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Si l'image de l'islam se dégrade de plus en plus, c'est en grande partie par la faute des musulmans
Publié dans El Watan le 22 - 02 - 2013

-Vous avez réagi à un récent sondage (Ipsos pour Le Monde le 25 janvier) qui conclut que la religion musulmane ne s'accommode pas avec les valeurs de la démocratie et de la laïcité.Mais ces conclusions ne sont pas nouvelles.
Je n'ai pas été surpris par le rejet des musulmans par les Français révélé à travers ce sondage, mais je ne pensais pas qu'il atteindrait ce niveau : 74% des Français estiment que l'islam n'est pas compatible avec la République ! C'est très grave.
-Les résultats de ce sondage traduisent-ils une méconnaissance de l'islam et des musulmans ou un parti-pris de la société française ?
Les deux. Parce qu'on n'aime pas ce qu'on méconnaît. Or, l'enseignement du fait religieux est quasi absent des manuels scolaires. Deux éléments sont à prendre en compte : certains médias, qui n'ont jamais caché leur hostilité envers l'islam, et dans le même mouvement, la tentative de quelques intellectuels qui ont été jusqu'à douter de l'apport de la civilisation arabo-musulmane à l'Occident. Par ailleurs, je renvoie dos à dos les musulmans et les Occidentaux. L'Occident est responsable de cet antagonisme latent avec l'islam, qui existe depuis des lustres, mais devenu flagrant depuis la décolonisation et le partage de la Palestine.
D'un autre côté, l'Occident reproche aux musulmans de ne pas avoir une autorité religieuse à l'image du Vatican pour les chrétiens, compétente pour dire l'islam et mettre fin à toutes les spéculations. Or il n'y a pas de clergé dans l'islam sunnite et cela complique encore plus la communication sur le sujet, d'autant que la communauté musulmane est riche de sa diversité et des différentes cultures et civilisations qui la composent. Il appartient aux musulmans et à eux seuls de s'organiser pour mieux faire connaître leur religion. Et si l'image de l'islam aujourd'hui se dégrade de plus en plus, c'est en grande partie par la faute des musulmans dont on sait que certains pays disposent de moyens suffisants pour se doter de moyens modernes et puissants de communication. Au lieu de se faire concurrence dans l'achat de palaces, de châteaux et de yachts, certains pays devraient investir dans les médias et les moyens de communication modernes pour corriger cette image exécrable et faire connaître les vraies valeurs de l'islam.
-On reviendra à la responsabilité des musulmans, mais les Occidentaux, et plus particulièrement les Français ont-ils fait l'effort nécessaire, ont-ils eu la curiosité intellectuelle suffisante pour découvrir l'islam en tant que religion et culture ?
Les Français n'ont pas fait cet effort pour plusieurs raisons. L'école orientaliste en France n'a plus les moyens de se développer et la génération des grands orientalistes a disparu. Il faut se demander pourquoi la France, qui a possédé comme colonies plusieurs pays arabophones, ne développe pas plus que cela l'enseignement de la langue arabe. Qu'ont fait les pays d'Afrique du Nord, pour leur part, pour encourager l'enseignement de la langue arabe en France ? Est-ce que l'Algérie dégage des sommes suffisantes pour ce faire ? On ne peut pas reprocher aux Français de ne pas enseigner notre langue. Est-ce que les pays musulmans enseignent les autres religions ? Est-ce que l'enseignement de l'islam dans les pays musulmans est conforme au message coranique ? Il est permis d'en douter quand on voit ce nouvel islam d'importation qui ne s'intéresse qu'à l'écume des choses et qui privilégie les apparences au détriment du fond.
-Dans le même ordre d'idées comment expliquez-vous que les intellectuels musulmans ou d'origine arabo-musulmane ne soient pas visibles ?
Ils ne sont pas visibles parce qu'on ne leur tend pas le micro, parce qu'on ne leur ouvre pas les colonnes des journaux et parce que leurs écrits ne sont pas facilement accessibles. Quand les médias veulent parler de l'islam, ils vont chercher des islamologues consensuels, qui tiennent un discours qui plaît à tout le monde. En France il y a des imams, des intellectuels, des philosophes et des islamologues de grande valeur. Ils n'intéressent pas les médias parce qu'ils donnent de l'islam une image apaisée et qu'ils font preuve d'une grande ouverture d'esprit et d'un goût prononcé pour le dialogue des civilisations et des religions.
-Vous pensez à qui ?
Je pense par exemple à Ghaleb Bencheikh, dont l'érudition en général et la connaissance des religions lui confèrent une autorité naturelle très peu sollicitée par les médias. Cela dit, commençons nous-mêmes par reconnaître les nôtres et par les aider à être visibles compte tenu de leurs compétences. Pourquoi ne pas lui confier la relève de Dalil Boubaker à la mosquée de Paris par exemple ? Je pense aussi à des imams comme Tarek Oubrou, rarement présent sur les plateaux de télé, ou à Larbi Kechat, complètement ostracisé. Cela me fait beaucoup de peine parce que dans son travail d'exégèse de l'islam, il est critique à l'égard des différentes écoles jurisprudentielles, mais il l'est aussi de manière tout aussi constructive à l'égard de l'Occident. Mais cet aspect positif de l'islam n'intéresse pas toujours les médias. On reproche souvent aux intellectuels musulmans d'être invisibles, de ne pas manifester pour dénoncer telle ou telle dérive. Il faut savoir que l'accès aux colonnes des journaux est de plus en plus difficile. Certes les pages de débats sont de plus en plus sollicitées, mais il y a un déséquilibre très net au détriment de ceux qui essayent de donner une image objective de l'islam et des musulmans.
-Comment peut-on inverser les choses pour que les intellectuels musulmans ou de culture musulmane puissent peser ? N'est-ce pas une question d'organisation ?
Je ne crois pas qu'il soit absolument nécessaire de s'organiser. Ce qu'il faut, c'est que chacun fasse du travail sérieux, sur la durée. Il y a des intellectuels qui sont connus mais est-ce qu'ils font suffisamment d'efforts pour forcer les portes des médias ? Je dois reconnaître que ce n'est pas évident parce qu'au bout d'un certain nombre de tentatives, on n'a plus envie d'y aller. Cela dit, il y a les réseaux sociaux qu'il ne faut pas négliger, notamment pour s'adresser aux jeunes qui ne reçoivent que des images négatives de leur religion et de leur civilisation d'origine, et qui sont condamnés parfois à se rabattre sur les chaînes satellitaires dont ils ne comprennent pas la langue.
-Pour revenir au sondage Ipsos, ne pensez-vous pas que cette vision de l'islam et des musulmans est influencée par la situation dans les pays arabes et musulmans marquée par une radicalisation au nom de l'islam ?
Le lien est évident et on n'a jamais atteint un tel niveau d'opinions négatives. Comment faire pour que les médias ne fassent plus d'amalgame entre islam et terrorisme ? Ce qui peut paraître comme un dérapage sémantique est en réalité l'expression d'un choix délibéré aussi bien chez les politiques que dans certains médias. On commence à sentir un début de changement depuis l'intervention française au Mali. Le président François Hollande ne fait plus référence au mot islam quand il parle des terroristes au Sahel. C'est un premier signe encourageant.
-Le terme d'islam radical ne vous semble pas approprié ?
Il y a l'islam et il y a des usurpateurs de l'islam. Le prophète n'a jamais autorisé qu'on coupe la main à un voleur. Il a toute sa vie insisté sur la valeur dissuasive de la punition. Cette lecture littéraliste du Coran et cette expression de la violence n'ont rien à voir avec l'islam. La très grande majorité des musulmans, ici en France, ou en Afrique du Nord, ne s'est jamais identifiée à ce néo-islam qu'on a été chercher dans des pays rétrogrades, sur la route vers les lieux saints de l'islam, et qu'on singe jusque dans la façon de s'habiller et de vivre.
-Vous rejetez également le qualificatif de djihad dont se revendiquent les groupes armés.
Il y a d'abord le grand djihad, c'est-à-dire l'effort intérieur que l'on fait sur soi-même pour se débarrasser de toutes les scories que nous portons en nous. Le deuxième djihad ou petit djihad consiste à combattre ceux qui attaquent la religion musulmane. Il s'agit d'un combat d'auto-défense et non de je ne sais quelle tentative d'islamisation par la contrainte. La dénomination «groupes djihadistes»a été inventée en Occident pour désigner les salafistes qui ont décidé de porter le fer contre ceux qu'ils appellent les mécréants. Il faut rappeler que le terme «salafiste» a été détourné de son sens véritable par ceux-là mêmes qui s'en réclament aujourd'hui. Les musulmans sont salafistes par nature, puisqu'ils doivent prendre exemple dans leurs comportements sur les premiers compagnons fidèles du Prophète et dont la vie a été exemplaire (Essalaf essalih).
-Vous parlez volontiers d'ijtihad.
L'ijtihad, c'est l'effort d'interprétation dans l'exégèse islamique. Cet effort doit traduire le dynamisme de la réflexion des musulmans dans leur recherche de solutions à leurs problèmes quotidiens et ayant un rapport direct avec leur environnement et leur vie quotidienne. Il est accompli par les spécialistes de la jurisprudence (fouqaha') dont le rôle est consultatif. C'est cet effort qui a pratiquement disparu des pays musulmans et qui doit reprendre rapidement sa place si l'on veut que l'islam rattrape le temps perdu.
-Comment expliquez-vous que les musulmans tournent le dos à l'échange, au savoir, au débat contradictoire ?
Je ne crois pas que les musulmans tournent le dos au savoir, car ce serait une négation totale de leur foi. Le premier verset révélé nous enjoint de lire. J'aurais plutôt envie de dire que ce serait dû à une volonté politique de la part de leurs gouvernants. Maintenir les populations à un certain niveau d'ignorance, c'est éviter toute velléité de partage ou de prise du pouvoir. Prenons le cas du soufisme, il est respecté en Occident parce qu'il n'a jamais tenté de prendre le pouvoir politique ou de réformer le monde. Le soufi pratique le djihad sur soi en permanence pour s'améliorer, se purifier et suivre les véritables préceptes de l'islam. Or, cela peut paraître contradictoire, c'est précisément dans certains pays musulmans que le soufisme est très mal vu quand il n'est pas combattu. Est-ce qu'on aborde le soufisme dans l'enseignement religieux dans les pays musulmans ?
La réponse est non, à quelques rares exceptions. Lorsque le premier verset du coran invite le croyant à lire au nom de Dieu et que ces mêmes prétendus musulmans vont brûler des manuscrits comme à Tombouctou, tout est dit sur leur vraie nature. Pourquoi les pays arabes n'utilisent-ils pas leurs pétrodollars pour promouvoir la culture arabo-musulmane, sauvegarder ces archives, ouvrir des bibliothèques, financer des centres d'études, investir dans le savoir et dans les moyens de communications ? Vous parliez d'échanges. Savez-vous qu'on traduit plus de livres en serbo-croate qu'en langue arabe ? Savez-vous que l'Académie arabe n'existe plus ? Savez-vous qu'en Algérie, on importe des manches à balais de Chine ? De quels échanges parlons-nous ?
-La voie de l'islam éclairé viendrait-elle du soufisme ?
Pas exclusivement bien sûr, mais c'est la voie appropriée pour aborder la spiritualité en islam. Pour apaiser le débat, il faudrait peut-être entendre les soufis pour qu'ils expliquent au grand public ce qu'est la spiritualité chez les musulmans et je crois que c'est la meilleure façon d'aller vers une image conforme au message coranique. Les soufis sont des musulmans très ouverts, ils peuvent servir de passerelle entre l'Orient et l'Occident, y compris entre les musulmans eux-mêmes. Encore faut-il les solliciter et les associer officiellement à une réflexion collective sur le devenir de l'islam.


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