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Lachemi Siagh : La biographie non autorisée
Publié dans El Watan le 25 - 06 - 2010

«Je vous informe que toute relation d'affaires avec le cabinet d'études Strategica et Lachemi Siagh est désormais prohibée. Ce bureau d'études, à travers ses différentes activités, s'est constitué une importante banque de données tant sur le secteur financier national que sur des entreprises publiques stratégiques, données pour lesquelles il ne fait guère preuve de réserves dans ses relations avec les milieux économiques étrangers.» Juin 2010. Ahmed Ouyahia a enfin la peau de celui qu'il traque depuis quelques années. Lachemi Siagh, 62 ans, accusé à demi-mot d'espionnage économique, était encore présenté il y a quelques mois comme le «sauveur financier» des entreprises algériennes, le «Monsieur emprunt obligataire» sans lequel aucune ouverture de capital ne pouvait se faire. Mais qui se cache derrière cet expert financier contesté, homme secret et redoutable homme de réseau ?
Son ascension commença dans les années 1970. Cet Algérien né à Touggourt fait ses débuts à la Société nationale de sidérurgie, un des fleurons de l'industrie algérienne. En 1977, il en devient le directeur général avant d'être nommé conseiller spécial du ministre de l'Industrie lourde en Algérie. «Ce garçon était brillant», se souvient un de ses ex-collègues, directeur d'une entreprise publique. Mais en 1980, il préfère quitter le gouvernement pour rejoindre Tunis où il est recruté comme assistant spécial du secrétaire général de l'Organisation arabe pour le développement industriel (AIDO). Il est ensuite nommé à Baghdad. Là commence son périple au Moyen-Orient et surtout dans les pays du Golfe. Nommé à plusieurs postes de management dans des institutions bancaires et financières arabes, il enrichit son CV déjà chargé.
Lachemi Siagh est diplômé de l'Institut supérieur des sciences économiques et commerciales de Paris, diplômé en science administrative de l'Ecole des hautes études commerciales de Montréal (HEC) où il a aussi passé un doctorat en management stratégique qui lui a permis de devenir directeur pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord chez SNC Lavalin. C'est là qu'il se fait connaître comme expert financier.
Alors qu'Abdelaziz Bouteflika lance un appel à la diaspora algérienne établie à l'étranger «redevables envers (sa) patrie pour avoir fait des études en Algérie», l'expatrié est sollicité par son ami Abdelatif Benachenhou, autre expert financier, membre du «brain-trust» du président.
En 2001, Siagh crée son cabinet Strategica Finance et s'installe dans l'appartement de Abdelatif Benachenhou, à la cité des Amandiers de Ben Aknoun (en face du ministère des Finances). A la même époque est créée la Bourse d'Alger, prometteuse de fructueuses transactions financières. Six banques publiques (BNA, BEA, BADR, CPA, CNEP Banque et BDL) créent Algérie Clearing SPA spécialisée dans les transactions en Bourse et autres activités financières. Trois emprunts obligataires sont lancés pour l'ouverture du capital d'El Aurassi, Saidal, Eriad Sétif). Une première dans l'histoire de l'économie algérienne.
«Monsieur emprunt obligataire»
Siagh, en spin doctor, réussit avec son associé Lies Kerrar et l'aide de son «mentor» Benachenhou, à s'intégrer dans les milieux d'affaires et à influencer les managers des entreprises publiques en souffrance, tels ceux d'Air Algérie, Sonatrach, Algérie Télécom ou Sonelgaz. En lançant des emprunts obligataires tous azimuts, présentés comme des succès, il apparaît comme le «sauveur des entreprises publiques». En parlant de l'emprunt obligataire d'Air Algérie, il déclarait dans Jeune Afrique en 2005 : «C'était une opération inespérée pour Air Algérie qui cherchait de l'argent pour renouveler sa flotte. Auparavant, la compagnie faisait appel à des financements internationaux, mais cela coûtait très cher.
L'emprunt obligataire lui permet d'éviter de courir le risque de change, de ne pas payer la prime de risque, qui peut atteindre 10% sur un emprunt de dix ans et, enfin, d'emprunter en dinars à un taux défiant toute concurrence. Air Algérie a payé 50% moins cher que si elle était passée par un consortium bancaire.» En réalité, d'après un observateur de la place financière d'Alger, «les entreprises publiques n'ont pas réellement redémarré et souffrent toujours d'endettement». Solidement implanté dans les milieux des affaires, en particulier dans les milieux financiers, le cabinet Strategica devient incontournable et, avec lui, Lachemi Siagh, le nouveau «Monsieur emprunt obligataire». Il gagne beaucoup d'argent, bien sûr, mais accède aussi aux données les plus confidentielles des entreprises. Comment ?
Lors de l'élaboration des notices présentées à la Commission d'organisation et de surveillance des opérations en Bourse (Cosob), les entreprises – y compris les banques – doivent ouvrir tous les documents aux experts du cabinet : états comptables et financiers, résultats commerciaux, actifs, comptes… «Lachemi Siagh était mieux informé sur l'économie nationale que les ministres concernés du secteur, confie une source au gouvernement. Même le Premier ministre ne disposait pas d'une telle base de données ! Il avait accès à des informations sensibles sur toutes les entreprises publiques, les grands comptes privés, les banques…»
Les affaires prospèrent
Le financier soigne aussi ses amitiés et se rapproche du très puissant Issad Rebrab, patron de Cevital. Il entrera plus tard dans le conseil d'administration. «Rebrab avait une totale confiance en Siagh : il voyait en lui ce conseiller qui lui manquait», confie un proche collaborateur. En 2006, Siagh lance un emprunt obligataire de plus de 90 milliards de dinars pour le financement d'un des projets de l'empereur de l'agro-alimentaire. Cette opération, première du genre à être initiée par une entreprise privée en Algérie, se solde par un succès qui ne fera que consolider la renommée de Lachemi Siagh. On s'arrache son numéro de téléphone, il est invité dans les grandes réceptions, se rend aussi souvent à l'étranger, tous les patrons se ruent vers le nouveau siège de Strategica à la tour ABC aux Pins Maritimes.
EEPAD, ENTP, Enafor, ETRHB Haddad, ALC et bien d'autres font désormais partie de ses clients attitrés. Il fait même main basse sur les campagnes de publicité des emprunts obligataires. «Il veille toujours à ce que la clause réservée à la publicité dans les contrats de lancement des emprunts obligataires lui revienne de droit», confie un ex- collaborateur. Ainsi, toutes les campagnes de publicité estimées à coups de milliards sont gérées par ses soins. Pour cela, il ouvre sa propre agence de communication, Kalamcom, spécialisée dans la communication financière. Il a même mis sur pied un institut algérien des hautes études financières, dont il est PDG, destiné à former les cadres des institutions bancaires et financières et «à rafler le marché de la formation spécialisée pour les financiers», souligne ironiquement un ancien collaborateur. Il lance également Strategica Business & Finance, une revue mensuelle, distribuée à environ 5000 exemplaires. Son chef de rédaction : Omar Zeghmi, ancien journaliste de l'APS.
Cette revue n'est pas visible dans le paysage de la presse algérienne, mais attire tout de même beaucoup de publicité. Ses affaires prospèrent, il enchaîne emprunt sur emprunt obligataires, multiplie ses contacts et se lance dans des affaires d'investissement et l'installation en Algérie de banques notamment arabes – qu'il connaît lors de son passage au Moyen-Orient. D'après ses anciens collaborateurs, il serait derrière l'installation de Eemar, EIIC, Al Rayane Bank, Essalem Bank et bien d'autres investisseurs principalement arabes. En 2007, il figure même sur la liste des ministrables pour les Finances. D'après ses collaborateurs, il devient aussi de plus en plus «inaccessible et autoritaire» et éclipse son associé Lies Kerrar. «Trop marginalisé», ce dernier décide de claquer la porte en 2007 et de créer son propre cabinet conseil à Paris : Humilis Corporate Finance Advisory. Mais il ne réussit pas à s'implanter en Algérie et à rafler des marchés monopolisés par son ex-ami de Montréal.
Le tournant «Ouyahia»
Mais le vent tourne. Ahmed Ouyahia s'est déjà opposé à sa nomination de ministre. Il aurait gardé en mémoire son rôle dans le projet de privation du CPA, première banque commerciale en Algérie, dont Siagh fut un fervent partisan. La Banque d'Algérie lui refuse l'autorisation pour ouvrir la banque dont il rêve. Alors il cède 51% des parts de Strategica à Deutsche Bank en juin 2007, mais reste directeur. Une année plus tard, il cède la totalité du capital. Strategica est transformée en une entreprise de cotation boursière, Deutsche Capital Markets Algeria (DCMA). C'est en 2008 que s'opère le véritable tournant. Au premier semestre, Ahmed Ouyahia prépare le tour de vis protectionniste qu'il compte donner à l'économie du pays avec la loi de finances complémentaire de 2009, et aurait demandé, selon nos sources, d'enquêter sur les banques étrangères installées dans le pays. L'IGF s'en occupe. Les premiers éléments de l'enquête auraient révélé un quasi-monopole des fonds levés par Strategica.
Pendant l'été 2008, la Cosob refuse de délivrer le visa au groupe Dahli appartenant à l'homme d'affaires Abdelwahab Rahim (un ami de Lachemi Siagh), Maghreb Leasing et Taurus Ingineering, et traîne pour que soit accordée l'augmentation du captial d'Essalem Bank. Un coup qui rejaillira sur les émiratis d'EIIC, qui devaient être accompagnés, entre autres, par Essalem Bank, dans ses investissements en Algérie. L'homme derrière ces montages financiers : Lachemi Siagh. L'enquête va loin. Les chancelleries auraient reçu des ordres de surveiller l'homme de près. Des informateurs assurent qu'il vendrait des informations sensibles sur l'économie nationale. Cette année, après le remaniement ministériel, il perd son dernier appui : Chekib Khelil. Pour certains observateurs, il se serait montré trop gourmand. Pour d'autres, les accusations d'espionnage économique par Ahmed Ouyahia seraient fondées. Enfin, pour d'autres encore, il ferait certainement partie, avec d'autres (Rahim, Nouar Harzallah), d'un clan à éliminer, celui de Larbi Belkheir. Bien des questions restent sans réponse. A commencer par celle-ci : Lachemi Siagh, parti depuis des mois à l'étranger, serait-il en fuite ?


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