10e Conférence mondiale de Dar Al-Ifta d'Egypte: Zaid El Kheir préside un panel scientifique au Caire    ANP: 4 terroristes abattus au niveau des frontières sud-est et reddition d'un autre à Bordj Badji Mokhtar    Rentrée universitaire: report de la date du début des cours au 22 septembre prochain    Clôture des travaux de l'AG de l'Union des scouts parlementaires arabes au Sultanat d'Oman    L'ANPDP lance son nouveau site internet    Plus de 300 professionnels de santé lancent un cri d'alarme face au siège "cruel" de Ghaza    Agression sioniste contre Ghaza: le bilan s'alourdit à 61.722 martyrs et 154.525 blessés    L'UIPA condamne le ciblage systématique des journalistes à Ghaza par l'occupation sioniste    Foot/ CHAN 2024 : la sélections nationale intensifie sa préparation    Foot/ CHAN-2024 (décalé à 2025) (Gr.C/ 4e journée) Guinée-Algérie : victoire impérative pour les "Verts"    Foot/ CHAN-2024 (décalé à 2025) Gr.C : le point avant la 4e journée    L'UIPA souligne l'importance du rôle des jeunes dans la réalisation des ODD    ANP: inauguration du nouveau siège de la Direction centrale des carburants    Timimoun: un financement de 200 millions DA pour la réhabilitation des foggaras    IATF 2025: l'Algérie vise un succès déterminant pour booster le commerce africain    Israël abat cinq journalistes d'Al Jazeera dont Anas al-Sharif    NA Hussein Dey : décès de l'ancien international Sid Ali Lazazi    La sélection algérienne en stage à Sidi Moussa    La France viole les traités internationaux    L'Algérie présentera les grandes lignes de sa stratégie énergétique    50 décès sur les routes et 13 autres par noyade    Clôture des travaux de la 24e Conférence des scouts arabes des mourchidate    Les investisseurs appelés à déposer leurs programmes prévisionnels d'importation avant le 20 août    La 13e édition bat son plein à Guelma    Un génocide révélé par les archives de la France coloniale    La bataille de «Djebel Stamboul», un haut fait d'armes de la glorieuse Guerre de libération    10e Conférence mondiale sur la fatwa: Belmehdi rencontre nombre de représentants des pays musulmans participants    Signature à Istanbul d'un mémorandum d'entente entre le SNEL et l'Association internationale des éditeurs de livres arabes    L'Algérie s'oppose fermement au projet sioniste    « Transformer ce mécanisme en levier de diversification économique durable »    Arrestation de deux suspects impliqués dans une agression à l'arme blanche contre un individu à Oum El Bouaghi    CHAN 2024 : match d'application pour les remplaçants    Le président du HCI prend part au Caire à la 10e Conférence mondiale de Dar Al-Ifta d'Egypte    Boudjemaa met en avant les réformes structurelles et la modernisation du système judiciaire    Abdelmadjid Tebboune préside la cérémonie    Le président de la République honore les retraités de l'Armée et leurs familles    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Avez-vous lu Mouloud Feraoun ?
Publié dans El Watan le 27 - 09 - 2013

Cet écrivain algérien est né en 1913 à Tizi Hibel en Grande Kabylie, dans l'Algérie alors coloniale, comme d'autres écrivains d'autres colonies, françaises ou britanniques qui, par la force de leur formation écrite, ont écrit en français : ainsi c'est le centenaire de la naissance en cette année 2013 d'Aimé Césaire (magnifiquement célébré en Martinique, son île), de Jean-Jacques Rabemananjara de Madagascar, d'Albert Cossery d'Egypte, de Marguerite Taos Amrouche d'Algérie pour citer des écrivains qui ont partagé, selon leur situation et leur pays, de semblables expériences du même côté de la fracture coloniale que Mouloud Feraoun.… On parle de Mouloud Feraoun à propos de Camus : il serait plus juste d'associer son nom à celui d'Emmanuel Roblès, artisan de la publication du Journal écrit pendant la guerre jusqu'à son assassinat par l'OAS, le 15 mars 1962. Rappelons que l'ensemble de l'œuvre de Mouloud Feraoun a été rééditée en livres de poche par l'ENAG éditions, à Alger, en 1992.
Grâce à la magie d'internet, on peut consulter à son sujet le numéro spécial que lui a consacré la revue Berbères – Actualités et Culture [http://www.acbparis.org/]. Ou le dossier conséquent du magazine littéraire algérois, L'ivrEscq, dans sa livraison de mars/avril 2012, n°16, dans un dossier très documenté : «Cinquantenaire de l'assassinat de Mouloud Feraoun, Lettres inédites, l'héritage feranounion» [www.livrescq.com], sous la coordination de Hamid Nacer-Khodja. En ce mois de septembre 2013, c'est à la revue Algérie Littérature/Action [http://marsa-algerielitterature.info] qui lui consacre un dossier (n° 173-176). J'y donne un long compte rendu de la biographie très contestable que le journaliste, bien connu des colonnes des journaux algériens, a fait paraître avant l'été : José Lenzini, Mouloud Feraoun – Un écrivain engagé (Biographie – Préface de Louis Gardel), Le Méjan, Actes Sud SOLIN, collection «Archives du colonialisme».
Outre quelques contrevérités comme une sorte de prééminence de l'amitié de Camus avec Feraoun sur celle de Roblès, on affirme que c'est la première biographie sur Feraoun, ce qui est faux. Il y en a eu au moins deux, même en mettant de côté toutes les études qui ont consacré à l'écrivain, une restitution des événements essentiels de sa vie : en 1982, celle de Marie-Hélène Chèze, Mouloud Feraoun – La voix et le silence ; en 1990, celle de Jack Gleyze. Il est légitime alors de poser à une nouvelle biographie des questions de base : que nous apprend-elle de Feraoun qu'on ne sait déjà ? Quels sont les choix et donc les silences et qu'induisent-ils ?
Ce que le biographe met en œuvre est une dynamique entre l'œuvre, son contexte et des témoignages. Il est bien maître du discours et avance, dans le champ des idées et des sensibilités, un portrait imaginé au fil des informations recueillies et de ses propres convictions. On constate que beaucoup est avancé et peu est démontré : ainsi la proximité entre les idées de Feraoun et de Messali Hadj, son intérêt pour le maire d'Alger très controversé alors, Jacques Chevallier, sur ses rapports réels avec Camus. Beaucoup de reconstitution, d'imagination qui apparente plus cette biographie à un récit fictionnel qu'à une biographie véritable ; José Lenzini excelle dans ce genre, comme il l'a montré avec Les derniers jours d'Albert Camus ou Aurélie Tidjani, princesse Tidjani ou Barberousse.
Dans la reconstitution de la vie littéraire à Alger, les sélections sont drastiques. Si des noms sont évoqués autour des Algérianistes et de l'Ecole d'Alger, on constate l'absence totale de Jean Sénac et celle de nombreux autres écrivains algériens. Quant à Fanon, il a droit à une mention stéréotypée, la violence, et la note lui attribue «une dizaine d'ouvrages», de façon assez désinvolte, sans qu'on n'ait jamais la preuve que Feraoun l'ait lu. Les sources historiques sont, elles aussi, assez sélectives.
Et là où l'absence de rigueur documentaire devient problématique, c'est dans la reconstitution des événements qui se passent pendant la guerre. Le chapitre le plus litigieux est celui intitulé «Menrad assassiné». Est-il besoin de préciser que c'est Mouloud Feraoun, dans son entièreté de citoyen, de professionnel de l'éducation, d'écrivain et d'Algérien qui a été assassiné et non son personnage littéraire. L'article de la section de Toulon de la LDHS (François Nadiras), mis en ligne le 5 juillet 2013 : «Une biographie de Mouloud Feraoun qui suscite bien des questions» souligne le silence sur les commentaires de Feraoun quant à la journée des barricades du 24 janvier 1960 à Alger en relevant aussi les erreurs factuelles, un désordre chronologique et des citations de Feraoun inattendues. Enfin, et c'est sans doute, le plus contestable, la manière de débusquer, grâce à l'ouvrage d'Alexander Harrison, des propos d'anciens membres du commando de l'OAS sur leur mission accomplie le 15 mars à Château-Royal et l'erreur faite sur la personne de l'écrivain : comment a-t-il pu y avoir «erreur» puisque les six assassinés ont été appelés par leur nom, un par un, pour sortir de la salle de réunion et être mitraillés à bout portant ? Comment peut-on affirmer que, sans doute, «Mouloud Feraoun n'était pas visé» (p. 350) ?
Un autre article, publié sur internet le 30 juin 2013, «Mouloud Feraoun assassiné pour la deuxième fois» d'Anne Guérin-Castell posait comme essentiel, d'entrée de texte, l'incontournable travail de Jean-Philippe Ould Aoudia, L'Assassinat de Château-Royal – Alger : 15 mars 1962 qui est une enquête fouillée établissant les causes, le déroulement et les conséquences de cette exécution collective et non anonyme. Je n'en reprendrai pas toutes les remarques, mais ce qu'elle dit de la «manière tendancieuse de présenter les faits, d'avancer certaines choses». En réalité «frapper l'imagination, c'était justement le but avoué de l'OAS, et le sextuple assassinat du 15 mars 1962 est dans la droite ligne de l'instruction 29 du général Salan, datée du 23 février 1962 et du texte diffusé à la même période préconisant de ‘‘s'attaquer aux personnalités intellectuelles musulmanes […] chaque fois qu'un de ceux-ci sera soupçonné de sympathie à l'égard du FLN, il devra être abattu''». «On ne peut renvoyer dos à dos deux versions comme si la vérité n'avait pas été faite.» La mort de Feraoun a été tout sauf accidentelle.
Ce dont veut attester le biographe correspond à une certaine tendance dans tout ce qui s'écrit sur l'Algérie et sa guerre de Libération, de considérer qu'il y a quelques dirigeants à honnir de part et d'autre mais que les «gens», le «peuple» ont suivi malgré eux, les «Arabes» et les «Européens», selon les qualifications ici privilégiées. Ainsi, on peut lire, p. 257, dans son deuxième paragraphe : «Feraoun ne peut rester insensible à la démesure des violences. […] La barbarie se généralise au nom des mêmes principes défendus par chaque camp. A chacun ses méthodes, ses mises en scène.»
A propos de Feraoun, José Lenzini a voulu donner sa propre interprétation des événements algériens, la défense d'une certaine Algérie, celle dont l'autonomie rétablissant une justice et des droits, ne se serait pas séparée de la France, selon la solution avancée par Camus.
La collection «Archives du colonialisme» se veut un outil qui revient «aux faits, aux archives, pour la nécessaire étude du passé colonial du pays des droits de l'homme». Il y a peu d'archives ici et peu de confrontation avec les acteurs d'une époque et les critiques de l'œuvre feraounienne. Et comme nous l'avons toujours affirmé, c'est vers une lecture réelle et approfondie de l'œuvre même de cet écrivain qu'il faut toujours et encore revenir. Toutefois, d'autres biographies de Feraoun seront à écrire.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.