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Les Algériens ne sont pas prêts à mourir de rire…
Aziz Degga. Comedien,animateur,auteur,conteur
Publié dans El Watan le 07 - 05 - 2009

Pourquoi les Algériens ont-ils désappris à rire ? La question posée aux psychologues, sociologues et autres spécialistes du comportement a donné lieu à d'innombrables thèses tout aussi intéressantes les unes que les autres, mais la résultante est la même. Le rire et la bonne humeur, devenus denrée rare, sont difficiles à afficher dans une conjoncture morose et triste.
Pour Aziz Degga dont le métier est de faire rire les autres : « Quand le cœur n'y est pas, on a beau gesticuler dans tous les sens, on n'arrivera pas à déclencher ce déclic chez les autres. Aujourd'hui, les situations ont changé, les mentalités aussi. Les espaces d'expression sont rares pour se décompresser. Les gens sont gagnés par l'angoisse quotidienne et ne peuvent de ce fait se laisser aller. » Les Algériens sont-ils tristes à ce point ? « La monotonie et la grisaille ont donné un sacré coup à la bonne humeur. Les gens, harassés par les éprouvantes conditions de vie, perdent le réflexe de s'amuser et d'oublier par là même leurs souffrances », explique Aziz, l'artiste débonnaire « mélancolique » qui peut se targuer d'avoir beaucoup fait rire les adultes, tout en sachant se faire aimer des enfants à qui il consacre désormais le plus clair de son temps.
Aziz, qui affectionne le comique, le cocasse et le burlesque, est bien dans son rôle, mais on décèle dans son discours une bonne dose d'amertume. « J'ai joué dans de nombreux films, mais j'avais par le passé refusé de m'engager avec plusieurs réalisateurs pour la simple raison qu'ils voulaient me confiner dans le rôle de ‘'Moh Smina'', comme s'il n'y avait que ce personnage dans l'univers. Je n'ai pas refusé par mépris du personnage que j'ai d'ailleurs campé dans ‘'Omar Gatlatou''. Cela fait longtemps que je n'ai pas été sollicité. C'est pourquoi, je me suis consacré aux sketches et aux gags tout en m'adonnant à l'écriture », résume-t-il, l'air déçu.
Un don,une évocation
Aziz Degga est né le 10 novembre 1945 à El Biar. Dans sa carte de visite, on peut lire « Artiste de carrière, comédien animateur culturel, auteur conteur depuis 1966 ». Il garde des souvenirs furtifs de sa tendre enfance à Climat de France, où il fait ses études primaires. « Je n'ai pas pu aller très loin dans ce domaine à cause de la guerre. » A la fin des années 1950, il commence à travailler comme coursier dans une société française, SVP multi services. Il y restera jusqu'en 1965. L'année suivante, il intègre une troupe théâtrale qui activait à la rue Mogador sous la houlette de Samir Bencherifa.
« Au départ, j'assistais en spectateur aux répétitions, puis Samir me donna un rôle dans un thème muet. En 1967, débarqua Kris Réda, un ancien du Conservatoire d'Alger, qui venait de terminer ses études à l'école de la rue Blanche à Paris et créa ‘'Théâtre et culture'' avec une pléiade d'acteurs talentueux, Guenanèche, Benassir, Meziane, rejoints par les ‘'confirmés'' Azzedine Medjoubi, Madjid Bey, Noredine Lamèche et Abdallah Bouzida. C'est dans cet environnement que Aziz allait évoluer, même si son père Mohamed, docker, voyant d'un mauvais œil son rejeton côtoyer ‘'ces artistes qui se fardent et se travestissent'', les vouait aux gémonies, car ce qu'ils font, selon lui, est contraire à nos valeurs et à nos traditions. » « Mais avec le temps, mon père a fini par s'y faire et accepter mon choix. »
Aziz prend du galon et sa famille y voyait même un sujet de fierté. Sa tante maternelle ira même jusqu'à le surnommer Fernandel, alors que sa mère l'avait comparé à Smaïl Yacine. Bien évidement, ces comparaisons étaient considérées par Aziz comme des éloges. En mettant en pratique ses connaissances acquises au Conservatoire d'Alger, qu'il fréquente dès 1966 auprès du professeur Miloud Riahi, Aziz s'affirme peu à peu en jouant dans des pièces aussi diverses que L'Exception et la Règle, de Bertold Brecht, Les Perses, Echaâb echaâb, La Poudre d'intelligence, de Kateb Yacine. Puis, il intègre la troupe du Théâtre de la mer, dirigée par Kaddour Naïmi (1972). Avec Mohamed prends ta valise, de Kateb Yacine, c'est l'apothéose pour la troupe qui effectuera une tournée de plusieurs mois en France. « Kateb est sans doute un auteur de génie, mais il avait son caractère, ce qui explique nos rapports parfois tendus et ombrageux, mais au plan professionnel, je pense avoir joué mon rôle pleinement. »
Après avoir été animateur culturel à Sonatour et à la Cinémathèque algérienne, Aziz est sollicité pour le petit et grand écran Les Déracinés (Lamine Mesbah) Omar Gatlatou (Allouache) Sombreros (Bouberas), feuilleton TV El Khamissa de Belkacem Haddad, Sahara Blues de Bouberas, De Tam à Hollywood, de Zemmouri, Le Clandestin, de Benamar Bakhti et d'autres apparitions dans de longs métrages. Aziz a été l'un des initiateurs du Festival national et international du rire, lancé à Bou Ismaïl en 1984. Depuis, il se consacre à l'animation pour les enfants. Ayant plusieurs cordes à son arc, Aziz, qui a horreur qu'on le surnomme « Moh Smina » ou encore « Isawa » pour son rôle de l'Indien dans le film Le Clandestin, sait exécuter avec un brio incomparable des numéros de bruitage avec une panoplie de sons de motos, d'instruments de musique, de bendir, digne des bruitages utilisés dans les films à succès.
Plusieurs cordes à son arc
Quant à l'imitation des cheikhs de chaâbi, Aziz en a fait l'une de ses spécialités, même si parfois il a tendance à les brocarder, agaçant les mélomanes assidus choqués par ce « sacrilège ». « Il faut toujours se mettre à jour, être à l'écoute des frémissements de la société pour les traiter avec dérision. L'Algérie a évolué et il faut être au diapason », soutient notre artiste qui fait un clin d'œil à ses devanciers dans cet art que sont Ali Kahlaoui et Amar Ouhadda, dépositaires du legs de Rachid Ksentini ou de Mohamed Touri. Mais Aziz s'est tracé un beau sillon dans le conte qu'il affectionne à merveille. « J'ai plus de 300 contes destinés aux enfants. N'est-ce pas là un véritable trésor », s'interroge l'artiste qui avoue tirer son inspiration auprès de ses enfants Rym et Brahim. « Je me laisse tellement bercer par leurs histoires que je m'y perds complètement. Je prends très au sérieux ce qu'ils disent et c'est, en partie, en développant leurs propres idées si invraisemblables soient-elles, que j'écris tel ou tel conte. » Mais Aziz ne s'arrête pas à ce constat innocent et combien révélateur.
Il n'hésite pas à avancer que son choix est aussi dicté par d'autres considérations moins agréables. Il a l'élégance et le devoir de dire qu'au terme de son parcours cinématographique, il a compris combien le monde des adultes est pourri, plein d'intrigues, d'envie, de cupidité et de méchanceté... Le rire qui lui colle à la peau ne transparaît pas hélas à travers les gens qu'il côtoie chaque jour. Il faudra repasser pour voir le rire, instiller son virus contagieux dans une société plongée dans l'ombre, alors qu'il lui suffit d'un déclic pour débusquer cette part de lumière qui sommeille dans notre inconscient.
Le rire est une thérapie
Aziz s'adosse à cette célèbre phrase de Chamfort qui avait décrété que la plus perdue de nos journées est celle où on n'a pas ri. Alors, l'artiste rit à pleines dents des avatars de son environnement immédiat. « L'humour est une thérapie, le meilleur médicament pour notre esprit. » comme il a le sens du partage, Aziz s'empresse toujours de venir vous conter la dernière qui raille un copain ou le système politique en tournant au ridicule ces politiciens de pacotille, qui clament une chose et son contraire. « Pourtant, reconnaît-il, certains s'en tirent bien en recourant à l'anecdote pour mieux faire passer leur message. » « D'autres ont compris qu'un sourire entendu pouvait mieux provoquer l'adhésion d'un groupe à un projet balayant les obstacles linguistiques et les oppositions », relève-t-il. Aziz parle de son métier avec passion. Lorsque nous évoquons le statut de l'artiste qui a tout l'air d'une arlésienne, Aziz ne semble pas s'en préoccuper outre mesure. « L'artiste est là pour exprimer des sentiments, des émotions, de faire passer des messages. Il a un rôle pédagogique. Il doit gagner sa vie décemment, sans tomber dans le piège de la bureaucratie, où certains artistes semblent se complaire en touchant de l'argent sans rien faire. Pour moi, le meilleur statut, c'est la création, c'est ouvrir les portes, c'est libérer les énergies et encourager les jeunes à investir les scènes et les planches. Il faut laisser les jeunes faire ce qu'ils aiment avec cœur. C'est ça la liberté ! »
Quoi de plus tonifiant qu'un éclat de rire quand les humeurs sont en berne, les couleurs ternes et les mines alentour patibulaires. L'humour renforce notre instinct de survivre et sauvegarde notre santé d'esprit, avait écrit l'un des monstres du cinéma qui a tant fait rire et vibrer plusieurs générations. Charlie Chaplin, malgré l'écume des jours, est toujours présent dans notre imagination. Degga le cite volontiers dans l'entretien qui nous a réunis. L'artiste compulse ses archives en prenant le temps de vous scruter, de décortiquer vos attitudes, prêt à dresser votre portrait à sa manière. Il est vrai qu'il possède une grosse besace remplie d'anecdotes où sont écorchés avec une subtile tendresse ses amis et ses compagnons d'art. Peu de chance donc de ne pas tomber sous le couperet. « Vous faites mon portrait. Je vais faire le vôtre, mais attention aux surprises », plaisante-t-il.
Mais dans ses esquisses brocardées se dessine une infinie générosité. Même s'il laisse l'impression de n'avoir pas donné la pleine mesure de son talent, ce qui l'attriste un peu, Aziz demeure un éternel optimiste. Il cite parfois Thagore qui avait su surmonter ses tracas avec beaucoup de philosophie et qui avait écrit : « Quand j'ai envie de pleurer, je souris ». Aziz, Dieu merci n'en est pas là. Son œuvre, florilège de mots exquis est un sourire entendu qui fait du bien là où ça fait mal…
« Il faut rire avant que d'être heureux, de peur de mourir sans avoir ri. »
La Bruyère
Parcours :
Aziz est né sous une bonne étoile le 10 novembre 1945 à El Biar. Il n'est pas allé trop loin dans ses études, exerçant quelques petits métiers avant de s'engager résolument dans cette activité qui ne peut être considérée comme un métier. Artiste, Aziz en avait le don et la vocation. Il a choisi d'être comédien. Il le sera dès 1966. Mais ce qui frappe chez lui ce sont ses capacités d'adaptation. Il est à l'aise aussi bien en interprétant Eshylle, Kateb ou Brecht ou en instaurant un dialogue plein de tendresse avec les enfants. C'est d'ailleurs dans leur direction, qu'il concentrera tous ses efforts jusqu'à l'heure actuelle. Animateur à la cinémathèque, il a beaucoup appris au contact de cinéaste de renom qui sont passés par cette salle mythique. Aujourd'hui à la retraite ? Aziz se consacre à l'écriture de contes pour enfants.
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