par le manque d'écho réservé par Paris aux alertes émises avant le carnage. Son obsession de conserver le Rwanda dans son précarré et sa présence militaire jusqu'au niveau le plus élevé de ce pays ont été déterminantes dans ce choix pour la surdité. Le comportement et l'approche mentale des pouvoirs politiques successifs français dans ses rapports avec la plupart de ses anciennes colonies semblent toujours régis par les principes éculés de dominant à dominé. Il est temps que cette façon de voir prenne fin et que, seul, prévaut le respect mutuel en toutes circonstances. Du moins, c'est une exigence pour nous, Algériens, qui souhaitons sincèrement les meilleures relations avec les Français. C'est possible. Alors, commençons par lever les hypothèques du passé. A la France de mettre un terme au déni de reconnaissance du martyr algérien du fait de la colonisation ; car tant qu'il existera, il constituera un obstacle à l'instauration de relations d'amitié entre nos deux pays et d'un rapprochement exemplaire analogue à celui créé entre la France et l'Allemagne grâce à la volonté, à la clairvoyance de de Gaulle et d'Adenauer. C'est, ne semble-t-il, ce même de Gaulle qui disait que l'Algérie est la porte étroite de l'Afrique. A la France d'agir pour l'élargir. Mais, ce n'est guère possible sans une expression de regrets et une demande de pardon de sa part pour toutes les souffrances endurées pendant l'occupation coloniale. Il est plus que temps qu'elle s'affranchisse, elle aussi à l'instar d'autres anciennes puissances colonialistes de cette dette. Ce sera le meilleur gage pour bannir à jamais les vieux démons d'assujettissement et mettre fin aux visées néocolonialistes. Et alors, s'ouvrira une nouvelle ère d'espoir et pourra instaurer un réel climat de confiance et de coopération. L'Algérie a été l'étendard de la libération de l'Afrique.
Pourquoi, ne saura-t-elle servir, à nouveau, d'exemple, pour ce continent, d'affranchissement du néo-colonialisme et de ses conséquences insidieuses et perfides.
L'auteur est membre fondateur et secrétaire général de la Fondation du 8 Mai 1945


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